par Annabel Walker
Article publié le 10/04/2008 Dernière mise à jour le 10/04/2008 à 22:04 TU
Il suffit de se promener dans n’importe quelle ville italienne pour se trouver face-à-face avec le sourire éclatant de Silvio Berlusconi et le regard rassurant de Walter Veltroni, les deux grands prétendants au poste de chef du gouvernement.
Walter Veltroni, 52 ans, soit vingt de moins que son rival, se présente pour la première fois en chef de file du centre-gauche. L’ex-maire de Rome veut incarner une nouvelle ère politique dans une Italie libérée des blocages institutionnels qui ont condamné le gouvernement sortant. Autrement dit, les interminables tractations entre membres de la coalition. Pour cela, il a créé une nouvelle formation politique de gauche, ouverte au libéralisme économique, le Parti démocrate. Refusant de s’allier aux anciens partenaires de Romano Prodi, il a préféré se lancer seul dans la bataille. Même si, plus tard, L’Italie des Valeurs, le petit parti de l’ancien magistrat anti-corruption, Antonio Di Pietro, l’a rejoint.
Walter Veltroni promet quatre milliards de dollars pour la lutte contre l'évasion fiscale et la hausse des salaires et des retraites. Il veut relancer la consommation dans un pays plombé par une croissance estimée à 0,8% en 2008. Mais l’argument du nouveau candidat, c’est d’abord la baisse des impôts. Un territoire d’habitude occupé par la droite berlusconienne. Walter Veltroni espère ainsi récupérer les déçus du gouvernement Prodi, qui avait augmenté la pression fiscale à 50,5% du PIB.
A 71 ans, Silvio Berlusconi a déjà gouverné le pays par deux fois, de 1994 à 1995 et de 2001 à 2006. Il avait promis de revenir après sa défaite sur le fil du rasoir face à Romano Prodi, le voilà qui s’annonce déjà futur chef du gouvernement. Sa coalition de droite, le Peuple de la liberté, se présente en un seul bloc, uni derrière « Silvio ». Elle rassemble : Forza Italia, le parti du « Cavaliere », Alliance nationale, l’héritière remodelée du parti néo-fasciste, l’extrême-droite Alternative sociale, Autonomie Sud dans le Mezzogiorno et le parti anti-immigration régionaliste de la Ligue du nord. La suppression de la taxe foncière sur la résidence principale est la mesure phare du Peuple de la liberté.
Trouble-fêtes
Certains mécontents de la coalition ont créé leur propre parti, qui se revendique comme la seule, vraie droite. Il s’appelle tout simplement La Droite. Emmenée par la seule femme candidate au poste de chef du gouvernement, Daniela Santanché, La Droite se réclame sans complexe du fascisme – tout en reniant Alessandra Mussolini, la petite-fille du Duce ralliée à Berlusconi. Sur les affiches de campagne, le visage de mannequin de « La Santanché » côtoie le slogan « l’Italie aux Italiens ». La Droite mène une campagne tonitruante dans les médias. Pour autant, elle est créditée de seulement 2,5% des voix.
Autre ancien allié de Berlusconi, l’Union du centre. Le parti catholique a quitté la coalition en 2006. Or, les troupes de Pier Ferdinando Casini pourraient bien jouer les trouble-fêtes. Héritier de la démocratie chrétienne, l’UDC compte rassembler les conservateurs religieux mais aussi les mécontents de la gauche et de la droite en se positionnant au centre. L’Union du centre est créditée de 6% des voix au niveau national.
Six pour cent, c’est aussi le score qu’obtiendrait la coalition de gauche dite « Arc-en-ciel ». Elle est composée des anciens alliés du gouvernement sortant : les Verts et trois partis de gauche radicale. Leur cheval de bataille : éliminer les contrats précaires qui touchent particulièrement les jeunes.
L’autre parti de l’extrême-gauche, la Gauche critique, n’hésite pas à afficher le marteau et la faucille sur ses posters de campagne. Elle renvoie dos à dos le centre-droit et le centre-gauche. Sur ses tracts on peut lire : «N’écoute pas ce qu’ils te disent mais regarde ce qu’ils n’ont pas fait. Ne vote pas pour eux, ne t’abstient pas ».
Dimanche et lundi, les Italiens auront le choix entre tous ces partis, mais plus encore. Au total, on dénombre 177 formations en lice.
L’abstention, c’est la grande peur de Silvio Berlusconi et Walter Veltroni. A deux semaines du vote, 30% des Italiens étaient encore indécis. Ce qui relativise les sondages : 45,7 % des voix au Peuple de la liberté contre 39,1 % au Parti démocrate. Le suspense reste entier.
«Il sait que cette recette qu'il utilise depuis 14 ans peut être encore gagnante tout comme peut l'être sa façon de se présenter comme un sauveur.»
10/04/2008 par Anne Le Nir