par Piotr Moszynski
Article publié le 16/01/2008 Dernière mise à jour le 17/01/2008 à 01:21 TU
(De g. à d. et de haut en bas) Mikhaïl Kassianov, Dimitri Medvedev, Guennadi Ziouganov et Vladimir Jirinovsky.
(Photos : AFP)
Le dernier à avoir déposé son dossier à la Commission électorale était aussi le dernier représentant de l’opposition extraparlementaire russe restant encore en lice pour la présidentielle du 2 mars 2008. Il s’agit de l’ancien Premier ministre de Vladimir Poutine des années 2000-2004, Mikhaïl Kassianov. Les autres candidats de l’opposition se sont retirés d’eux-mêmes (comme Garry Kasparov et Boris Nemtsov) ou leurs candidatures ont été rejetées (comme celle de l’ex-dissident soviétique Vladimir Boukovski). Par ailleurs, l’opposition n’est jamais parvenue à présenter une candidature unique, capable de réunir ses forces.
Crédité d’à peine 1% des intentions de vote dans le dernier sondage de l’institut indépendant Levada, Mikhaïl Kassianov aura donc la lourde tâche d’attirer l’attention de l’opinion publique sur les erreurs et les manquements du pouvoir en place et de son principal candidat, l’actuel premier vice-Premier ministre Dmitri Medvedev – sans oublier de présenter son propre programme.
Kassianov fait partie du courant libéral. Son diagnostic de la situation de la Russie est simple : « le pouvoir dans ce pays repose sur des mensonges et est soutenu par les services spéciaux et la bureaucratie ». Pas étonnant donc de voir la défense de la société civile parmi ses principales priorités politiques. Dans le domaine économique, il promet de se concentrer surtout sur la lutte contre l’inflation. En 2007, elle a atteint 12% et constitue un vrai problème pour la population. Cependant, personne ne se fait d’illusion quant aux chances d’une percée de Mikhaïl Kassianov à l'élection présidentielle.
Question de moyens
Ne bénéficiant du soutien d’aucun parti représenté au Parlement, l’ex-Premier ministre a dû, conformément à la loi, justifier sa candidature par au moins deux millions de signatures collectées à travers la Russie. Il en a réuni finalement 2,2 millions. Défi déjà difficile en soi, cet exploit n’a pas été facilité par l’attitude des médias russes. Contrôlés en grande majorité par le Kremlin, ils offrent un accès très limité aux formations de l’opposition. On entend souvent dire que l’opposition russe n’est pas capable de capter l’attention des électeurs et de gagner leur soutien. C’est vrai. Seulement, pour pouvoir le faire, il faut en avoir les moyens et la possibilité de jouer à armes égales avec les adversaires, ce qui n’est manifestement pas le cas.
La grande vedette des élections du 2 mars est le candidat du parti Russie unie soutenu par Vladimir Poutine lui-même, Dmitri Medvedev, pratiquement assuré d’une large victoire. Son principal argument électoral, c’est évidemment la continuation de la politique de son illustre prédécesseur, qui risque d’ailleurs fort de devenir son Premier ministre et d’exercer toujours le pouvoir réel. Cet argument a une force considérable. Pour un Russe moyen, la rupture avec le désordre des années Eltsine, l’amélioration de la vie quotidienne et le retour du pays au statut d’une puissance qui compte au moins à l’échelle eurasiatique et dans le domaine énergétique constituent des progrès très importants. Fort de ces avancées, Medvedev n’a, en plus, aucun souci à se faire quant à l’accès aux médias, et encore moins quant au financement de sa campagne.
Qui veut gagner des millions ?
Au 10 janvier, selon les données officielles, 43,2 millions de roubles (environ 1,2 millions d’euros) de subventions électorales ont été versés sur les comptes électoraux des cinq candidats. 70% de cette somme a été encaissé par deux candidats : Dmitri Medvedev (15,235 millions de roubles) et le nationaliste populiste Vladimir Jirinovski (15 millions). Les deux gardent toujours ces sommes intactes pour la phase décisive de la campagne. Mikhaïl Kassianov a reçu 7,45 millions de roubles et en a déjà dépensé plus de la moitié : 4,5 millions. Le communiste Guennadi Ziouganov s’est vu doté de 4,66 millions de roubles (dont il a déjà dépensé 759 000) et le candidat du Parti démocrate, Andreï Bogdanov, de 850 000 roubles, dont il lui reste seulement 39 000. Ainsi, il n’est pas difficile de prévoir qui sera le plus visible dans la phase finale de la campagne, surtout si l’on songe à qui va l’essentiel du soutien financier des sources privées qui savent pertinemment, comme tout le monde, qui sera le prochain chef de l’Etat.