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Colombie / Venezuela

Nouvelle donne dans le dossier des otages

par Julie Lerat

Article publié le 28/02/2008 Dernière mise à jour le 29/02/2008 à 08:41 TU

L'ex-otage Consuelo Gonzalez, émue pendant une conférence de presse à Paris, le 28 février 2008. A sa gauche, Lorenzo, le fils d'Ingrid Betancourt.(Photo : Reuters)

L'ex-otage Consuelo Gonzalez, émue pendant une conférence de presse à Paris, le 28 février 2008. A sa gauche, Lorenzo, le fils d'Ingrid Betancourt.
(Photo : Reuters)

Les FARC ont libéré quatre parlementaires qu’ils détenaient en otage. La guérilla annonce qu’il s’agit de son dernier geste de bonne volonté, et pose ses conditions pour le règlement du conflit. La guérilla veut entamer des négociations pour parvenir à un accord humanitaire, mais elle exige la démilitarisation d’une zone pour dialoguer avec les autorités colombiennes.

Après les larmes de soulagement et les embrassades poignantes, l’espoir est très vite retombé. Les quatre ex-parlementaires colombiens étaient à peine descendus de l’avion, quand le communiqué des FARC a été rendu public : la guérilla annonce qu’elle ne libérera plus d’otages de manière unilatérale. Après Clara Rojas et Consuelo Gonzalez, Luis Eladio Perez, Orlando Beltran, Gloria Polanco et Jorge Eduardo Gechem sont donc peut-être les derniers à retrouver la liberté. « A présent, le gouvernement colombien doit démilitariser Pradera et Florida pour 45 jours, où la guérilla serait présente avec la communauté internationale comme garant, pour négocier dans cette zone la libération des guérilleros et des prisonniers de guerre aux mains des FARC ».

Par cette déclaration, la guérilla place l’avenir des otages entre les mains du président Colombien Alvaro Uribe, qui a toujours refusé de céder à cette revendication des FARC. Il s’est une fois de plus montré inflexible. Juste après la libération, Alvaro Uribe a remercié son homologue vénézuélien pour ses « efforts », et a insisté sur le fait que la guérilla devait libérer d’autres otages. « Les FARC doivent comprendre que le peuple colombien attend que tous les otages qu’ils détiennent soient libérés. Ils devraient chercher en toute bonne foi le chemin de la réconciliation », a déclaré le président colombien.

L’échec des négociations

De 1999 à 2002, le président colombien Andres Pastrana avait mené des négociations avec la guérilla dans la région du Caguan. Il avait alors démilitarisé une zone de 42 000 Km2, dont les FARC avaient pris le contrôle par les armes pendant les trois années de dialogue. Le président Pastrana avait mis un terme à ces négociations le 20 février  2002, suite à l’enlèvement de Jorge Eduardo Gechem, libéré par les FARC ce mercredi. Trois jours plus tard, Ingrid Betancourt était enlevée à son tour.

L’échec des négociations menées par Andres Pastrana a conduit les colombiens à élire Alvaro Uribe, partisan de la fermeté, qui refuse de céder aux demandes des FARC, et de reproduire le modèle de sortie de crise de son prédécesseur.

 

Alvaro Uribe pourrait cependant être soumis à de très fortes pressions de la part de la communauté internationale, et notamment de la France, qui souhaite obtenir en urgence la libération d’Ingrid Betancourt. Les Colombiens, qui ont jusqu’ici soutenu leur président, pourraient également être sensibles à ce second geste des FARC et tenter de faire fléchir Alvaro Uribe. D’autant que le temps presse : les témoignages des otages libérés sont inquiétants.

Luis Eladio Perez, qui est proche d’Ingrid Betancourt, s’est dit très préoccupé. Ingrid est « très très malade, a-t-il dit. Elle est épuisée, physiquement et psychologiquement ». L’ex-parlementaire colombien, qui a vu Ingrid Betancourt pour la dernière fois au début du mois, a affirmé qu’elle était maltraitée par ses gardiens. Il a également parlé des trois Américains, Marc Gonsalves, Thomas Howes et Keith Stansell, dont l’avion s’était écrasé dans la jungle en 2003. Ils sont, depuis, détenus par la guérilla et souffrent de maladies tropicales. En tout, une quarantaine d’otages politiques sont encore aux mains des FARC, ainsi que plusieurs centaines de civils Colombiens.

L’espoir Hugo Chavez

« Aidez-nous à garder les portes ouvertes », a supplié Jorge Eduardo Gechem, lors d’une réunion avec Hugo Chavez. « Vous êtes l’unique espoir », ont confié les otages libérés au président vénézuélien. Hugo Chavez, pour qui ces libérations sont un nouveau succès, s’est une fois de plus prononcé en faveur d’un accord humanitaire avec les guérilleros, avançant – par la voix de l’un de ses porte-parole – qu’il « n’existe pas de solution militaire au conflit colombien ».

Mais Hugo Chavez a également lancé un appel au chef des FARC, après avoir entendu le témoignage des otages sur l’état de santé d’Ingrid Betancourt. « Marulanda, la première chose que je te demande de tout cœur, est de la confier à un commando plus proche de toi (…) dans la perspective de sa libération définitive(…). Je crois que c’est urgent », a dit Hugo Chavez. Le chef d’Etat vénézuélien a promis d’envoyer également un message aux FARC par les canaux habituels.

Les FARC affaiblies ?

« Ses gardiens ont passé leur colère sur elle et l’ont enchaînée dans des conditions inhumaines », a raconté l’ex-otage Luis Eladio Perez, à propos d’Ingrid Betancourt. Ce qui explique sans doute la demande d’Hugo Chavez, qui souhaite placer l’otage franco-colombienne sous la protection directe du chef historique des FARC.

Les événements de ces derniers mois ont montré un certain relâchement dans l’organisation de la guérilla, pourtant longtemps qualifiée de « stalinienne », en partie en raison de la discipline qui règne dans ses rangs.

« L’épisode Emmanuel », du nom de l’enfant de Clara Rojas – qui devait être libéré par la guérilla, alors qu’il se trouvait dans un orphelinat de Bogota - a révélé un grand manque de coordination au sein de la guérilla, sans doute affaiblie par les bombardements des forces armées colombiennes, qui ont altéré la communication entre les différents fronts.

 

En faisant cette demande, Hugo Chavez apparaît comme un médiateur idéal dans ce dossier. Il s’était attiré les foudres des Colombiens et de son homologue Alvaro Uribe à la suite de la première libération. Il avait alors demandé que les FARC soient retirés de la liste des organisations terroristes. Cette fois, Hugo Chavez laisse la guérilla poser elle-même ses exigences pour de futures négociations, et va dans le sens de la communauté internationale, en demandant un geste de plus aux FARC. Il est donc plus que jamais en position de force, et démontre qu’il est incontournable. Ce qu’Alvaro Uribe ne peut plus ignorer.

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