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Chine

De l’euro fort plutôt que du dollar

par Myriam Berber

Article publié le 09/11/2007 Dernière mise à jour le 09/11/2007 à 18:00 TU

La Chine dispose aujourd’hui de gigantesques réserves de changes, placées principalement en bons du Trésor américains. (Montage : RFI)

La Chine dispose aujourd’hui de gigantesques réserves de changes, placées principalement en bons du Trésor américains.
(Montage : RFI)

Banquier des Etats-Unis depuis plusieurs années déjà, la Chine pourrait désormais investir beaucoup plus en euros. Plusieurs responsables chinois ont évoqué ouvertement, cette semaine, l’intention de Pékin de réduire ses réserves de changes, en faveur de monnaies plus fortes que le dollar. Ces déclarations ont porté un nouveau coup au billet vert déjà affaibli par la crise du crédit immobilier à risque («subprimes »).

L’euro a marqué, cette semaine, un nouveau record contre le dollar américain.  Depuis son lancement en 1999, l'euro a atteint, vendredi 9 novembre 2007, son plus haut niveau face au dollar, à 1,4752. Depuis le début de l’année, le dollar a perdu plus de 10% de sa valeur contre l’euro et il a encore plongé, mercredi, sur les marchés financiers suite à aux propos du vice-président de l’Assemblée nationale populaire, le Parlement chinois. Selon Cheng Siwei, « la Chine devrait ajuster la composition de ses réserves en devises étrangères, en y accordant plus de place aux monnaies fortes, suggérant de privilégier l’euro au détriment du dollar ». Cette déclaration a provoqué une vente massive de dollars, faisant grimper l’euro par rapport au dollar, et par rapport au yuan.  

Dans la même veine, le président d'un groupe financier chinois, ancien haut responsable de la Commission de régulation bancaire cité, vendredi 9 novembre, par le China Securities Journal a aussi préconisé de réduire progressivement le poids du dollar dans les réserves de change du pays. « Il faut ajuster la structure des réserves de change et réduire la proportion de dollars », a déclaré Tang Shuangning, président du groupe Everbright, maison mère de la banque du même nom.

Les réserves les plus importantes de la planète

Rien d’inédit dans ces propos puisque il y un an, presque jour par jour, le gouverneur de la Banque centrale de Chine, Zhou Xiaochuan, a affirmé que l'institution financière souhaitait diversifier ces énormes réserves, faisant alors grimper l'euro face au dollar : de 1,275 dollar à 1,285. Très exposé aux Etats-Unis, les autorités chinoises veulent réduire cette exposition. Selon bon nombre d’experts, ils sont déjà passés à l’acte. Depuis deux ou trois ans, ils ont diversifié une partie de leurs réserves en euros (soit environ 20%).

Grâce à l'excédent de sa balance commerciale, la Chine dispose aujourd’hui de gigantesques réserves de changes, les premières au monde. Fin septembre 2007, elles se montaient à 1 430 milliards de dollars, placées principalement en bons du Trésor américains. La Chine est le deuxième créancier des Etats-Unis après le Japon. Quelque 200 milliards de dollars de ces réserves ont été confiés récemment à la nouvelle compagnie d’investissement de Chine, la China Investment Corp (CIC). 

Le yuan, le principal point de friction

Avant même d'être formellement mise sur pied, cette société publique a pris, en mai 2007, une participation de 9,7% dans l'un des plus grands fonds d'investissement au monde, l'américain Blackstone, qui possède des actifs représentant plus de 30 milliards de dollars. Pour nombre d'observateurs, cette opération pourrait être le point de départ d’une vague d’investissements à l’étranger et notamment dans des actifs plus rémunérateurs, mais aussi plus risqués. Le ministre chinois des Finances a, en effet, indiqué que pour la CIC, un de ses modèles serait la holding de l’Etat singapourien Temasek Honding, qui a investi dans les actifs les plus divers, financiers comme industriels, aussi bien à Singapour qu’à l’étranger.

Reste que la valeur du yuan demeure le principal point de friction dans les relations économiques entre la Chine et les pays occidentaux. Ces derniers, Etats-Unis en tête, accusent Pékin de maintenir leur monnaie nationale à un niveau artificiellement bas, pour favoriser les exportations chinoises. Les économistes estiment que le yuan est sous-évalué de 40% face au dollar, ce qui revient, selon eux, à subventionner illégalement les produits chinois à l'étranger. Pour calmer le jeu, la Banque centrale chinoise a engagé, cette année, toute une série d’actions : élargissement de la marge de fluctuation du yuan de 0,3% à 0,5% et relèvement des taux d’intérêt. Mieux encore, le président chinois Hu Jintao s’est engagé, lors du 17e Congrès du Parti communiste chinois en octobre 2007, à ce le Yuan devienne progressivement une monnaie pleinement convertible. Une nouvelle qui devrait fortement intéresser les Américains et les Européens.