par Stefanie Schüler
Article publié le 02/07/2007 Dernière mise à jour le 02/07/2007 à 14:17 TU
Face à un véritable tollé dans l'opinion publique israélienne, le procureur général Menahem Mazuz doit s'expliquer devant la Cour suprême.
(Photo : Reuters)
Le procureur général d'Israël est sommé de se justifier devant la Cour suprême israélienne. Il devra expliquer les tenants et les aboutissants du compromis qu'il a conclu avec Moshé Katsav. L'ancien président est impliqué dans un scandale sexuel sans précédent dans l'histoire de l'Etat hébreu. L'arrangement avec le procureur lui aurait permis d'échapper à la peine de prison. Mais la Cour suprême a accepté de bloquer provisoirement ce compromis. Face à une opinion publique outrée, le Parquet israélien a demandé, ce lundi 2 juillet, un délai supplémentaire pour expliquer cet arrangement, que beaucoup en Israël qualifient de "honte".
L’arrangement conclu, la semaine dernière, entre Moshe Katsav et le procureur général de l’Etat hébreu, Menahem Mazuz, était bien ficelé : le dimanche 1er juillet, l’acte d’accusation aurait du être déposé au tribunal de police de Jérusalem où aurait dû s’ouvrir dans la foulée le procès contre l’ancien président, qui avait démissionné de son poste vendredi 29 juin.
Mais, à la dernière minute, la Cour suprême d’Israël a créé la surprise : «La Cour suprême a été saisie en appel par le Mouvement pour la bonne gouvernance et plusieurs organisation féministes et a donné au procureur général Menahem Mazuz, 24 heures pour s’expliquer sur le compromis conclu avec M. Katsav. Le dossier de M. Katsav ne sera en conséquence pas présenté au Tribunal de police tant que M. Mazuz n’aura pas apporté sa réponse» a indiqué, dimanche, un porte-parole du ministère de la Justice israélien.
Le procureur général de l’Etat hébreu doit donc se justifier pour sa décision d’avoir voulu parvenir à un arrangement avec l’ancien président, accusé de graves délits sexuels.
Le compromis de toutes les indignations |
Le compromis, conclu entre Moshe Katsav et le procureur général d’Israël, Menahem Mazuz, permet au président démissionnaire d’échapper à la prison. Selon cet arrangement, le procureur a inculpé Moshe Katsav des chefs d’actes indécents, d’harcèlement sexuel et de subornation de témoin. En contre-partie, l’ancien chef de l’Etat hébreu accepte de plaider coupable des chefs retenus contre lui et d’être condamné à une peine de prison avec sursis ainsi qu’au dédommagement de deux de ses quatre accusatrices. Par le biais de ce compromis, l’ex-président Katzav ne se verrait donc pas inculpé de viol et d’agression sexuelle, des crimes passibles de 16 ans de prison ferme. |
Cet arrangement a suscité un véritable tollé au sein de la société israélienne. Tandis que le quotidien Yediot Aharonot, le plus fort tirage du pays, titrait en une : «Le compromis de la honte», quelque 20 000 personnes ont manifesté samedi 30 juin, sur la place principale de Tel- Aviv. Pour réclamer que Moshe Katsav soit jugé mais aussi, pour exiger la démission immédiate de Menahem Mazuz de sa fonction.
La position du procureur général, jugée ambigüe par nombre de ses compatriotes, a indigné l’opinion publique : M. Mazuz n’avait en effet pas hésité à qualifier l’ex-président Katsav de «délinquant sexuel multirécidiviste», mais avait décidé tout de même de ne par l’accuser de viol et d’agressions sexuelles par «manque de preuves suffisamment solides». De plus, le procureur avait allégué qu'il n’était pas dans l’intérêt de l’Etat de se lancer dans un procès interminable qui aurait inévitablement salit la fonction présidentielle.
«Un criminel sexuel en série bénéficie d’un traitement de faveur»
Un argument rejeté en bloc par le Mouvement pour la bonne gouvernance. Son vice-président, Michael Partem, explique que «la principale raison de cet accord était de protéger l’honneur de la fonction de président mais c’est le contraire qui s’est produit. Au lieu de poursuivre le président comme une personne ordinaire et d’appliquer la loi selon le principe de l’égalité, on est indulgent avec lui». De leur côté, des organisations féministes jugent le compromis «irrecevable» et «choquant». La plus importante d'entre elles, Naamat, a qualifié le compromis de «crachat à toutes les femmes et à la police qui a recommandé des poursuites pour viol». Les féministes ont été soutenues par le milieu politique. Ainsi, la députée travailliste, Shelly Yachimovitch a estimé, dimanche, à la radio publique, que «Katsav est un criminel sexuel en série, qui bénéficie d'un traitement de faveur».
Eprouvé par un an de révélations scandaleuses, Moshe Katsav a bien tenté de se disculper. L’ex-président, et père de cinq enfants, a indiqué avoir accepté ce compromis «pour épargner des souffrances supplémentaires à (sa) famille». Mais les Israéliens dans leur grande majorité ne ressentent visiblement pas de pitié à l’égard de leur ancien chef d’Etat. Selon un dernier sondage, 69% des personnes interrogées affirment leur opposition au compromis entre le procureur et Moshe Katsav. 73% estiment que justice n'a pas été faite dans cette affaire.