Article publié le 04/01/2008 Dernière mise à jour le 05/01/2008 à 04:30 TU
Avec notre correspondante à Atlanta, Anne Toulouse
La soirée du 3 janvier a dégagé deux grands vainqueurs: Barack Obama chez les démocrates et Mike Huckabee chez les républicains. Elle a également infligé un sérieux revers à Hillary Clinton et Mitt Romney. Deux candidats démocrates, Christopher Dodd et Joseph Biden, ont tiré les conséquences de leurs piètres résultats et abandonné la course.
Les caucus de l'Iowa ne sont que la première étape d'un processus de sélection qui devrait durer au moins encore un mois, mais même si la course reste remarquablement ouverte, elle a permis de mettre en évidence les forces et les faiblesses des candidats qui restent en lice.
Deux victoires aux conséquences inégales
Barack Obama et Mike Huckabee ont l'un et l'autre remporté une victoire nette, avec près de 9 points d'avance sur leurs seconds respectifs. L’un et l’autre ont suscité de l’enthousiasme, et reçu la majorité des suffrages de ceux qui ont participé pour la première fois aux caucus. Leur score est inattendu, et leurs performances personnelles sont impressionnantes ; mais elles n'auront vraisemblablement pas les mêmes conséquences.
Barack Obama est, en effet, sorti de la soirée avec un avantage dont Mike Huckabee ne peut pas, pour l’instant, se prévaloir : ce que l'on appelle « l'électabilité », autrement dit la capacité à remporter la victoire finale. Il est le premier candidat noir vainqueur dans l'Iowa, un Etat blanc à 95%. Il a remporté le vote des femmes, qui était considéré comme l'atout principal de sa rivale Hillary Clinton. Il a également bénéficié du vote des jeunes et de celui des deux extrêmes de l'échelle sociale, les plus pauvres et les plus riches. Enfin, et surtout, il est apparu comme le candidat le plus rassembleur.
Les caucus démocrates se déroulent en deux temps. Lorsque les partisans d'un candidat représentent moins de 15% de la totalité du groupe, ils doivent reporter leur vote sur un autre candidat dit « viable ». Or c'est au moment de ce deuxième tour que le score de Barack Obama a décollé, ce qui veut dire qu'il représente le meilleur dénominateur commun pour les démocrates, du moins ceux de l'Iowa ; mais ce scénario peut se reproduire ailleurs.
En revanche, la victoire de Mike Huckabee semble davantage liée à la spécificité de l’Iowa, où les chrétiens évangéliques représentent environ la moitié des électeurs républicains. Ils se sont déplacés en force pour apporter leurs voix à ce pasteur baptiste.
La prochaine compétition se déroulera dans le New Hampshire, un Etat dans lequel le facteur religieux est beaucoup moins important. L'Iowa a néanmoins donné à Mike Huckabee une énorme bouffée d’oxygène. Sa campagne, qui bénéficiait de très peu de moyens, va voir affluer l'argent, ce qui lui permettra de tenter sa chance dans le reste de la course. Il a également fait preuve de qualités stratégiques : il s'est démarqué de l’actuel gouvernement républicain en qualifiant sa politique étrangère « d'arrogante », et a subtilement envoyé dans le mur son concurrent Mitt Romney en refusant d’entrer dans le jeu d’une politique de dénigrement.
Les perdants de la soirée
Pour le républicain Mitt Romney, l’Iowa est un pari perdu. Il avait fait de cet Etat le fer de lance de sa campagne, en y engloutissant des millions de dollars. Les commentateurs n’ont pas manqué de souligner qu’il est la preuve vivante qu’une élection ne s’achète pas ! Mitt Romney, qui pense avoir été victime de préjugés en Iowa, en raison de son appartenance à la religion mormone, peut espérer se rattraper dans le New Hampshire. Il a été le gouverneur de l’Etat voisin du Massachusetts, ce qui lui donne un avantage régional. Il a surtout les moyens de rester aussi longtemps qu'il le souhaitera dans la compétition, en puisant dans son immense fortune personnelle.
Le démocrate John Edwards avait lui aussi misé son avenir présidentiel sur l’Iowa, un Etat où il était arrivé second en 2004, derrière John Kerry dont il est devenu le colistier. Immédiatement après leur défaite en 2005, il a recommencé à faire campagne dans l’Iowa. Ces trois années d’efforts ne lui ont pas permis de s’imposer comme l’alternative à Hillary Clinton.
La troisième place d'Hillary Clinton est une humiliation. Elle peut s’en consoler en se souvenant que son mari n’a remporté ni les caucus de l’Iowa, ni les primaires du New Hampshire. D’ailleurs, une partie de son entourage lui avait même conseillé de ne pas faire campagne dans l’Iowa. Le problème est qu’elle l’a fait, et que le résultat comporte pour elle des éléments inquiétants. Elle n’a pas réussi à inverser une image peu avenante, et n’a pas compensé ce déficit par un message fort. Elle dispose néanmoins encore d’une confortable avance dans les sondages nationaux et de la formidable machine de guerre électorale des Clinton.
Les outsiders
Le favori républicain des sondages nationaux, Rudolph Giuliani, a recueilli un score squelettique dans l’Iowa, ayant passé cet Etat par pertes et profits. Il pensait, sans doute à juste titre, que son profil centriste serait un trop lourd handicap dans un Etat conservateur. Il fait porter tous ses efforts sur la Floride, qui votera le 29 janvier et sur la grande compétition du 5 février, où une vingtaine d’Etats voteront simultanément. C’est un pari risqué, car d’ici là, la compétition républicaine peut avoir pris forme sans lui.
Le grand bénéficiaire inattendu de la soirée du 3 janvier est John McCain, non pas tant pour son score personnel, qui est modeste, mais grâce à la défaite de Mitt Romney, avec qui il est au coude à coude dans le New Hampshire. John McCain, dont tout le monde donnait la candidature pour morte il y a quelques semaines, pourrait recueillir les fruits de l’affrontement entre Mitt Romney et Mike Huckabee, et de l’absence de Rudolph Giuliani.
« En cette nuit de janvier, à ce moment clé de l'histoire, vous avez fait ce que l'Amérique peut faire au cours de cette nouvelle année 2008. »
04/01/2008 par CNN
« Je serai éternellement reconnaissant envers ceux qui ont voté pour moi et également ceux qui n'ont pas voté pour moi mais qui m'ont toujours respecté. »
04/01/2008 par CNN