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Brésil / Venezuela

Une défense commune pour l’Amérique latine?

par Sylvain Biville

Article publié le 26/03/2008 Dernière mise à jour le 27/03/2008 à 11:34 TU

Le président vénézuélien Hugo Chavez est au Brésil ce mercredi 26 mars pour une visite de 48 heures. Il doit notamment discuter avec son homologue Luiz Iniacio Lula da Silva d'un projet de défense et de sécurité commune pour l'Amérique latine. L'idée, lancée il y a plusieurs années par Hugo Chavez, a été réactivée récemment par le président brésilien, après la crise diplomatique entre la Colombie et l'Equateur.

Hugo Chavez, président du Venezuela, à son arrivée le 26 mars 2008 à Recife, au nord est du Brésil, pour une réunion avec le président brésilien  Luiz Iniacio Lula da Silva.  

		(Photo : Reuters)
Hugo Chavez, président du Venezuela, à son arrivée le 26 mars 2008 à Recife, au nord est du Brésil, pour une réunion avec le président brésilien Luiz Iniacio Lula da Silva.
(Photo : Reuters)

« Conseil de sécurité de l’Amérique latine » ou « OTAN du sud » : jamais l’idée d’une politique de défense et de sécurité commune au continent sud-américain n’a été autant discutée. Mais entre Hugo Chavez et Luiz Iniacio Lula da Silva, qui ont mis le sujet à l’agenda de leur rencontre au Brésil, l’objectif et la méthode sont loin d’être concordants.

Hugo Chavez a été le premier à lancer l’idée, au début des années 2000, dans une approche résolument défensive. Sur le modèle de l’Organisation du traité d’Atlantique nord (OTAN), créée à l’époque de la guerre froide par les Etats-Unis et les pays d’Europe occidentale pour faire face à la menace soviétique, le président vénézuélien désigne clairement l’ennemi : « l’impérialisme » des Etats-Unis. L’initiative s’inscrit dans la logique de rupture prônée par le président vénézuélien. « Il est temps de repenser et de réinventer les processus affaiblis et agonisants d’intégration sous-régionale et régionale dont la crise constitue la plus évidente manifestation d’un manque de projet politique commun », déclarait-il en 2005 lors du lancement de l’Alternative bolivarienne pour les peuples d’Amérique (ALBA).

C’est la première des nombreuses structures dont le président vénézuélien est à l’origine (voir ci-dessous). « Ces initiatives ont souvent du mal à se formaliser, à aller au-delà des discours » tempère le chercheur Jean-Jacques Kourliandsky, de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IFRI). Le projet de défense commune s’inscrit dans la même logique d’extension de la zone d’influence du Venezuela, grâce à une active diplomatie pétrolière dopée par l’envolée des cours de l’or noir.

Leadership régional

L’initiative défendue par Luis Ignacio Lula da Silva n’est pas dénuée, elle non plus, d’arrière-pensées. En proposant, après la crise récente entre la Colombie et l’Equateur, la création d’un « Conseil de sécurité sud-américain », le président brésilien cherche à conforter son leadership régional. Mais son approche est radicalement différente de celle d’Hugo Chavez. Après le raid colombien contre une base de la rébellion des FARC en territoire équatorien, le président vénézuélien avait menacé son homologue Alvaro Uribe d’une riposte militaire, en l’accusant d’être un « laquais de l’impérialisme américain ». Luis Iniacio Lula da Silva avait au contraire affiché sa neutralité, tout en jouant un rôle actif pour apaiser les tensions.

L’idée d’un « Conseil de sécurité sud-américain » s’inspire davantage du modèle onusien que de celui de l’OTAN. Plus qu’une alliance militaire, le chef de l’Etat brésilien propose la mise en place d’une instance permettant de prévenir les crises régionales. Il ne cache pas non plus que cet organe, qu’il propose d’installer au Brésil, servirait également les ambitions de son pays à un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. « Je pense que le Brésil a le droit de devenir membre du Conseil de sécurité, a-t-il déclaré. Mais que va y faire le Brésil ? La même chose que ce que font déjà les 5 membres permanents, ou apporter une nouvelle proposition ? Le Brésil a besoin de proposer la création d’un conseil de Défense sud-américain pour siéger au Conseil de sécurité au nom du continent. »

Pour Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IFRI) à Paris, les divergences d’approche des deux promoteurs d’une politique de défense et de sécurité commune en Amérique latine augurent mal de la mise en œuvre concrète du projet.

Jean-Jacques Kourliandsky

Chercheur à l’IFRI

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26/03/2008 par Sylvain Biville


Les projets d’Hugo Chavez pour l’Amérique latine


Alternative bolivarienne pour les peuples d’Amérique (ALBA
) : elle est présentée, lors de son lancement en avril 2005, à La Havane, comme un antidote à la Zone de libre-échange des Amériques (ALCA en espagnol, FTAA en anglais), promue par les Etats-Unis, dont l’objectif est de créer un vaste marché commun aux 34 pays d’Amérique du Nord et d’Amérique Latine (à l’exception de Cuba). Contre le modèle dominant des traités de libre-échange entre Etats, l’ALBA, qui réunit à l’origine Cuba et le Venezuela, rejoints ensuite par la Bolivie, le Nicaragua, l’Equateur et, à titre d’observateur, Haïti, promeut des « traités de libre commerce entre les peuples ».

 

Telesur : la chaîne de télévision panaméricaine est lancée symboliquement le 24 juillet 2005, date anniversaire de la naissance de Simon Bolivar (1783-1830), le père de l’idée d’« Etats-Unis d’Amérique latine ». Diffusée par satellite sur l’ensemble du continent et détenue à 51% par le Venezuela, avec des participations de l’Argentine (20%), de Cuba (19%), de l’Uruguay(10%), de la Bolivie (5%), de l’Equateur (5%), et du Nicaragua (5%), Telesur a pour ambition de contrecarrer l’omniprésence des chaînes de télévision américaines, CNN en espagnol et Univision.

Bancosur : officiellement lancée en décembre 2007, cette banque a pour objectif de remplacer le Fonds monétaire international (dont le Venezuela s’est officiellement retiré après qu’Hugo Chavez eut qualifié l’organisme de « Dracula ») et la Banque mondiale dans le financement du développement.