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Présidentielle 2007

Royal cherche Sarkozy

Ségolène Royal lors du meeting du 11 avril 2007 à Metz. 

		(Photo : Reuters)
Ségolène Royal lors du meeting du 11 avril 2007 à Metz.
(Photo : Reuters)
Toutes les occasions sont bonnes pour taper sur Nicolas Sarkozy. Dans la dernière phase de sa campagne, Ségolène Royal, la candidate socialiste, a annoncé qu’elle privilégierait la stratégie du «projet contre projet». Mais quel que soit le sujet dont elle parle -nation, génétique, valeurs, politique internationale-, on constate qu’elle en revient systématiquement à mettre en cause le candidat de l’UMP.

Le temps où Ségolène Royal laissait à son entourage le soin de s’en prendre à Nicolas Sarkozy est bien fini. Désormais la candidate socialiste va au charbon, elle aussi. Alors que le compte à rebours avant le premier tour est enclenché, elle n’a plus vraiment la possibilité de rester au-dessus d’une mêlée où les candidats doivent jouer des coudes pour marquer des points. Tout en affichant sa «sérénité», elle s’engage donc sur la voix de l’attaque œil pour œil, «projet contre projet».

Lors de son meeting du 11 avril à Metz, Ségolène Royal n’a pas mâché ses mots pour montrer sa différence. Elle s’est présentée comme celle qui défendait «les valeurs de construction contre les valeurs de destruction». Elle a expliqué sa méthode : «Moi je vous propose de réformer avec vous la France sans brutalité. Je suis la force sereine d’un changement efficace face à une brutalité agitée du passage en force». Sans jamais nommer Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal a donc dressé à sa manière son portrait.

Rassurer la gauche

La candidate socialiste a plaidé pour une méthode différente, mais elle a aussi défendu une vision de la société qu’elle veut à l’opposé de celle du candidat de l’UMP. Elle a ainsi évoqué son ambition de lutter en priorité contre «le chômage, la vie chère, les inégalités de toutes sortes». Elle a ainsi tenté de rassurer son camp de gauche, de donner des gages à son électorat naturel parfois déstabilisé par son discours sur la nation, la Marseillaise ou le drapeau. Et pour que tout cela soit encore plus convaincant, Ségolène Royal a évoqué en comparaison celui qu’elle accuse d’incarner «l’exercice du pouvoir qui sait tout», «un avenir où tout s’achète», mais aussi «la loi de l’argent où l’échec paie comme on est au sommet».

Cette dernière évocation ne doit rien au hasard et s’inscrit dans la droite ligne de la polémique provoquée par l’annonce des indemnités de départ de quelque 8 millions d’euros accordées à l’ancien patron d’Airbus puis d’EADS, Noël Forgeard, alors qu’un plan de restructuration devrait aboutir à plusieurs milliers de licenciements dans cette entreprise aéronautique. Même si Nicolas Sarkozy a, lui aussi, dénoncé le montant énorme des «parachutes dorés» accordés à certains patrons de grandes sociétés, Ségolène Royal a été plus ferme face à ce qu’elle a nommé un «scandale». Elle a insisté sur la responsabilité de l’Etat qui est actionnaire de la société. Et elle a assuré que si elle était élue, les choses changeraient : «L’Etat mettra en place de vraies politiques industrielles et ne tolérera pas que des dirigeants qui ont échoué partent avec la caisse tandis que des salariés, eux, paient les pots cassés».

Ségolène Royal n’a pas directement mis en cause la position de Nicolas Sarkozy mais en critiquant la gestion du dossier Airbus par le gouvernement, elle est revenue d’une certaine manière à une rhétorique qui vise à présenter son principal adversaire comme le candidat sortant, donc celui qui doit assumer le bilan et les erreurs des années Chirac. Elle a, en revanche, attaqué directement les propos tenus par Nicolas Sarkozy dans un entretien avec Michel Onfray pour le magazine Philosophies. Le candidat de l’UMP y a notamment déclaré qu’il avait tendance à penser «qu’on naît pédophile» et que les jeunes qui se suicident avaient une «fragilité» génétique. Ségolène Royal a réagi vivement en jugeant ces positions «dangereuses» et «révélatrices de la brutalité, de la façon de faire et de penser de Nicolas Sarkozy».

La candidate socialiste a aussi profité de cette polémique sur «l’inné et l’acquis» pour politiser le débat en mettant en avant les différences entre la droite et la gauche : «Comme ils ne reculent devant rien pour se droitiser, comme avec eux tout est possible même le pire, les voilà maintenant qui proposent de traquer le gène de la délinquance chez les moins de trois ans et qui imputent à la fatalité biologique le suicide des adolescents dont on n’a pas su entendre la souffrance à temps».

Sarkozy, l’ennemi

Même lorsqu’elle s’est intéressée à la politique internationale, Ségolène Royal en est arrivée à «tâcler» son concurrent de l’UMP. Elle a affirmé qu’elle voulait être la voix de la France «sans arrogance». Mais elle a aussi donné sa version des relations franco-américaines en prenant soin de rappeler la rencontre décriée de Nicolas Sarkozy avec le président des Etats-Unis en septembre dernier : «Je ne serai pas celle qui ira serrer la main de George Bush comme si de rien n’était, sans un mot pour nos désaccords tactiques et stratégiques quant à la bonne façon, par exemple, de lutter contre la propagation de l’extrémisme religieux».

Ségolène Royal continue de faire chanter la Marseillaise à la fin de ses meetings. Mais elle semble avoir abandonné la stratégie de positionnement sur les thèmes qui tournent autour de la nation, de l’identité nationale et de la sécurité. Il est vrai que cela ne lui avait pas valu que des compliments à gauche. Et à dix jours du scrutin, persister dans cette voix, où Nicolas Sarkozy et Jean-Marie Le Pen ont une longueur d’avance, n’aurait peut-être pas été la meilleure manière de préparer l’échéance. Si la candidate socialiste veut éviter la dispersion des voix et bénéficier d’un vote «utile», c’est sur sa gauche qu’elle doit convaincre. Et en plaçant Nicolas Sarkozy en position d’adversaire numéro un, elle s’y emploie.



par Valérie  Gas

Article publié le 12/04/2007 Dernière mise à jour le 12/04/2007 à 15:01 TU

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