par Myriam Berber
Article publié le 10/08/2007 Dernière mise à jour le 10/08/2007 à 14:58 TU
Les craintes d’un krach immobilier aux Etats-Unis continuent d’inquiéter sérieusement les marchés financiers. Pour la deuxième journée consécutive, les places boursières mondiales étaient en recul vendredi. Face à ce qui ressemble de plus en plus à un effet domino, les autorités financières ont tenté de reprendre la main pour rassurer les acteurs du marché, en insufflant des liquidités dans le système financier. La Banque centrale européenne (BCE) a injecté, vendredi, 61,05 milliards d’euros dans le circuit monétaire de la zone euro. La veille, la BCE avait injecté un montant record de 94,8 milliards d’euros. Soit plus que le précédent record du 12 septembre 2001, au lendemain des attentats terroristes qui ont frappé New York et Washington. A l’époque, la BCE avait injecté 69,3 milliards d’euros. La Banque d’Angleterre et la Banque nationale suisse étaient également intervenues.
De l’autre côté de l’Atlantique, la Réserve fédérale américaine (Fed) est également passée à l’action, vendredi, avec une intervention de 19 milliards de dollars. La veille, elle avait déjà injecté 24 milliards de dollars, tout comme la Banque du Canada. La Fed a également annoncé qu’elle fournirait les liquidités nécessaires aux marchés pour faciliter leur fonctionnement. Signe que la volonté de toutes les banques centrales est à l’apaisement. Le secrétaire au Trésor américain Henry Paulson a estimé, mercredi soir, que « les répercussions de la crise de l'immobilier résidentiel allaient durer un certain temps, malgré la vigueur de l'économie. » Selon des informations du Wall Street Journal, le gendarme de la bourse américaine, la SEC, a décidé d’ouvrir une enquête sur les cinq plus grandes banques américaines afin d’évaluer leurs pertes potentielles liées à cette crise immobilière.
La crise des « subprimes »
L’annonce, dans la matinée de jeudi, par BNP-Paribas, le premier groupe bancaire français, d’une suspension de la valorisation de trois de ses fonds en raison de la crise du crédit immobilier à risques aux Etats-Unis a mis le feu aux poudres. C’est le troisième établissement français après AXA et Oddo la semaine dernière, contraint de geler des fonds du fait de la crise immobilière américaine. A l’origine de la tempête : la crainte d’un assèchement du crédit imputé toujours et encore aux « subprimes », les fameux crédits immobiliers à risques.
En cause, depuis l’an dernier, le ralentissement du marché de l’immobilier américain combiné à la hausse des taux d’intérêt, sur lesquels sont indexés les remboursements. Aujourd’hui, de nombreux ménages très modestes ne peuvent faire face à leurs traites, et les défauts de paiement se répercutent sur les entreprises spécialisées dans le refinancement hypothécaire. Mi-juillet, le président de la Réserve fédérale, Ben Bernanke, a reconnu que c'était le risque numéro un pour la croissance. Il a chiffré entre 50 et 100 milliards de dollars les pertes potentielles liées au « subprime ».
Les fonds spéculatifs (hedge funds) ont investi dans ces produits financiers à risques sont désormais, par ricochet, en difficulté. Ces firmes spécialisées plongent les unes après les autres. La semaine dernière, la maison de courtage Bear Stearns a annoncé que deux de ses « hedge funds » qui gèrent un portefeuille estimé à 20 milliards de dollars, ne valaient presque plus rien. Le numéro 10 du secteur, American Home Mortgage Investment, s’est placé en faillite, après avoir licencié la quasi-totalité de ses 7 000 employés. Son concurrent Accredited Home Lenders devrait également mettre la clé sous la porte.
Un effet domino sur le système financier
La faillite de ces fonds spéculatifs fait aujourd’hui craindre un effet domino sur l’ensemble du système financier via un assèchement des liquidités sur le marché des crédits et un coup de frein aux LBO ou « Leverage buy out », ces techniques de rachat d'entreprises en difficultés par un fonds d'investissement. Au vu de toutes ces difficultés, les investisseurs ont confirmé leur préférence pour des placements moins exposés aux risques de ralentissement. Résultat, les obligations d’Etat se sont envolées de manière spectaculaire.
Selon les spécialistes, l’heure n’est pas à la panique. La correction actuelle touche en priorité les instruments les plus risqués. Qui plus est, le moindre mouvement prend très vite de l’ampleur sur les marchés, en raison du faible nombre d’opérateurs. Reste qu’une étroite surveillance demeure nécessaire. Si d’autres institutions financières hors des Etats-Unis sont affectées par cette crise, cela signifie que peut-être la croissance économique mondiale - sur laquelle tout le monde se base pour minimiser l’impact de la crise actuelle - pourrait être remise en cause.