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Russie/Serbie

Medvedev réitère le soutien de Moscou à la Serbie

par Artan Pernaska

Article publié le 25/02/2008 Dernière mise à jour le 25/02/2008 à 20:46 TU

Le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev (au fond au centre) et le Premier ministre serbe, Vojislav Kostunica (au fond à droite) à Belgrade.(Photo : AFP)

Le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev (au fond au centre) et le Premier ministre serbe, Vojislav Kostunica (au fond à droite) à Belgrade.
(Photo : AFP)

Le dossier de l’indépendance du Kosovo est hautement important pour Moscou. Au cours des dernières années, il permit à la Russie un retour en force sur la scène internationale. Tant que l’indépendance n’était pas encore sur les rails, l’influence de Moscou était d’une importance capitale dans la résolution du problème du Kosovo. La communauté internationale attendait un aval de Moscou pour se prononcer de manière unanime à travers le Conseil de sécurité. Cet aval ayant été refusé, le Kosovo a décrété son indépendance et Moscou doit désormais mesurer jusqu’où elle veut aller.

Les réactions de Moscou après la déclaration de l’indépendance

Lors des rencontres de ce lundi, hauts responsables serbes et russes ont examiné « les mesures à prendre dans les jours à venir » à l’encontre de l’indépendance du Kosovo. L’attitude récente de la Russie a été celle d’une solidarité sans faille à la Serbie, qui persiste à considérer le Kosovo devenu indépendant comme territoire serbe au sein de la Serbie.

Le 17 février 2008, la Serbie et la Russie ont demandé une session extraordinaire du Conseil de sécurité de l’ONU qui eut lieu le jour même et le lendemain de la proclamation de l’indépendance et se termina sur un constat de division de l’opinion internationale, sans donner raison à la Russie ou à la Serbie.

Moscou demanda également à l’ONU et aux missions de l’OTAN et de l’UE sur place d’« annuler » l’indépendance du Kosovo, mais elle ne fut point entendue.

Le représentant de la Russie auprès de l’OTAN avait menacé vendredi d’un recours à la force. Que la traduction ait exprimé ou exagéré la pensée de l’auteur, Dimitri Rogozine est revenu sur ses propos et a assuré dimanche que Moscou n’avait pas l’intention d’intervenir militairement.

Question de fond ou question de méthode ?

La Russie qui annonçait avant la proclamation de l’indépendance qu’elle avait préparé une série de mesures de rétorsion et qui déclarait par la voix de son président que cette indépendance était « immorale et illégale », ne s’est pas vraiment prononcée sur le fond. Moscou a centré ses critiques sur le processus qui a amené à l’indépendance. Les réactions de la diplomatie russe insistent sur la légalité dans le droit et dans les relations internationales que la Russie déclare enfreinte. Ce vendredi, le président russe Vladimir Poutine a qualifié l’indépendance du Kosovo d'« horrible précédent » qui  « reviendrait à la gueule » des Occidentaux. Plus tôt, les Russes avaient déclaré que la mission de l’UE au Kosovo, Eulex, était illégale.

Les étapes de l’action russe

La première attitude de Moscou envers le problème du Kosovo a été celle d’un partenaire peut-être réticent, mais cependant engagé sur la même voie que les autres membres du Groupe de contact. Tandis que l’indépendance de Pristina semblait à terme inévitable, il restait les modalités, la méthode et le calendrier. Dans un premier temps la bataille fut menée pour gagner du temps sur les négociations et le calendrier.

Les négociations directes entre Belgrade et Pristina ont toujours buté sur le problème de l’indépendance. Les négociations entre les Albanais majoritaires au Kosovo et la communauté internationale qui s'est engagée pour garantir les intérêts des Serbes du Kosovo et des autres minorités, pour faire lever les craintes exprimées par Belgrade et Moscou, ainsi que pour régler les questions de respect de la légalité internationale, ont débouché sur le plan de l’envoyé spécial de l’ONU, Martti Ahtissari.

La Serbie a refusé le plan Ahtissari et a demandé le remplacement de l’envoyé de l’ONU. La Russie s’est jointe aux griefs de la Serbie. Quand le plan Ahttisari, prévoyant une indépendance surveillée du Kosovo, a été prêt et soumis à l’ONU, la Russie a menacé d'utiliser son droit de veto au Conseil de sécurité.

Dès lors le plan Ahtissari est tombé et la résolution du statut définitif du Kosovo par l’intermédiaire de l’ONU fut compromise par la menace de veto de la Russie.

La Russie demanda d’autres négociations directes entre Serbes et Kosovars, mais à la fin, le 10 décembre 2007, la troïka dont la Russie faisait partie, fut obligée de constater l’échec de ces énièmes négociations et d’en faire part au Secrétaire général des Nations unies.

La Russie et la Serbie en demandèrent encore d’autres, sans offrir à ces négociations un contenu ou un calendrier qui permettraient une avancée.

L’argument du précédent

Ne reconnaissant pas le caractère sui generis de l’indépendance du Kosovo, dont le processus a engagé l’ensemble de la communauté internationale, la Russie agite aujourd’hui la menace d’un précédent dans le cadre des relations internationales et menace de revoir sa politique envers des territoires qui souhaiteraient accéder à l’indépendance.

Pourtant, le discours affiché par Moscou est resté lettre morte. Ainsi, bien que les présidents de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud aient voulu saisir au vol les déclarations de Moscou, la Russie n’a pas donné suite aux demandes de reconnaissance de ces territoires séparatistes pro-russes du sud de la Géorgie. En effet, pour certains membres de la commission des affaires étrangères de la douma (parlement russe), une telle reconnaissance aurait entrainé une détérioration des relations au sein de la Communauté des Etats Indépendants qui lie Moscou à une série de pays issus de l’ex-Union Soviétique.

Enfin si la rhétorique officielle s’est enflammée sur la question du Kosovo, l’opposition russe ne s’est pas fait entendre sur la question. Est-elle d’accord avec le pouvoir ou faut-il y voir un manque de moyens suffisants d’expression à la fois sur la scène interne et en direction de la communauté internationale ?

Quelles que soient les opinions à Moscou ou dans d’autres villes de Russie, à la longue, face à un nombre croissant d’Etats qui vont reconnaître le Kosovo, la Russie prend le risque de s’isoler, même si c’est évidement dans une moindre mesure que son allié serbe.

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