Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Italie

Un scrutin serré entre les 2 grandes formations politiques

par Marina Mielczarek

Article publié le 11/04/2008 Dernière mise à jour le 13/04/2008 à 04:42 TU

Deux candidats sont en lice pour sortir l’Italie d’une crise économique et morale : l’ancien maire de Rome, Walter Veltroni à la tête du PD, Parti démocrate (formation de gauche) et Silvio Berlusconi menant le PDL, le Peuple de la liberté, une coalition de partis de droite. Là où la logique voudrait que les sensibilités et les programmes s’opposent, force est de constater que finalement Berlusconi-Veltroni ou Veltroni-Berlusconi c’est du pareil au même !

Une image suffit à résumer la campagne, taxée par la presse italienne de terne et sans confrontations d’idées. En couverture de son édition italienne, l’hebdomadaire américain Newsweek a succombé au plaisir du photomontage. A sa Une, de loin, on pourrait croire à un homme en costume cravate. Mais vu de plus près… surprise : deux visages en un seul apparaissent en couverture ! La première moitié possède les cheveux noirs lustrés du magna de la presse Silvio Berlusconi, 71 ans. Sur la seconde on reconnaît le demi-front un peu plus large de son adversaire. Le tour de tête poivre et sel, légèrement dégarni et la lunette ronde de Walter Veltroni, pourtant beaucoup plus jeune que l’adversaire tiré à quatre épingles, et semblant toujours sortir d’un énième lifting. Et ce titre sous  la photo jumelle…Veltrusconi !

A 52 ans, l’ancien maire de Rome n’a pas eu peur de la course au plus beau profil. Au contraire même, en matière de communication Walter Veltroni sait y faire. Ces derniers mois, il l’a prouvé en sillonnant le pays en bus avec chaque soir une ville relais-étape pour alpaguer et galvaniser les foules.

L’image et la technique du bon mot sont sans aucun doute les premiers points communs aux deux hommes. Ce fut en son temps la faiblesse et l’une des raisons de la chute de l’ancien Premier ministre Romano Prodi. Les deux challengers en ont fait une force, un pilier de leur campagne en faisant passer le tout sous l’apparence de candidats ennemis, aux politiques radicalement opposées. Est-ce cela qui a privé les Italiens de débats télévisés entre les deux hommes ?

Sourires ironiques des analystes. Les invectives de ces derniers jours où Silvio Berlusconi a traité son adversaire Veltroni de tricheur, ont servi de bouche-trou. Il fallait bien trouver une alternative au manque d’idées neuves pour sortir l’Italie de sa léthargie économique. « Pays en panne », préfère dire le Fonds monétaire international tandis que Marco Tachi, professeur de sciences politiques à l’université de Florence, estime que « Avec Veltroni, la gauche s’est convertie au marketing. Prodi avait une conception plus ascétique de la politique. Veltroni et Berlusconi misent tout sur l’image et la télévision. Leurs programmes sont similaires et il n’y a pas eu de débats d’idées.» Selon l’Institut national de la statistique, 20% des familles italiennes vivent avec moins de 1200 euros par mois. La prévision de croissance du PIB reste préoccupante, elle ne dépassera pas 0,3%. 

Berlusconi/Veltroni, ce qui les rapproche

La recette est simplissime. En gros, il s’agit de dresser la liste des mesures impopulaires prises par le prédécesseur Romano Prodi et de proposer le contraire ! Pas de long terme, mais de l’utile, du pratique et de la confiance. Les deux adversaires le savent, le pays a besoin d’un bon coup de blush pour redonner des couleurs à ses habitants qui n’y croient plus.

Silvio Berlusconi lors de son dernier meeting à Rome, le 10 avril.(Photo: Reuters)

Silvio Berlusconi lors de son dernier meeting à Rome, le 10 avril.
(Photo: Reuters)

Dimanche et lundi, le taux d’abstention risque d’être élevé. Trop de collusion entre mafieux et classes dirigeantes. Chômage autour de 6%, lourdeur administrative et des électeurs assoiffés de messages simples, de miracles ou de solutions vite faites, bien faites. Silvio Berlusconi et Walter Veltroni promettent en chœur une réduction d’impôt, une relance de l’économie et une montée de la consommation intérieure.

