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Présidentielle 2007

La parole aux électeurs

Montpellier (sud de la France): affiches de la campagne électorale. 

		(Photo: AFP)
Montpellier (sud de la France): affiches de la campagne électorale.
(Photo: AFP)
Le moment de voter est venu. Après plusieurs mois intenses et ces dernières semaines haletantes, les candidats vont maintenant attendre le verdict des urnes, dimanche 22 avril en début de soirée. Deux d’entre eux enchaîneront ensuite pour quinze jours de sprint avant le deuxième tour, le 6 mai. Entre sondages et programmes, attaques personnelles et confrontations d’idées, avec des «gros» et des «petits» candidats, on aura eu tous les ingrédients d’une campagne pour l’élection présidentielle. Tous, sauf des débats face-à-face.

De nombreux électeurs sont indécis. C’est en tout cas ce que disent les sondages qui estiment qu’ils représentent entre 30 et 40% des votants. Il semble donc que le choix de la dernière minute, dans le calme et le recueillement de l’isoloir, puisse être, cette année, déterminant sur le résultat. Beaucoup d’électeurs expliquent qu’ils attendent le déclic pour se décider. Quitte à attendre jusqu’au dernier moment. Mais pendant les 48 heures précédant le scrutin, ils doivent réfléchir sans entendre les candidats puisque la campagne officielle a pris fin vendredi 20 avril à minuit.

A partir de là, plus d’intervention dans les médias, ni meeting, ni sondage. L’objectif est de ne pas influencer les électeurs dans les dernières heures avant le choix et de leur permettre de faire le vide dans leurs têtes après des mois d’une campagne où les enquêtes se sont succédé à un rythme très soutenu. En 2002 pourtant, la crédibilité des sondages qui n’avaient pas annoncé la montée en puissance de Jean-Marie Le Pen, avait été mise en cause. En 2007, on n’en a visiblement pas déduit qu’il fallait y recourir avec modération. Il y a eu plus d’enquêtes sur les intentions de vote réalisées pour cette campagne présidentielle que pour la précédente.

Des Français indécis mais intéressés

Au vu des résultats du premier tour, on évaluera donc si cette fois-ci les sondages ont réussi à tracer la courbe des fluctuations de l’opinion. Si le duel Royal-Sarkozy a lieu ? Si le phénomène Bayrou est à la hauteur de la progression du candidat centriste dans les enquêtes ? Si l’hypothèse Le Pen en embuscade se vérifie ? Si les «petits» candidats obtiennent des scores moins élevés qu’en 2002 ?

En attendant, on sait une chose : les Français ont suivi la campagne avec intérêt. Les émissions politiques à la radio ou la télévision ont réalisé de très fortes audiences. Les sites Internet ont enregistré un trafic important. Et selon les enquêtes, environ les deux tiers des sondés affirment avoir été tenus en haleine. Est-ce parce qu’en 2007, l’élection leur a paru plus ouverte et qu’on a assisté à un certain renouvellement de la caste des candidats ?

Incontestablement, cette présidentielle marquera une étape, la fin d’une époque. Arlette Laguiller et Jean-Marie Le Pen, doyens des candidatures, font ainsi un peu figure d’exception dans l’équipe des douze qui concourent pour l’Elysée. Ils réalisent vraisemblablement leur dernière campagne. Alors que les autres incarnent la relève. Au-delà d’un Olivier Besancenot, à peine trentenaire, les trois principaux candidats -François Bayrou, Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy- ont la cinquantaine ambitieuse. Chacun représente à sa manière une forme de rupture dans son camp. Aucun n’est le président ou le Premier ministre sortant. Et pour deux d’entre eux, la candidate socialiste et celui de l’UMP, ils se trouvent en position de l’emporter alors qu’ils n’en sont qu’à leur première candidature à la présidentielle. Ce qui est inhabituel en France.

A nouvelle génération, nouvelle manière de faire campagne ? Peut-être dans le sens où les principaux candidats ont eu tendance à brouiller les pistes du traditionnel clivage droite-gauche. Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy se sont souvent positionnés sur les mêmes thèmes : de la valeur travail à l’idée de nation, de la sécurité à l’immigration. Ils ont ainsi montré que désormais il n’y avait plus des questions de gauche et de droite mais des problématiques générales liées aux préoccupations des Français, dont chacun était un peu obligé de s’emparer. Là où Ségolène Royal a fait chanter la Marseillaise en fin de meeting et a vanté les vertus du drapeau tricolore, Nicolas Sarkozy a cité Jaurès comme père de sa pensée. S’agit-il d’une véritable évolution des mentalités politiques où tous les patrimoines sont en partage, ou d’un simple opportunisme électoral ? Ont-ils été crédibles aux yeux des Français dans ce jeu de zigzag ?

Le positionnement de François Bayrou dans cette élection présidentielle a lui aussi marqué une sorte de bouleversement et a posé question. Le candidat de l’UDF s’est engagé sur la voie de la mise en cause de la logique des partis et des élites. A la recherche d’un espace électoral, il a essayé de «bouger les lignes» en utilisant comme argument de campagne le ni droite, ni gauche. Il a rejeté le centrisme qui penche d’un côté ou de l’autre pour se faire l’apôtre du gouvernement d’union nationale avec les plus compétents de tous les camps. Son ascension dans les sondages semble indiquer que ce discours a eu de l’écho. Cela suffira-t-il à le placer en position de rallier un nombre significatif d’électeurs de gauche ou de droite pour passer le premier tour ?

Des enseignements à tirer du scrutin

Dans ce contexte, il y aura vraisemblablement beaucoup d’enseignements à tirer du verdict des urnes. Le premier concernera le résultat de Jean-Marie Le Pen. Une nouvelle qualification du candidat de l’extrême-droite au deuxième tour ferait l’effet d’une déflagration après le précédent du 21 avril 2002. Elle laisserait des séquelles durables en France et nécessiterait de la part des responsables politiques une véritable remise en cause. Un score élevé du leader du Front national ne serait pas non plus anodin. Il faudrait alors en appréhender les motivations : protestation ou conviction ?

Il y a aussi un enjeu important autour du score de Ségolène Royal. Si la candidate socialiste n’accédait pas au second tour, on pourrait s’interroger sur l’avenir du PS et sa capacité à rebondir en tant que principale force politique de gauche après deux échecs successifs au premier tour de la présidentielle avec deux candidats très différents. Le pari de François Bayrou est aussi risqué. S’il échoue à la porte du deuxième tour, il aura du mal à négocier le virage post-électoral. Son repositionnement vers la droite paraît invraisemblable, et vers la gauche aventureux. Quant à Nicolas Sarkozy, à force d’avoir été en tête des enquêtes sur les intentions de vote, il semble presque condamné à sortir en tête du premier tour pour garder sa crédibilité. Fin du suspense, le 22 avril.



par Valérie  Gas

Article publié le 21/04/2007 Dernière mise à jour le 21/04/2007 à 15:24 TU

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