par Myriam Berber
Article publié le 23/04/2008 Dernière mise à jour le 23/04/2008 à 17:29 TU
Les salariés du port du Havre manifestent contre la réforme des ports autonomes maritimes.
(Photo : AFP)
Les sept ports autonomes français étaient en arrêt quasi-total ce mercredi 23 avril 2008. Fer de lance de la mobilisation, le port autonome de Marseille (PAM), déjà paralysé la semaine dernière par quatre jours de grève, était complètement bloqué à l’exception du trafic passagers. Près d’un millier de salariés du PAM se sont rassemblés dans le centre-ville. Mardi soir déjà, 26 navires, dont 18 pétroliers, étaient en attente dans la rade. Au Havre, la manutention sur les terminaux à conteneurs n’a pas été assurée et quelque 700 employés ont manifesté dans les rues de la ville. Dans le port voisin de Rouen, le trafic était également perturbé et plus de 150 agents du port ont mis en place des piquets de grève devant le principal terminal à conteneurs. A Nantes, ce sont les accès aux terminaux destinés aux denrées agricoles et au bois qui ont été bloqués par près de 300 manifestants. Depuis une dizaine de jours, le fonctionnement du port est ralenti, les week-end et la nuit, par une grève des grutiers.
Même situation dans les ports de Bordeaux, Dunkerque ou bien encore de La Rochelle où il n’y a pas eu de chargement ou de déchargement des navires et des camions. Après avoir paralysé les ports par des journées de grève reconductibles la semaine dernière, la Fédération nationale des ports et docks CGT, syndicat majoritaire dans le secteur, mène désormais des grèves perlées pour « inscrire la bataille dans la durée » et « maintenir la pression sur les pouvoirs publics ». D’où cette mobilisation le jour même de l’adoption du projet de loi en conseil des ministres. Selon l’Union maritime et fluviale de Marseille, une journée de grève coûterait entre un à deux millions d’euros pour les entreprises travaillant sur le port.
La privatisation au cœur de la réforme
Cette réforme annoncée dès juin 2007 par Nicolas Sarkozy a pour objectif de relancer les ports français distancés par les concurrents européens. Alors que le trafic maritime mondial augmente, les ports français ne cessent de perdre des parts de marché. Dans le trafic européen des conteneurs, celles-ci sont tombées de 11,6% à 6,8% entre 1989 et 2006. Pour Dominique Bussereau, secrétaire d’Etat aux Transports, cette réforme est urgente : « L’activité des sept ports concernés par la réforme –Marseille, Le Havre, Rouen, La Rochelle, Bordeaux, Nantes et Dunkerque- est inférieur de 100 millions de tonnes au trafic réalisé par le seul port de Rotterdam : 400 millions de tonnes ».
Le plan de relance entend remédier à cette situation par plusieurs séries de mesures. La première prévoit la réorganisation de la manutention et pose la question du statut des ouvriers qui chargent et déchargent les navires. En France, ils sont divisés en deux catégories. D’un côté les dockers qui travaillent au sol et sont employés par des entreprises privées depuis 1992. De l’autre, les grutiers et les portiqueurs qui conduisent des machines et sont employés par le port. Tout comme les dockers, les grutiers et les portiqueurs passeront désormais sous l’autorité des entreprises privées. Près de 2 000 salariés sont concernés.
Six mois pour négocier
La CGT qui refuse ce changement de statut, dit craindre que « cette réforme n'entraîne de nombreux licenciements ». Dominique Bussereau a assuré que « ce projet visait à créer des emplois et non à en supprimer ». Il annonce la création à terme de plus de 30 000 emplois notamment dans les activités de transport et de logistique. Le gouvernement a insisté sur la concertation en cours qui devrait se poursuivre jusqu'au 31 octobre pour adapter la réforme port par port. Si au bout de ces six mois, les négociations avec les organisations syndicales n’ont pas abouti, une loi-cadre s’appliquera.
Le plan prévoit également un recentrage des ports sur leurs missions de service public. A ce titre, ils sont responsables de l’organisation et l’amélioration des dessertes intérieures. Le projet prévoit ainsi de renforcer les connexions entre les ports et les lignes ferroviaires et fluviales pour faciliter le transport des marchandises. Ce renforcement des attributions des ports en matière d’aménagement du territoire ira de pair avec une augmentation des investissements de l’Etat. Plus de 170 millions d’euros doivent être distribués entre 2009 et 2013, afin de permettre aux ports français de rattraper leur retard sur leurs concurrents comme Rotterdam, Anvers, Zeebrugge, voire Barcelone.
A écouter
Le gouvernement a donné six mois aux organisations syndicales pour qu'elles négocient au sein des ports autonomes afin de trouver des solutions.
23/04/2008 par Murielle Paradon