Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Pétrole

Sommet de l’Opep : le statu quo

par Myriam Berber

Article publié le 15/11/2007 Dernière mise à jour le 15/11/2007 à 17:32 TU

Extraction de pétrole au Nigeria. (Photo: AFP)

Extraction de pétrole au Nigeria.
(Photo: AFP)

Dans un climat d’extrême tension sur les prix du pétrole, Ryad, en Arabie Saoudite, accueille, les 17 et 18 novembre 2007, le troisième sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Au centre des discussions : le niveau de production de pétrole, et une question : faut-il ou non ouvrir les vannes ?

La capitale saoudienne déroule son tapis rouge pour les chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres de l’Opep pour évoquer la flambée du prix du pétrole et tenter d’y remédier. Les cours de l’or noir sont en effet très volatils. Après avoir approché la semaine dernière le cap symbolique des 100 dollars, ils ont perdu plus de sept dollars pour remonter à nouveau mercredi en raison d’inquiétudes sur les stocks de pétrole américains. Ils oscillaient jeudi à New York autour de 94 dollars.

Offre insuffisante des pays exportateurs par rapport à une demande mondiale toujours en augmentation ou spéculation effrénée : producteurs et consommateurs se renvoient la responsabilité de la flambée des prix de l’or noir. Pour les grands consommateurs comme les Etats-Unis, l’Opep, qui assure environ 40% de la production mondiale, devrait augmenter sa production face aux besoins des grandes économies industrialisées et celles des pays émergents comme la Chine et l'Inde. Du côté de l’Opep, on estime que les stocks de brut des pays industrialisés sont supérieurs à leur moyenne des cinq dernières années.

Dans son rapport mensuel publié jeudi 15 novembre, l’Opep renvoie la responsabilité de l’envolée de l’or noir aux spéculateurs, aux problèmes géopolitiques du Proche-Orient et aux fluctuations du dollar. Les prix mondiaux du pétrole sont libellés en dollar et la monnaie américaine n'a cessé de reculer ces derniers mois face aux autres principales devises mondiales. Le cartel met aussi en exergue les capacités de raffinage insuffisantes de plusieurs pays industrialisés dont les Etats-Unis. Il conclut à une estimation en baisse de 30 000 barils par jour de la demande de brut pour 2008. Une baisse de la demande qui pourrait justifier le statu quo.

Un marché suffisamment approvisionné

Lors des réunions préparatoires de ce sommet, les positions se sont fait divergentes. Plusieurs pays de l’Opep ont réaffirmé ces derniers jours qu'il ne fallait pas attendre du sommet de Ryad une décision sur une éventuelle augmentation de la production, d'autres se sont montrés plus ouverts. Le deuxième pays exportateur de pétrole de l’Opep, l’Iran, estime ainsi qu’il y a suffisamment de pétrole sur le marché. « Tout indique qu'une hausse de production n'aurait pas d'impact sur le prix mondial du pétrole », a ainsi déclaré le ministre iranien du Pétrole Gholam Hossein Nozari. Les craintes d’une pénurie sont également sans fondement pour le ministre saoudien du Pétrole et des Ressources minérales, Ali al-Nouaïmi.

Mais le ministre koweïtien du Pétrole par intérim, Mohammad al-Olaim, a indiqué que le cartel pourrait considérer une hausse de production lors de sa prochaine réunion ministérielle à Abou Dhabi le 5 décembre. « Nous allons passer en revue les chiffres (du marché) et s'ils démontrent que nous devrions augmenter, nous sommes prêts à le faire (...). S'ils disent non, alors il n'y aura pas de hausse », a déclaré le ministre à Ryad. Un message réitéré par son homologue indonésien, Purnomo Yusgiantoro, qui a rappelé que le cartel avait déjà augmenté ses livraisons. Le 1er novembre, la production a été augmentée d’un demi-million de barils par jour, à 31,2 millions de barils quotidien.

Un marché dans la surenchère

Mais pour bon nombre d’analystes, le marché pétrolier peine à trouver son équilibre, que l’Opep ouvre ou pas ses vannes.  « Si l’Opep augmentait sa production, les prix ne baisseraient pas forcément », estime ainsi Thierry Lefrançois, économiste des matières premières chez Natixis. Et d’ajouter : « Nous avons un marché qui est dans la surenchère, qui parie sur le moment où on va franchir les 100 dollars, et il n’y a pas de changements fondamentaux par rapport à il y a quelques mois, quand on était à 70 dollars le baril ».

Un avis partagé par Pierre Terzian, de la revue Pétrostratégies, pour qui le marché est totalement dominé par les financiers. Selon Pierre Terzian, « le risque de pénurie ne peut justifier les prix actuels car la capacité de production non-utilisée de l’Opep était en 2005 de seulement 0,5 million de barils par jour, et qu’elle est aujourd’hui de 3,5 millions, soit sept fois plus alors que les prix ont doublé ». Hormis la spéculation sur les marchés financiers, d’autres raisons sont à l’origine de cette flambée de l’or noir et notamment un environnement géopolitique instable dans la plupart des régions de production. Les tensions à la frontière turco-irakienne, au Nigeria ou encore entre l’Iran et la communauté internationale à propos du programme nucléaire de Téhéran, font craindre une réduction de l’offre sur les marchés.