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Serbie/UE

Un mini-accord au contenu flou

par Heike Schmidt

Article publié le 29/01/2008 Dernière mise à jour le 30/01/2008 à 22:15 TU

Javier Solana, chef de la diplomatie européenne, félicite le ministre des Affaires étrangères serbe, Jeremic, lors de la conférence à Bruxelles.(Photo: Reuters)

Javier Solana, chef de la diplomatie européenne, félicite le ministre des Affaires étrangères serbe, Jeremic, lors de la conférence à Bruxelles.
(Photo: Reuters)

Avec un mini-accord politique, les Vingt-Sept n’ont qu’entre-ouvert la porte d’entrée de l’Union européenne à la Serbie. Mais même si le message venu de Bruxelles reste timide, l’actuel président Boris Tadic veut le capitaliser afin de remporter le deuxième tour de l’élection présidentielle dimanche 3 février. L’entourage de M. Tadic parle d’une « percée » qui aidera à la victoire des pro-européens.

Certes, le camp pro-européen de Boris Tadic n’a pas reçu le signal fort qu’il espérait de l’Union européenne. Handicapé par un veto néerlandais, les Vingt-Sept ont proposé la signature d’un simple « accord politique de coopération » le 7 février, quatre jours après le scrutin. Pour l’instant, il n’est plus question d’un accord de stabilisation et d’association qui pourrait former la première étape vers une adhésion à l’Union. La seule avancée que Bruxelles accorde à Belgrade, c’est d’instaurer « un cadre pour progresser en matière de dialogue politique, de libre-échange, de libéralisation des visas et de coopération dans l’éducation ». Il est vrai qu’il s’agit du premier accord formel entre l’UE et la Serbie, mais son contenu reste flou et reste essentiellement commercial.

L’élection de dimanche sera un « référendum pour ou contre l’Europe »

Belgrade se veut toutefois optimiste : « Avec cet accord, les portes de l’Union européenne sont ouvertes à la Serbie», a dit le ministre serbe des Affaires étrangères, Vuk Jeremic, à Bruxelles. Il s’est montré  « très content » de l’offre de coopération en estimant qu’elle peut transformer l’élection de ce dimanche en « référendum » pour ou contre l’Europe. A ses yeux, les Serbes ont désormais la chance de décider s’ils veulent franchir ses portes tout en se montrant convaincu qu’ils le feront.

Rien n’est plus incertain. Au premier tour, le 20 janvier, les Serbes ont voté majoritairement pour l’ultranationaliste Tomislav Nikolic. Clairement anti-européen, M. Nikolic est allé jusqu'à dire que la Serbie ferait mieux de devenir « une province russe » plutôt que d’ancrer son pays dans l’Union européenne. D’ailleurs, il n’a jamais caché son ambition de se ranger du côté de la Russie en cas de victoire.

Est-ce que l’accord au rabais que l’Union européenne propose à la Serbie pourrait apporter de l’eau au moulin des nationalistes? Faute d’une proposition de coopération crédible de la part des Européens, les Serbes pourraient en tout cas être tentés par l’opération de charme que la Russie a lancée, non seulement à travers des promesses d’investissements mais aussi à travers son opposition ferme à l’indépendance du Kosovo.

L’accord proposé reste en dessous des attentes du camp pro-européen

Pour barrer la route aux nationalistes, Boris Tadic et avec lui les forces politiques modérées en Serbie, comptaient sans doute sur un appui sans faille de Bruxelles. En offrant une véritable perspective européenne, le candidat espérait renforcer sa position vis-à-vis de son rival Tomislav Nikolic. Mais l’accord proposé reste en dessous des attentes du camp pro-occidental, même si à la veille du deuxième tour, crucial pour le pays, personne ne veut parler ouvertement d’une déception.

Les Vingt-Sept n’ont pas été d’accord sur la marche à suivre. Tandis que 26 pays étaient prêts à ouvrir la voie vers une adhésion à la Serbie, les Pays-Bas ont opposé leur veto. Tant que Belgrade n’aura pas livré le criminel de guerre présumé, Ratko Mladic, au tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie à La Haye, les Néerlandais refusent de faire sauter le dernier verrou du rapprochement avec la Serbie. Pendant longtemps, cette condition de pleine coopération avec le tribunal de La Haye a été la position commune de tous les 27 pays membre de l’UE, mais 26 d’entre eux, inquiets d’une possible défaite du pro-européen Boris Tadic contre le nationaliste Tomislav Nikolic, l’ont abandonnée.

Hormis les Pays-Bas, les partenaires européens se sont attachés à louer les bienfaits de l’accord auquel ils sont péniblement parvenus. « Nous avons adopté un texte très intéressant qui ouvre les portes à l’entrée de la Serbie dans l’UE », a assuré le ministre slovène des Affaires étrangères, Dimitrij Rupel, dont le pays préside l’Union européenne. Pour le diplomate en chef des Vingt-Sept, Javier Solana, « c’est un signal positif à destination du peuple serbe ».

Reste à savoir si ce signal sera entendu par les citoyens serbes, appelés à voter ce dimanche.

A écouter

Ivan Ivic

Ancien ministre fédéral serbe de l'Education

Tous les deux ont changé leurs discours lors de la propagande électorale, l'un et l'autre parlent de l'Europe et de la Russie.

29/01/2008 par Patrick Adam