par RFI (avec AFP)
Article publié le 09/08/2007 Dernière mise à jour le 09/08/2007 à 15:36 TU
Après plusieurs jours de débats, l’Assemblée nationale de Nouakchott a adopté mercredi soir, à l’unanimité, une loi criminalisant l’esclavage, une pratique qui perdure dans certaines régions du pays. L’abolition de l’esclavage avait déjà été votée en 1981 dans cette république islamique d’Afrique occidentale, mais le décret d’application n’avait jamais été adopté. Le nouveau texte, largement amendé par les députés, prévoit notamment des peines de cinq à dix ans de prison pour toute personne qui aurait encore des esclaves à son service.
La principale disposition de ce texte est d’assimiler l’esclavage à un crime, ce que demandaient depuis des années les militants des droits de l’homme. Outre les peines de prison ferme pour toute personne pratiquant encore l’esclavage, la nouvelle loi prévoit également des sanctions contre les autorités qui feraient preuve d’indifférence. En clair, un préfet, un gouverneur ou un agent de police qui ne donnerait pas suite aux affaires qui lui seraient confiées risque de deux à cinq ans de prison et une amende de plusieurs centaines d’euros.
Il s’agit là d’une avancée importante, car les autorités locales sont connues pour avoir souvent étouffé ou minimisé des cas d’esclavage. Autre progrès souligné par les associations de lutte contre l’esclavage : il n’est plus question de donner des compensations aux anciens maîtres qui affranchiraient leur esclave, comme c’était le cas dans la précédente loi de 1981.
«Le vrai problème c'est comment les représentants de la justice vont se comporter face à des cas concrets?»
Opération de sensibilisation
Le nouveau texte voté par les députés doit maintenant être examiné par les sénateurs et être promulgué par le chef de l’Etat. Le sucés de la loi dépendra, ensuite, de la sensibilisation qui sera menée dans les zones reculées du pays. C’est surtout là, dans les oasis et dans les pâturages, autour du bétail que les cas d’esclavage traditionnel sont le plus souvent signalés.
« Nous sommes très satisfaits, c'est une grande victoire pour les démocrates », a déclaré Boubacar Ould Messaoud, président de l'organisation SOS-Esclaves, qui a également félicite la volonté politique du président mauritanien Sidi Ould Cheikh Abdellahi, élu en mars dernier, qui avait réclamé le renforcement du « dispositif de lutte » contre l’esclavage.
Les députés mauritaniens ont recommandé au gouvernement d’entamer une vaste opération de sensibilisation des populations sur les dispositions de la loi et de définir une « politique économique complémentaire de nature à éradiquer les séquelles de l’esclavage ».
«Je pense que le consensus qu'on a eu à l'Assemblée correspond à un consensus dans la société. Maintenant est-ce qu'une loi votée va être appliquée par tout le monde ? je n'ai pas la naïveté de le croire.»