Cinéma
Noir, c'est noir
© Yannick Casanova
Le troisième film en compétition ressort lui d'un tout autre genre : c'est un polar, l'Homme de Londres, du Hongrois Bela Tarr qui adapte un roman de Georges Simenon.
L'homme de Londres est un film noir, très noir même.
© Yannick Casanova
La trame est celle des intrigues classiques de films policier : Maloin, un employé des chemins de fer vivant dans une cité portuaire, devient le témoin d'un meurtre. Il s'empare d'une mallette remplie de billets et sa vie bascule : le voilà confronté à la culpabilité, au péché, à la morale et au châtiment.
Le thème est ambitieux. Le traitement du Hongrois Bela Tarr aussi. Les mouvements de caméra sont lents, voire hiératiques. Le premier plan du film donne le ton des deux heures dix minutes qui vont suivre : un très long travelling ascendant sur une proue de paquebot, puis le cadre s'élargit et l'on observe, à travers des vitres, le dialogue de deux hommes, leurs mouvements, le meurtre accidentel qui survient... Sans coupe ni montage donc, le plan séquence dure bien dix minutes... Et ce n'est pas le seul.
(Photo : Reuters)
La photographie, un noir et blanc signée Fred Kelemen, est certes magnifique. Mais il faut s'armer de patience pour supporter la longueur du film. Difficile dans ce cas de s'attacher aux personnages et de ressentir tout le poids du destin qui les accable.
Radicalité artistique
Ce film exigeant, pour cinéphiles avertis est un peu à l'image de la sélection de cette 60e édition du festival de Cannes. Le délégué artistique, Thierry Frémaux avait d'ailleurs prévenu que cette sélection serait celle des chefs opérateurs. Une sélection, de haut niveau. L'ambition artistique est au rendez-vous. La prétention aussi peut-être. A la projection de presse de l'Homme de Londres, un bon tiers de la salle s'est peu à peu vidée au fur et à mesure des longs plans-séquences.
De même, Stellet Licht, du Mexicain Carlos Reygadas divise les festivaliers : film envoûtant pour certains, film d'un ennui abyssal pour d'autres qui saluent malgré tout une photographie très travaillée, digne d'être exposée dans des galeries ou des musées.
Sans atteindre la même radicalité artistique, d'autres films en compétition ont pu décontenancer les spectateurs, divisant le public. Souffle, du sud-coréen Kim Ki Duk. Et puis Import/Export de l'Autrichien Ulrich Seidl. Là, point de prétention esthétique... Mais une ambition documentaire avec de longues scènes de cinéma-vérité dans des atmosphères sordides.
par Sophie Torlotin
Article publié le 24/05/2007 Dernière mise à jour le 24/05/2007 à 09:36 TU