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Guerre au Liban

Première démission d’un ministre israélien

Le départ du gouvernement d'Eytan Cabel (photo), ministre sans portefeuille, également secrétaire général du parti travailliste, pourrait avoir un «effet domino».
 

		(Photo: Reuters)
Le départ du gouvernement d'Eytan Cabel (photo), ministre sans portefeuille, également secrétaire général du parti travailliste, pourrait avoir un «effet domino».
(Photo: Reuters)

Après avoir été accusé d’«échec sévère» dans le rapport sur les ratés de la guerre au Liban,  le chef du gouvernement israélien subit un flot de critiques virulentes. Ce mardi matin, un ministre du gouvernement Olmert a quitté ses fonctions. Cette première démission pourrait bien avoir un «effet domino»  à la tête de l’Etat et provoquer ainsi un séisme politique en Israël. D'ores et déjà, Tzipi Livni, la ministre des Affaires étrangères, demande le départ d'Olmert. 


«A la suite de la publication de ce rapport, je ne peux pas rester dans un gouvernement dirigé par Ehud Olmert». Tels étaient les mots d’Eytan Cabel, ministre sans portefeuille, à l’annonce de sa démission du gouvernement israélien, avant d’ajouter : «Le Premier ministre a perdu la confiance de la population et doit démissionner immédiatement».

Les journalistes et observateurs présents lors de la conférence presse, ce mardi matin, en sont immédiatement conscients: avec le premier départ de ce ministre, la brèche est ouverte dans les rangs de la coalition gouvernementale. Et personne n’est vraiment surpris quand Eytan Cabel déclare qu'il va essayer de convaincre son parti (le Parti travailliste qui détient 19 des 78 sièges au sein de la coalition de M. Olmert) de quitter l’équipe gouvernementale. Après la publication du rapport Winograd, mettant gravement en cause le ministre de la Défense Amir Peretz, ainsi que l’ex-chef d'état-major Dan Halutz et surtout le Premier ministre en personne, on pouvait avoir, tout au long de cette journée de mardi,  l’impression qu’à la tête de l’Etat d’Israël, les rats quittent le navire.

Pierre Razoux

Historien, spécialiste de l'armée israélienne

«Le ministre de la Défense israélien s'est vu reprocher son manque de professionnalisme par la commission Winograd.»

Au sein de sa propre famille politique, Kadima, on ne voit pas d’un très bon œil le refus d’Ehud Olmert de démissionner, : «On ne voit pas comment il pourrait se sortir de cette galère et pourquoi il continue de tirer Kadima avec lui vers le bas», a ainsi indiqué un élu du parti du Premier ministre, voulant garder l’anonymat. La seule dans les rangs de Kadima à avoir publiquement demandé la démission du Premier ministre, est, pour l’instant, la parlementaire Marina Solodkin. «Le rapport est tellement sévère, qu’il doit démissionner. Olmert a commis des erreurs très sérieuses. Il a agi d’une manière extrêmement irresponsable. On ne peut pas ignorer ce qui s’est passé hier ni ce qui se passe aujourd’hui».

L’inquiétude est palpable parmi les membres de Kadima, qui veulent surtout une chose : empêcher à tout prix la tenue d’élections anticipées qui donneraient, d’après de récents sondages, l’avantage à l’actuelle opposition. La stratégie de Kadima a été, ce mardi, de faire entrer dans le jeu un remplaçant pour Ehud Olmert. A cette fin, le président de la majorité parlementaire, Avigdor Yitzhaki, s’est entretenu avec des responsables de Kadima pour évaluer la possibilité d’imposer, à la place de l’infortuné Premier ministre, son actuelle ministre des Affaires étrangères. Très populaire dans les sondages et sortie presque indemme du rapport Winograd, Tzipi Livni semble, aux yeux de beaucoup, la meilleure héritière d’Olmert à la tête du gouvernement comme à la tête du parti. Mardi, Tzipi Livni a déclaré sur une chaîne de télévision : «Olmert doit partir».

Un avis partagé côté Parti travailliste, dont les ministres participant au gouvernement Olmert ne croient plus non plus dans l’avenir politique du Premier ministre. Les chances pour Ehud Olmert de se maintenir au pouvoir jusqu’à la publication du rapport final de la commission Winograd sont jugées «minimes».

Médias unanimes contre Olmert

La publication du rapport de la commission d’enquête, dirigée par l’ancien juge de la Cour suprême Eliahou Winograd, a provoqué un véritable tollé d’indignation à travers le pays. Les cinq membres de la commission y accusent si gravement le Premier ministre ainsi que son ministre de la Défense, Amir Peretz que les éditorialistes israéliens ont été, ce mardi, unanimes sur la question : le chef du gouvernement doit partir.   

«Si Olmert reste à son poste, il est douteux que quelqu’un assume une quelconque responsabilité personnelle sur quoique ce soit. Et Israël pourra fièrement fanfaronner qu’il fait désormais partie du tiers-monde», écrit Nahum Barnea, éditorialiste influent au Yédiot Aharonot.

«Les proche d’Olmert savent la vérité et elle est amère : le Premier ministre ne peut rester à son poste après un tel rapport», estime aussi Ben Caspit dans les colonnes du Maariv.

Pour le quotidien renommé Haaretz la question est de savoir si «ce gouvernement dirigé par Ehud Olmert sera capable de mener la prochaine guerre et de la gagner. La réponse émanant du rapport est un non sans appel. C’est pourquoi ce gouvernement doit céder sa place, d’une manière ou d’une autre». 

Les Israéliens veulent voir Olmert partir

Ainsi la presse israélienne se fait l’écho d’une opinion publique qui pousse également Ehud Olmert à démissionner de sa fonction. Seulement 15% des Israéliens, sondés lundi soir par la radio publique, jugent M. Olmert apte à rester à la tête du gouvernement, contre 70% qui souhaitent son départ immédiat. Une pression qui devrait être maintenue ces prochains jours : des associations de réservistes et de familles des quelques 160 soldats et civils israéliens tués l’été dernier au Liban, ainsi que de nombreuses organisations de droite comme de gauche, ont appelé à une manifestation massive, jeudi à Tel-Aviv, pour exiger la démission du Premier ministre. Côté libanais, la guerre du 12 juillet au 14 août a fait, l’été dernier, 1 200 morts, dont environ 270 combattants du Hezbollah.  

Ehud Olmert, qui a jugé lundi soir une démission de sa part «non opportune», a cependant admis que «de nombreuses erreurs ont été commises par ceux qui ont pris les décisions, moi en tête. Il faut réparer ces erreurs». Le chef du gouvernement essaie donc de sauver sa tête en gagnant du temps. Lui en reste-t-il ? Rien n’est moins sûr. 



par Stefanie  Schüler

Article publié le 01/05/2007 Dernière mise à jour le 01/05/2007 à 15:26 TU

Audio

Michel Paul

Correspondant de RFI à Jérusalem

«Il n'y a pas de mots tendres pour le Premier ministre dans la presse israélienne ce matin.»

[01/05/2007]

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