par Artan Pernaska
Article publié le 20/02/2008 Dernière mise à jour le 21/02/2008 à 11:15 TU
Une nouvelle génération dans la rue
Une nouvelle jeunesse belgradoise est sortie dans les rues dès dimanche, cette fois-ci pour s’opposer à la venue sur la scène internationale d’un nouvel Etat que Belgrade persiste à considérer comme territoire faisant partie intégrante de la Serbie. Près d’une décennie plus tôt, c’était pour évincer du pouvoir un Milosevic en fin de règne que la jeunesse manifestait.
L’arrivée dans les rues du pays de cette nouvelle génération estudiantine et n’ayant pas servi sous les drapeaux, déroute. Pour cause, il y a quelques mois, l’enjeu de l’indépendance du Kosovo ne lui paraissait pas de première importance. On se serait même attendu à trouver, dans un premier temps, en pointe de la contestation des générations antérieures plus expérimentées dans les crises qui ont conduit à l’éclatement de l’ex-Yougoslavie.
Pour la manifestation de ce jeudi, les autorités de Belgrade ont souhaité la plus grande participation possible, visant un rassemblement historique. Des partis politiques, tels le Parti radical Serbe de Tomislav Nikolic, ont offert les transports de toute ville serbe vers Belgrade. Des appels à la manifestation fusent. Pour exemple : ils ont étés lancés aussi bien par l’Association des étudiants belgradois que par le ministère de l’Education.
Pourtant, quelques heures avant la manifestation de jeudi, sur le site internet de B92 (média serbe indépendant) une majorité de participants à un sondage en ligne pensait que la déclaration d’indépendance pourrait stabiliser la région.
Lors d’un sondage précédent, ils avaient été encore plus nombreux à envisager comme le scénario le plus probable, celui d’une indépendance reconnue par les Etats-Unis et l’Union Européenne.
Protestations des Serbes du Kosovo
Tous les jours depuis la création du nouvel Etat, des protestations prenant diverses formes ont aussi eu lieu au Kosovo. Après l’explosion de quelques grenades visant des bâtiments de la MINUK et diverses manifestations dans la partie serbe de la ville de Mitrovica, le maire albanais de la commune a estimé que « tant qu’elles ne véhiculent pas de violence, les protestations des Serbes du Kosovo sont un moyen d’expression démocratique ».
La mise à feu de deux postes-frontières entre le Kosovo et la Serbie a conduit la KFOR à fermer temporairement ces postes. Tandis que la KFOR accuse les leaders serbes locaux de l’organisation de ces faits, ce qu’ils démentent, Slobodan Samardzic, ministre serbe pour le Kosovo au sein du gouvernement de Belgrade, a estimé que ces incidents « peuvent être désagréables mais légitimes ».
Une « guerre » diplomatique
Soufflant le chaud et le froid, Belgrade appelle par ailleurs partout à la retenue, tout en maintenant sa fermeté sur le dossier du Kosovo.
Sur la scène diplomatique, après l’annonce dimanche par le Premier ministre Kostunica du rappel des ambassadeurs de Serbie des pays qui reconnaissent l’indépendance du Kosovo, Belgrade annonce aujourd’hui que ces rappels se font pour consultations et n’affiche plus de mesure de rétorsion diplomatique comme cela avait été envisagé et affiché dans un premier temps. Les Etats-Unis et la France ont annoncé qu’elles ne riposteraient pas et ne retireraient pas leurs ambassadeurs de Serbie.
Une série de mesures économiques à l’encontre du Kosovo, avait été envisagée par la Serbie au cas où les Kosovars proclameraient leur indépendance. Après l’ « annulation » de l’indépendance du Kosovo par le Parlement de Belgrade, leur mise en place n’a pas encore été décrétée.
Le problème du Kosovo est pour l’instant « un problème politique et non un problème militaire », déclarait ce mercredi, le ministre-adjoint serbe de la Défense, Dusan Spasojevic, contredisant la thèse de « la guerre comme moyen juridique » qui avait fait surface au cours des derniers mois de 2007 à Belgrade.
La voix des petits partis serbes appelant à l’orientation « sans réserve » de la Serbie vers l’Union européenne tout en acceptant l’indépendance du Kosovo ne se fait pas entendre dans un climat rendu électrique par la déclaration de l’indépendance. Lors des dernières élections présidentielles serbes, Cedomir Jovanovic, portait la voix de ceux qui envisagent favorablement l’indépendance du Kosovo au sein de la société serbe.
Si la création du nouvel Etat oppose aujourd’hui la Serbie à l’Union européenne, et si Vuk Jeremic, chef de la diplomatie serbe estimait mercredi devant le Parlement européen, que le rapprochement est « compromis » à cause de la position prise par quelques pays de l’Union à l’égard du Kosovo - Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, a estimé dimanche, quelques heures seulement après la création du nouvel Etat, « que Serbes et Kosovars se rejoindraient de nouveau au sein de l’Union européenne » et a refusé de prêter à l’indépendance du Kosovo des airs de « tragédie ».
« La Serbie regrette vivement la série de récentes décisions unilatérales et celles qui seront prises dans les prochains jours ou semaines. »
20/02/2008 par François Cardona