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Présidentielle 2007

Parce que c’était lui, parce que c’était elle

Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy auront participé à ouvrir de nouvelles portes du monde politique. 

		(Photos : AFP / Montage : RFI)
Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy auront participé à ouvrir de nouvelles portes du monde politique.
(Photos : AFP / Montage : RFI)
Quel que soit le résultat de l’élection présidentielle, il est certain qu’après la campagne de 2007 le paysage politique ne sera plus tout à fait le même. Et il est indéniable que Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy y auront été pour quelque chose. Leur duel qui a dominé la bataille électorale est inédit : parce qu’elle est une femme et lui un homme, parce qu’ils sont tous deux quinquagénaires, parce qu’ils étaient candidats pour la première fois, parce qu’ils ont dû gagner chèrement l’investiture de leurs partis, parce qu’ils n’ont pas joué la mélodie du clivage droite-gauche sur le même air que ceux qui les ont précédés… Au bout du compte, que la France ait une présidente ou un président, son accession à l’Elysée ouvrira une nouvelle ère.

Un homme et une femme : une telle confrontation n’avait jamais eu lieu en France pour l’élection présidentielle. La présence d’une femme en position de présidentiable a eu une influence sur le déroulement de la campagne, et surtout sur la stratégie de celui qui a été son véritable rival dès le départ, Nicolas Sarkozy. On a longtemps dit qu’il redoutait la confrontation avec une femme. Il est certain que cette situation l’a obligé à prendre certaines précautions, notamment verbales. Il n’était pas question d’être condescendant ou agressif. Deux comportements qui lui auraient immédiatement valu des critiques. Le débat télévisé entre les deux tours a été de ce point de vue riche d’enseignements. Ségolène Royal y a fait preuve d’une pugnacité exacerbée. Elle a attaqué son adversaire bille en tête et sans ménagement. Nicolas Sarkozy a pris soin, au contraire, de ne pas céder à la tentation de lui répondre sur le même ton. Il est resté imperturbablement courtois.

Beaucoup d’analystes ont estimé que la présence d’une femme à ce niveau de la compétition présidentielle représentait un véritable progrès dans la politique française. A l’étranger, cela a contribué à développer l’intérêt pour la campagne. Ségolène Royal a senti qu’elle avait une carte à jouer sur sa féminité. Elle l’a, dès le départ, mise en avant comme une différence et un atout. Lors de son dernier meeting à Lille, elle y est encore revenue en invitant les Français à avoir «l’audace» d’élire une femme. Elle a fait plus qu’ouvrir une brèche. Elle a modifié la donne.

Changement de genre et de génération

En 2007, il y a donc eu un changement de genre mais aussi de génération. Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy sont plus jeunes que les candidats auxquels les Français ont été habitués -exception faite de Valéry Giscard d’Estaing âgé de 48 ans en 1974. Elle a 53 ans, il en a 52. Pour la première fois, ce sont deux candidats nés après la deuxième guerre mondiale qui se retrouvent en finale de l’élection présidentielle. Ils incarnent au moins le renouvellement, et peut-être l’avenir.

L’un comme l’autre n’était pas forcément, au départ, le plus légitime pour porter les couleurs de son camp. Ils ont donc eu tous les deux à batailler ferme pour éliminer la concurrence dans leur mouvement. Nicolas Sarkozy s’est longtemps heurté à une forte hostilité de la part des chiraquiens et a dû gérer d’abord l’éventualité d’une candidature de Dominique de Villepin puis de Michèle Alliot-Marie à l’intérieur de l’UMP, voire à l’extérieur. Il a surtout dû prendre en compte l’hypothèse d’une ultime tentative de Jacques Chirac de rester à l’Elysée. Ségolène Royal ne faisait pas partie, quant à elle, du cercle des candidats naturels du Parti socialiste. Entre Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius, qui se sont présentés pour obtenir l’investiture, et Lionel Jospin qui a fait durer le mystère, elle a dû faire face à une concurrence acharnée. Ils ont donc prouvé chacun à leur manière que le talent n’attend pas le nombre des années et que rien n’est joué au départ. Et quel(le) que soit celui (ou celle) qui sera élu, il (ou elle) le sera à sa première candidature. Là encore, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy auront participé à ouvrir des portes.

A nouveaux profils politiques, nouvelle manière de parler de la politique. Avec Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, le clivage droite-gauche a pris du plomb dans l’aile. Même s’ils ont été identifiés comme la candidate de la gauche et le candidat de la droite, cela ne les a pas empêchés de franchir les lignes si nécessaire. On a souvent accusé Ségolène Royal de pencher à droite. Qu’il s’agisse des 35 heures, de la justice des mineurs, de la famille, de la symbolique nationale, elle a pris des positions en fonction de ses convictions plus que de l’idéologie. Nicolas Sarkozy n’a pas hésité, lui non plus, à aller sur les terres de la gauche, par moments. Il a fait de la «valeur travail» le fondement de son programme. Il a aussi revendiqué à plusieurs reprises l’héritage de personnalités de gauche comme Léon Blum ou Jean Jaurès.

Exit le modèle familial traditionnel

Ils ont certainement senti tous les deux que les Français n’avaient plus envie d’entendre ressasser des messages et des méthodes usées, qu’ils attendaient un renouveau en politique. La percée de François Bayrou, candidat centriste pourfendeur de l’affrontement bloc contre bloc, a d’ailleurs montré à quel point l’attente était importante sur ce plan. Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy ont donc tous les deux joué la carte de l’ouverture au-delà de leur formation d’origine dès avant le premier tour. Ils ont revendiqué le droit de bousculer les habitudes au nom de l’efficacité et de l’intérêt général. Ils ont aussi fait passer le message selon lequel ce qui prime c’est l’engagement d’un individu vis-à-vis des Français et pas les liens partisans.

Si Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy incarnent chacun à leur manière le renouvellement de la classe politique, ils sont aussi emblématiques de l’évolution de la société française. Une société où l’image de la famille traditionnelle a beaucoup évolué. Si Ségolène Royal est élue, il y aura à l’Elysée une femme célibataire mais mère de quatre enfants. Pas de première dame donc, mais un premier monsieur, François Hollande, actuel dirigeant du Parti socialiste. Si Nicolas Sarkozy remporte la victoire, ce sera un homme divorcé et remarié, un père de famille recomposée, qui présidera aux destinées de la France. Pas de doute, en choisissant de qualifier Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy pour la finale électorale, les Français ont passé un cap.



par Valérie  Gas

Article publié le 05/05/2007 Dernière mise à jour le 05/05/2007 à 15:29 TU

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