par Patrice Biancone
Article publié le 10/10/2007 Dernière mise à jour le 10/10/2007 à 15:35 TU
Fadela Amara, secrétaire d'Etat à la Ville, a provoqué la polémique au sein de la majorité en prenant position contre les tests ADN.
(Photo : AFP)
Nouveau couac. La secrétaire d'Etat à la Ville vient de condamner brutalement l'instrumentalisation des tests ADN, rappelant ainsi que la pratique de l'ouverture n'est pas un long fleuve tranquille. Fadela Amara a provoqué des réactions de colère au sein de la majorité, qui s'est sentie insultée, obligeant François Fillon à jouer les pompiers de service et Nicolas Sarkozy à prôner l'apaisement, depuis la lointaine Russie où il se trouve actuellement.
Le chef du gouvernement vient d'exprimer sa confiance à Fadela Amara pour le travail accompli, et pourtant, la démarche n'efface en rien le malaise provoqué par les déclarations de la secrétaire d'Etat à la Ville. Se prononçant sur les tests ADN contenus dans la loi sur l'immigration, Fadela Amara, secrétaire d’Etat d’ouverture, a expliqué qu'elle trouvait « dégueulasse » qu'on les instrumentalise à des fins politiques, provoquant l'ire de ses collègues ministres et de la plupart des élus de la majorité. Pour les uns, il s'agit d'une prise de position intempestive, alors que pour les autres il y a de l'insulte dans l'air envers ceux qui voté le fameux amendement Mariani, qui fait débat.
L'avis de malaise provoqué par la présence de personnalités de gauche au gouvernement n'est donc pas levé. Et c'est parce que le sujet est délicat que le vocabulaire choisi est important. A croire d'ailleurs que le dérapage sémantique, volontaire ou involontaire, est devenu une méthode politique, une façon en quelque sorte, de faire avancer ou reculer une idée.
En cause donc la politique d'ouverture et de rassemblement. Et d'autre part, la liberté de langage défendue par Nicolas Sarkozy, qui la pratique plus souvent qu'à son tour, et qui ne peut guère faire de remontrances sur la question. Cette liberté de parole est jugée acceptable à l'UMP, à condition toutefois qu'elle ne mette pas directement en cause ceux qui définissent et votent les lois, cela au nom de la solidarité. Finalement, pour la plupart des élus de la majorité, en l'absence d'une opposition de gauche construite et efficace, ce sont les ministres d'ouverture qui portent la contestation, Nicolas Sarkozy devant tout simplement faire face à une opposition interne, ce qui pousse certains à rappeler que selon le vieil adage chevènementiste, « un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne ».
Une confirmation
Le projet de loi de Brice Hortefeux sur l'immigration est donc devenu un sujet hypersensible. Le propos de Fadela Amara suit en effet d'autres propos condamnant les tests ADN, propos tenus à droite et à gauche, au principe que l’amendement Mariani pose un problème éthique qui transcende le simple aspect politique. Le malaise est d'ailleurs d'autant plus perceptible qu'aucun membre important du gouvernement ne sera aujourd'hui à l'inauguration de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration, de peur d'être chahuté.
Nicolas Sarkozy est en Russie. Brice Hortefeux en Espagne. François Fillon a officiellement un agenda trop chargé. Toutes excuses qui peuvent s'interpréter différemment suivant que l'on prend pour argent comptant ou non les affirmations de l'exécutif.
Quoi qu'il en soit, Nicolas Sarkozy aura cette fois-ci, du mal à expliquer à son propre camp que c'est « le mouvement qui crée la dynamique », tout comme il aura du mal à persuader qu'un dérapage verbal ou une déclaration intempestive a une durée de vie maximun d'une semaine, comme il aime à le dire. D'abord et avant tout, parce qu'avec les tests ADN, on touche à l'un des fondements de la cinquième République sans réelle concertation. Et que le sujet dépasse les traditionnels clivages politiques.
«La lecture précise du texte adopté répond très exactement aux préoccupations exprimées par Madame Amara.»