G8 : climat
La réduction, sans les contraintes
Les chefs d'État, réunis au sommet du G8 à Heiligendamm en Allemagne, ont convenu d'«envisager» une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50%, d'ici 2050, par rapport à 1990. Les États-Unis, la Chine et le Japon étaient opposés à tout engagement contraignant avant la rencontre. Aucun engagement précis des pays n'a été pris pour la réalisation de cet objectif. Les organisations écologiques préconisent une réduction de 80 à 90% des émissions, d'ici 2050.
(Photo : AFP)
50% de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 par rapport à 1990. C’est ce que la chancelière allemande, Angela Merkel, a réussi à obtenir de ses partenaires au cours des discussions du sommet du G8, à Heiligendamm, en Allemagne.
Angela Merkel a salué ce résultat comme «un accord fructueux». Pour la chancelière, il s’agit d’un «signal fort» dans la perspective de la conférence des Nations unies sur le climat qui se tiendra à Bali (Indonésie) en décembre. Cette conférence doit décider des suites à donner au Protocole de Kyoto, dont l’expiration est prévue pour 2012.
L’accord du G8 ne fixe ni calendrier ni objectifs précis en ce qui concerne les actions à entreprendre par les pays pour atteindre ce chiffre de 50%.
Les États-Unis, la Chine et le Japon ont répété à plusieurs reprises avant le sommet du G8 que chaque pays est à même de fixer ses propres objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Les écologistes réclament une réduction de 80 à 90% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, une application plus contraignante du Protocole de Kyoto ainsi que la ratification du traité par les États-Unis, le seul membre du G8 à ne pas l’avoir fait.
Les réticences de Washington
Alors que Bill Clinton était encore président, les États-Unis revendiquaient déjà une position à part en ce qui concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre, estimant qu’une telle mesure affectait «le développement économique du pays».
En 2001, le président George W. Bush, à peine élu, revenait sur sa promesse de ratifier le Protocole de Kyoto. Par la suite, il devait prétexter «le manque de connaissance des effets de l’activité humaine» sur les changements climatiques pour maintenir son refus de rejoindre les signataires du traité. Ce qui n’empêcha pas le président, un an plus tard, de proposer des réductions fiscales aux entreprises qui réduiraient sur une base volontaire leurs émissions de gaz carbonique.
En juin 2002, un rapport de l’administration américaine présenté aux Nations unis indique que les États-Unis doivent réorienter rapidement leur politique environnementale. George W. Bush parle du rapport comme d'une «lubie de bureaucrate».
En juillet 2005, le président américain reconnaît que «les émissions de gaz à effet de serre sont dues aux activités humaines». Quelques semaines plus tôt, les plus grands experts du changement climatique des États-Unis lançaient un cri d’alarme : «les États doivent prendre des mesures, maintenant».
Un protocole «à l’américaine»
La proposition de George W. Bush, le 1er juin dernier, d’une rencontre à l’automne entre les 15 pays les plus «grands émetteurs de gaz à effet de serre» marque un petit pas en avant, même si cette démarche peut se lire comme un «torpillage» du processus mis en place par le Protocole de Tokyo.
Dans une année 2007, au cours de laquelle les scientifiques, les experts et les écologistes multiplient les avertissements -qui plus est, année d'élections primaires- le président américain a été obligé de faire preuve de bonne volonté.
Pour Washington, chaque pays doit établir ses propres objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, dans les 10 ou 20 années à suivre, en fonction du contexte économique. L’objectif commun ne peut être fixé qu’à long terme – plusieurs décades- sur la base de ce que les pays auront réalisé à leur niveau.
Le président américain pointe la Chine, l’Inde comme principaux partenaires de discussion, deux puissances économiques émergentes.
L’usine du monde
La Chine, en plein développement, est sur le point de devenir le pollueur numéro 1 de la planète, devant les États-Unis. Elle est déjà le premier pollueur mondial d’oxyde de soufre, un gaz émis par les centrales électriques, les usines de pâte à papier, les fonderies, les raffineries et les chaudières de chauffage.
Comme Washington, Pékin revendique le droit de contrôler elle-même ses pollutions de l’atmosphère. Mais c’est le seul point d’accord qu’elle partage.
«Chaque Chinois n’émet que 20% de rejets dangereux», plaide Ma Kai, ministre chinois, chargé de la commission d’Etat pour le développement et la réforme, qui a participé au plan d’action national de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
«D’après les statistiques de l'Agence internationale de l'énergie, entre 1990 et 2004, pour une hausse d'1% du PIB, on a enregistré une hausse de 0,6% des émissions de CO2 à l'échelle mondiale, contre seulement 0,38% pour la Chine», insiste-t-il, avant de faire remarquer : «Un accord international serait injuste et inacceptable (…) 80% de l’oxyde de carbone présents aujourd’hui dans l’atmosphère est le résultat de deux siècles de développement industriel des Occidentaux».
L’Inde a fait un bond dans les émissions de gaz à effet de serre depuis 1990. Elle a enregistré une augmentation de 57%, mais reste avec un taux peu élevé de CO2 par habitant : 2t.
La baisse spectaculaire de la Russie s'explique par la fermeture des usines de l'ère soviétique.
Les plus grands pollueurs
Canada | 24 tCO2 * | + 33 % ** | + 27 % *** |
États-Unis | 24 tCO2 | + 23,3 % | + 16,3 % |
Royaume-Uni | 11 tCO2 | - 2,3 % | - 14,8 % |
Chine | 15 tCO2 | - 28,7 % | - 72,7 % |
France | 9 tCO2 | - 1,8 % | - 1,8 % |
Allemagne | 12 tCO2 | + 2,6 % | + 18,4 % |
Italie | 10 tCO2 | + 18,6 % | + 12,1 % |
Russie | 15 tCO2 | - 28,7 % | - 28,7 % |
* tC02 (émissions par habitant)
** (écart par rapport à Kyoto)
*** (évolution des émissions) 1990-2004
par Marion Urban
Article publié le 07/06/2007 Dernière mise à jour le 07/06/2007 à 13:23 TU