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Pays-Bas

Geert Wilders contre le Coran

Article publié le 29/02/2008 Dernière mise à jour le 23/03/2008 à 16:22 TU

Geert Wilders.(Photo: AFP)

Geert Wilders.
(Photo: AFP)

Le député de la droite populiste persiste et signe. Malgré les avertissements ce week-end du Premier ministre Jan Peter Balkenende et en dépit des menaces et des pressions diverses qui se sont intensifiées ces derniers jours, il dit avoir terminé son film contre le Coran. Et cherche maintenant un diffuseur.

Par notre correspondante à Amsterdam, Sabine Cessou

Geert Wilders, 45 ans, ne se laisse pas impressionner. Jeudi encore, deux ministres de son pays lui ont demandé de renoncer à montrer son film sur le Coran. Un projet qui fait parler de lui depuis quatre mois, dans le monde entier, mais dont personne n’a encore vu la moindre image. Au sortir de sa réunion avec Hirsch Ballin, le ministre de la Justice et Maxime Verhagen, le ministre des Affaires étrangères, Geert Wilders a dénoncé « une heure d’intimidation ». Mieux, il a accusé Jan Peter Balkenende, le Premier ministre néerlandais, de le laisser tomber face aux menaces proférées par al-Qaïda. L’organisation terroriste a en effet lancé contre lui un appel au jihad, pour ses outrages aux musulmans. Jusqu’à présent, Jan Peter Balkenende a fermement défendu le droit de Geert Wilders à la liberté d’expression, tout en prenant ses distances avec son projet de film et ses positions sur l’islam.

L'homme politique le plus cité

Intitulée Fitna, épreuve en arabe, la fameuse vidéo devrait montrer les pages d’un Coran, et illustrer différents versets par des images de pendaisons publiques en Iran, d’attentats en Irak ou de décapitations au Pakistan. Geert Wilders a précisé qu’il « arriverait quelque chose » au prophète Mahomet à la fin du film – sans préciser quoi. Le député populiste, depuis trois ans, est l’homme politique le plus cité par les médias néerlandais. Doué d’un sens fort de la communication, il multiplie les formules à l’emporte-pièce et sait faire sensation. Il ne cesse de répéter, depuis le mois d’août, qu’il faut interdire le Coran, au même titre que Mein Kampf, d’Adolf Hitler. « C’est un livre fasciste », martèle le chef de file du Parti pour la liberté (PVV), qui compte 9 députés sur un total de 150 au Parlement.

Les autorités, elles, se préparent depuis décembre à des protestations aussi fortes que celles qu’avait suscité la publication de caricatures du prophète Mahomet, en septembre 2005, par le quotidien danois Jyllands-Posten. La Haye redoute pour la vie de ses quelque 1 200 soldats, déployés en Afghanistan dans le cadre d’une mission de l’OTAN. Un porte-parole des talibans a menacé, le 27 février, d’organiser des attaques ciblées contre les contingents néerlandais, si le film devait être diffusé. Le gouvernement néerlandais pense aussi à ses intérêts commerciaux. Le Parlement iranien a brandi le 18 février la menace d’un embargo commercial. « Une liste a déjà été dressée dans le monde musulman des produits néerlandais, a déclaré Maxime Verhagen, le ministre des Affaires étrangères. Une société laitière comme Campina pourrait subir un dommage substantiel ».

Sous l'étroite protection des services secrets

Geert Wilders est connu, aux Pays-Bas, pour sa coupe de cheveux péroxydée et son islamophobie. Beaucoup se moquent de cet ancien libéral, qui fut quelque temps secrétaire de l’ancien commissaire européen Frits Bolkestein. Depuis la mort de Theo van Gogh, un cinéaste assassiné le 2 novembre 2004 à Amsterdam par un jeune islamiste néerlando-marocain, Geert Wilders n’en vit pas moins sous l’étroite protection des services secrets. Il change de résidence tous les soirs, ne voit sa femme qu’une fois par semaine et se trouve en permanence en compagnie de six ou sept gardes du corps. Malgré tout, il ne cesse de répéter que l’islam relève d’une « culture arriérée » et qu’il est « incompatible avec la démocratie ».

Hero Brinkman, l’un des députés du même parti que Geert Wilders, a provoqué un incident diplomatique, fin 2007, lors d’une visite aux Antilles néerlandaises, en déclarant avec la même assurance qu’il faudrait vendre ces « îles aux enchères sur internet ». Malgré les polémiques, la critique du modèle multiculturel et la remise en question de la tolérance néerlandaise font toujours mouche. Si des élections devaient se tenir aujourd’hui, le PVV de Geert Wilders remporterait 15 sièges au Parlement, selon les sondages. Rita Verdonk, l’ancienne ministre de l’Intégration, connue pour son extrême fermeté, entend surfer sur la même vague. Elle s’apprête à fonder son propre parti, Trots op Nederland (Fiers des Pays-Bas), au mois d’avril. Ce mouvement veut lui aussi marcher dans les pas de Pim Fortuyn, leader charismatique de la droite populiste, assassiné en 2002 par un activiste de gauche néerlandais.