Article publié le 03/04/2008 Dernière mise à jour le 03/04/2008 à 22:37 TU
Une décision « historique », déclarait sans détour le président ukrainien Viktor Louchenko, en quittant le sommet de l'OTAN à Bucarest. Après des négociations particulièrement âpres entre des pays membres très divisés sur la question, un compromis a pu être trouvé sur la candidature ukrainienne à l'adhésion. Kiev rejoindra l'organisation militaire « tôt ou tard », selon le secrétaire général de l'OTAN, Jan de Hoop Scheffer. L'entrée dans le Plan d'adhésion à l'OTAN n'est pas pour cette fois, comme l'auraient voulu Kiev et Washington. Mais tôt ou tard, c'est déjà mieux que le « jamais » qu'oppose Moscou aux aspirations atlantistes de son voisin ukrainien.
Des milliers d'Ukrainiens se sont rassemblés sous la pluie à Kiev, jeudi 3 avril 2008, à l'appel du Parti des régions de l'ancien Premier ministre Viktor Ianoukovitch pour protester contre une future intégration de leur pays au sein de l'OTAN.
(Photo : AFP)
De notre correspondant à Kiev, Camille Magnard
La journée avait pourtant mal commencé à Kiev. Chez les pro-atlantistes du parti PORA, on tirait déjà les conclusions d'un refus de plus en plus clair de la candidature ukrainienne à Bucarest. Face à l'opposition réaffirmée de Paris et Berlin à voir l'Ukraine rejoindre l'Alliance, l'affaire semblait entendue pour la cinquantaine de militants qui avaient décidé d'aller exprimer leur rancoeur sous les fenêtres de l'ambassade de France. « La France a répété mot pour mot la position de Moscou sur cette question, dénonce Sergiy Taran, politologue et l'un des responsables politiques de PORA. Nous sommes habitués à voir la main de Moscou derrière certains partis politiques ukrainiens, mais je ne pensais pas qu'elle était aussi derrière la politique internationale d'un pays-clé de l'Union européenne comme la France ».
On était loin d'imaginer que Paris et Berlin quitteraient le sommet de Bucarest sur une déclaration aussi favorable à l'intégration « à terme » de l'Ukraine. Et pourtant « tous les pays membres de l'OTAN sont tombés d'accord sur l'idée que l'Ukraine fera un jour partie de l'OTAN », insistait jeudi soir le président ukrainien, comme si lui non plus n'arrivait pas à y croire. Et même si certains analystes occidentaux diront que la décision prise à Bucarest est avant tout une victoire de Moscou, que ce sommet a montré le peu de soutien sur lequel peut compter le président ukrainien chez les pays européens, à Kiev on se félicite avant tout que la porte ne soit pas tout simplement fermée.
D'autres qui ont peine à y croire, ce sont les partis politiques pro-russes, farouchement opposés à l'entrée de leur pays dans une alliance militaire jugée trop pro-américaine. Le Parti des régions et son dirigeant, l'ancien Premier ministre Viktor Ianoukovitch, sont restés très en retrait, cette semaine, sur la question d'une possible adhésion à l'OTAN. Le parti avait pourtant prévu un grand concert anti-OTAN ce jeudi soir, au moment de la réponse attendue du sommet de Bucarest. La fête tourne donc court pour les militants qui avaient de bonnes raisons de croire que l'OTAN allait renvoyer l'Ukraine dans le giron russe.
Pour l'heure, les anti-OTAN se consolent : l'Alliance atlantique a seulement donné un soutien de principe à l'Ukraine. C'est en décembre que devrait être à nouveau étudiée la candidature ukrainienne au Plan d'adhésion. Il reste encore du temps avant de voir Kiev siéger au sein de l'OTAN, un temps que l'opposition compte mettre à profit pour multiplier les campagnes et manifestations anti-atlantistes. Car selon la Constitution ukrainienne, rappellent-ils, l'adhésion à l'organisation militaire doit être approuvée par référendum. Et d'après les sondages, la population ukrainienne reste assez réfractaire à cette idée.
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