Un jeu d’enfant dans un pays acquis au capitalisme où contrairement à la France avec son président, les signes extérieurs de richesse et le côté bling-bling du leader Berlusconi jouissent d’une grande popularité.

Celui qu’on appelle Il Cavaliere se targue de son expérience d’entrepreneur pour se poser en « père de la nation ». Tout au long de la campagne le tycoon des médias est resté très évasif sur les moyens concrets qu’il emploierait une fois élu. C’est pourtant lui qui a une courte avance dans les derniers sondages.

Quand bien même, l’écart reste bien trop étroit pour faire la différence au Parlement. En Italie, la loi électorale basée sur la proportionnelle, y compris des plus infimes coalitions, freine la prise de décisions et le suivi de la gouvernance (depuis la dernière guerre mondiale, les Italiens ont connu 61 gouvernements). Silvio Berlusconi comme Walter Veltroni le savent, et chacun de son côté propose de réformer le système afin de donner plus de poids au vote à la majorité.

Walter Veltroni, lors de son dernier meeting à Rome le 11 avril 2008.
(Photo: Reuters)

Walter Veltroni, lors de son dernier meeting à Rome le 11 avril 2008.
(Photo: Reuters)

 

Veltrusconi ? Trop facile à dire….

Pour gagner ses quatre ou cinq points d’avance, Silvio Berlusconi a joué sur l’amertume d’un peuple fatigué et déçu par les hausses d’impôts du dernier gouvernement de gauche. Le problème c’est qu’à part la critique, difficile de trouver autre chose. Une vague allusion aux moyens de sauver la compagnie aérienne nationale Alitalia d’une fusion avec la française Air France. Sinon ? Sinon des mots, rien que des mots et une image…

Les mesures de terrain côté Veltroni paraissent un peu plus étoffées. L’ancien maire de Rome propose trois axes de réformes : lutte contre la précarité avec, entre autre, un revenu minimum d’insertion, guerre à la précarité des jeunes et enfin chasse aux chefs mafieux.

L’ancien maire de Rome compte débloquer quatre millions d’euros ponctionnés sur le budget des impôts du prédécesseur Prodi ! Et enfin, pour alléger la politique, il promet de simplifier les textes. L’Italie compte 21 961 lois !

En somme, chaque candidat reste fidèle à une image de parti. Berlusconi avec une conception de la société plus individualiste, Veltroni incarnant l’idée d’une Italie réconciliée avec son image de pays soudé et solidaire.

Veltrusconi ? Oui, peut-être…

Mais malgré tout, c’est vrai et c’est sans doute pour ça qu’ils ont évité l’affrontement sur les plateaux de télé, le vainqueur (en raison du peu d’écart entre les deux candidats) aura besoin de l’autre pour commencer à gouverner et entamer ses réformes. D’ailleurs, même les invectives de dernière minute du Cavaliere à l’encontre de l’ancien maire de Rome sonnaient faux ces derniers jours, voire trop finement calculées. Les deux hommes se seraient-ils mis d’accord en se concertant à l’abri des regards ? Ou plus certainement, le savent-ils, en amorçant dès à présent l’éventualité d’un futur rapprochement…

Malgré tout ce qui les oppose, Silvio Berlusconi et Walter Veltroni ont montré une volonté commune de décrisper les relations gauche-droite. Une nécessité pour cette élection tournée vers l’intérieur sans aucune référence à l’Europe ou à la place de l’Italie en matière de politique étrangère. Walter Veltroni aime pourtant se comparer à l’américain démocrate Barak Obama, quand de l’autre côté, presque certain de sa courte victoire, le clinquant Berlusconi n’hésite pas à comparer l’éventualité d’une entente entre les deux camps à une ouverture à la Sarkozy !