Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Campagne présidentielle américaine

Pour comprendre le «Super Tuesday»

Article publié le 04/02/2008 Dernière mise à jour le 04/02/2008 à 17:09 TU

(Photo : montage RFI)

(Photo : montage RFI)

Mardi 5 février, dans 24 Etats américains, les électeurs vont voter pour la sélection des candidats républicains ou démocrates à l’élection présidentielle. Cette journée s’appelle le Super Tuesday, un exercice qu’il ne faut pas aborder sans quelques points de repère.

De notre correspondante à Atlanta, Anne Toulouse

L’expression Super Tuesday, remonte à 1988, lorsque les démocrates de 8 Etats du sud des Etats-Unis ont décidé de tenir leurs élections primaires le même jour du mois de mars. Il s’agissait de contrebalancer l’influence des Etats du nord, qui ouvrent la compétition avec l’Iowa et le New Hampshire, deux Etats jugés peu représentatifs.

D’élection en élection, le Super Tuesday s’est élargi au centre, puis à l’ensemble des Etats-Unis. En 2000, 16 Etats ont voté le 1er mars. En 2004, ils n’étaient plus que 10, car 7 autres Etats les avaient pris de vitesse en organisant, le 3 février, ce que l’on a appelé un Mini Super Tuesday.

Cette année le vrai Super Tuesday a suivi le glissement général du calendrier électoral. Pour la première fois il a lieu en février et avec un nombre record d’Etats. Cela lui a valu le surnom de Duper Super Tuesday, c'est-à-dire le « Double Super Tuesday », ou Tsunami Tuesday. Cette bousculade dans les premières semaines des primaires s’appelle le Front-loading, littéralement « charger à l’avant ».

(Carte : Latifa Mouaoued/RFI)

(Carte : Latifa Mouaoued/RFI)

Jusque dans les années soixante le calendrier des primaires pouvait confortablement s’étaler jusqu’au mois de juin. Avec l’accélération du processus de sélection, les Etats qui votent à partir du mois d’avril sont virtuellement privés de leur poids dans le choix des candidats. Lors des deux dernières élections présidentielles, le candidat était assuré de l’investiture dès le début du mois de mars.

Les délégués

A partir du Super Tuesday, la course ne se concentre plus sur les Etats à remporter, mais sur le nombre de délégués qu’ils rapportent. L’investiture va, en effet, au candidat qui recueille la moitié des délégués de son parti, plus un : soit 2 025 chez les démocrates et 1 191 chez les républicains. Comme lors de l’élection générale, il s’agit d’un scrutin indirect. Ce sont les délégués qui éliront véritablement le candidat lors de la convention du parti.

Les délégués sont de deux natures. Les délégués ordinaires sont désignés par la branche locale de leur parti, ils sont l’émanation du vote populaire. On les appelle pledged, en quelque sorte « assermentés », car ils doivent respecter leur mandat. Certains Etats, comme la Pennsylvanie, ont des délégués unpledged qui, théoriquement, sont libres de leur vote, mais il est très rare qu’un délégué ordinaire ne respecte pas le vote populaire. Le parti républicain a désigné 123 délégués non-assermentés, qui représenteront l’appareil du parti à la convention.

Après sa convention de 1968, qui s’était déroulée dans le chaos, le parti démocrate a mis en place un dispositif permettant de contrôler relativement l’investiture. Il désigne 842  « super-délégués », qui siègent à la convention. Ce sont des membres du parti, les élus des deux chambres du Congrès, les gouverneurs, les ex-présidents et ex-vice-présidents, à condition, bien sûr, qu’ils soient démocrates. C’est ainsi que Bill Clinton aura une voix à la prochaine convention ! Ces « super-délégués » ne sont tenus à aucune discipline de vote. Chaque candidat les courtise assidûment, mais ils peuvent changer d’avis jusqu’au moment de voter. Cette pratique est très contestée, car avec 20% des voix, les « super-délégués » peuvent faire basculer la désignation d’un candidat.

Le déroulement du vote

Dire que le fonctionnement du Super Tuesday est compliqué est un euphémisme. Prenons d’abord les Etats qui y participent : on dit par commodité qu’il y en a une vingtaine, mais en réalité il y en a 21 chez les républicains et 22 chez les démocrates. Comme ils ne se recoupent pas tout à fait, cela fait 24 en tout !

Chaque Etat et chaque parti ont leurs règles propres, fréquemment elles diffèrent d’un parti à l’autre, dans le même Etat.

La plupart des scrutins sont des primaires, c'est-à-dire des élections à bulletin secret, mais il a aussi des caucus, qui sont des assemblées délibératives. Les unes et les autres désignent les délégués qui eux mêmes éliront le candidat à la convention. C’est un principe semblable à celui de l’élection générale, mais les délégués ne sont pas les mêmes. Il y en a deux fois plus chez les démocrates que chez les républicains.

Les découpages ne sont pas les mêmes, non plus, pour les deux partis, et les Etats n’ont pas le même poids. Si la Californie et l’Etat de New York sont les plus riches en délégués dans les deux camps, c’est la Géorgie qui vient en troisième position chez les républicains, et l’Illinois chez les démocrates.

Les délégués sont attribués selon des méthodes variables et horriblement compliquées. Dans 12 Etats, les républicains appliquent le système dit Winner-Take-All, qui veut que celui qui a la majorité remporte tous les délégués. Selon les endroits, ce principe s’applique au niveau de l’Etat tout entier ou de chaque circonscription. Les démocrates pratiquent dans tous les Etats une forme de proportionnelle pondérée par diverses règles.

Les scrutins sont dits « fermés » lorsque seuls les électeurs ayant déclaré leur affiliation au parti peuvent y participer. Ils sont « ouverts » lorsque les électeurs indépendants ont le droit de voter. Il y a enfin les Blanket primaries, littéralement les « primaires-couvertures », qui permettent à n’importe qui de voter dans n’importe quel parti, à condition de ne pas voter deux fois !