Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Prolifération nucléaire

Coopération nucléaire entre la Syrie et la Corée du Nord, selon Washington

par Sylvain Biville

Article publié le 24/04/2008 Dernière mise à jour le 25/04/2008 à 00:35 TU

Le site nucléaire de Yongbyon, en Corée du Nord. Le site syrien en construction ressemblerait comme deux gouttes d'eau au réacteur nord-coréen de Yongbyon.(Photo : AFP)

Le site nucléaire de Yongbyon, en Corée du Nord. Le site syrien en construction ressemblerait comme deux gouttes d'eau au réacteur nord-coréen de Yongbyon.
(Photo : AFP)

La Maison Blanche a affirmé jeudi que la Corée du Nord avait aidé la Syrie à construire un réacteur nucléaire. Les services de renseignements américains ont dévoilé au Congrès ce qu’ils présentent comme des preuves de cette collaboration. Ce sont ces mêmes soupçons qui avaient justifié le raid israélien de septembre 2007 contre la Syrie.

Quelles sont les preuves d’une aide nord-coréenne à la Syrie pour la construction d’un réacteur nucléaire ?

Le chef de la CIA et le conseiller pour la sécurité nationale de George Bush sont allés témoigner devant le Congrès américain avec dans leurs bagages des extraits d’une vidéo. Elle aurait été prise à l’intérieur d’une une installation secrète syrienne. Le site en construction filmé ressemblerait comme deux gouttes d'eau au réacteur nucléaire nord-coréen de Yongbyon, qui a permis au régime de Kim Jong-Il de produire plusieurs dizaines de kilogrammes de potassium. Les images montreraient également des personnes de type coréen travaillant sur le site syrien. C’est ce qui permet à la Maison Blanche d’affirmer, dans un communiqué, que « la Corée du Nord a aidé la Syrie à construire un réacteur nucléaire capable de produire du plutonium à des fins militaires jusqu'en septembre 2007 ».

Un spécialiste des armes nucléaires interrogé par le Washington Post parle d’éléments « accablants » pour Damas et Pyongyang. Mais les documents produits ne permettent pas d’établir avec certitude l’état d’avancement du chantier et la finalité de l’installation. Les Etats-Unis disent avoir transmis les documents à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Ils demandent à l’organisme onusien chargé de veiller à la non-prolifération de dire à la Syrie qu’elle a violé ses engagements internationaux et somment Damas de faire « toute la lumière sur ses activités nucléaires illégales ».

Quel était l’objectif du raid israélien de septembre 2007 en Syrie ?

L'armée israélienne aurait mené en septembre 2007 une opération sur une base secrète syrienne.(Photo : AFP)

L'armée israélienne aurait mené en septembre 2007 une opération sur une base secrète syrienne.
(Photo : AFP)

Selon toute probabilité, c’est cette installation qui a été bombardée par Israël le 6 septembre dernier, lors d'un mystérieux raid en territoire syrien, sur lequel Israéliens et Américains observaient depuis sept mois le mutisme le plus complet. La Maison Blanche le confirme indirectement en indiquant, sans citer Israël, que le site syrien a été « endommagé au-delà du réparable » en septembre 2007. Le New York Times a été le premier à évoquer la piste d’un réacteur nucléaire, dès septembre 2007, en publiant des photos satellite du site avant et après sa destruction par l’aviation israélienne. La Syrie, qui a toujours démenti, a rapidement rasé le site bombardé et reconstruit un bâtiment civil.

Washington décide donc aujourd'hui de rompre le silence, en confirmant les soupçons de coopération nucléaire entre deux des principales bêtes noires des Etats-Unis : la Syrie et la Corée du Nord, toutes deux classées sur la liste noire américaine des pays soutenant le terrorisme.

Quelles conséquences sur les négociations avec la Corée du Nord ?

La Maison Blanche affirme que le processus diplomatique avec la Corée du Nord va se poursuivre. Une délégation américaine s’est d’ailleurs encore rendue cette semaine à Pyongyang pour des discussions qualifiées de « très substantielles ». Mais ces révélations publiques ne vont sans doute pas faciliter les relations déjà difficiles avec le régime de Kim Jong-Il. Le processus diplomatique, qui vise à obtenir de Pyongyang la publication d’une liste de toutes ses installations nucléaires en échange d’un allègement des sanctions américaines, n'est pas du goût de tout le monde au sein de l'administration. Et certains faucons, parmi lesquels le vice-président Dick Cheney, accueilleraient plutôt favorablement tout élément qui pourrait faire capoter les pourparlers.

Dans un éditorial particulièrement virulent, le quotidien conservateur Wall Street Journal attaquait jeudi matin le président Bush « qui s’apprête à pardonner à la Corée du Nord pour avoir dit ce que les Etats-Unis considèrent aujourd’hui comme un mensonge sur la prolifération nucléaire pour un autocrate du Moyen-Orient qui est un ennemi de l’Amérique ». Plusieurs parlementaires américains ont d’ores et déjà appelé à une suspension des négociations avec la Corée du Nord.

Quelles conséquences au Moyen-Orient ?

La Syrie a, une nouvelle fois, vigoureusement démenti toute ambition nucléaire. L’ambassadeur syrien à Washington a raillé la présentation d’une vidéo comme preuve. « Souvenez-vous que les Etats-Unis sont allés au Conseil de sécurité de l’ONU avec des images présentées comme des preuves de la présence d’armes de destruction massives en Irak », a déclaré Imad Moustapha au Washington Post.

Israël, qui a gardé un silence absolu sur le raid de septembre dernier en imposant une censure militaire à la presse locale sur cette question, s’inquiète également du moment choisi pour rendre publiques les informations sur le programme nucléaire syrien. L’Etat hébreu redoute une réaction violente de Damas, au moment où l’on évoque une reprise de contact sur la question du plateau du Golan. Le président syrien Bachar el-Assad a confirmé jeudi avoir reçu, par l’intermédiaire du Premier ministre turc, une proposition israélienne de retrait du Golan, occupé depuis 1967 et annexé en 1981, en échange de la paix entre les deux pays.

A écouter

L'embarras d'Israël

« Israël craint que la reconnaissance publique du bombardement oblige Damas à réagir officiellement et militairement contre Israël. »

25/04/2008 par Catherine Monnet

Les Etats-Unis accusent Damas et Pyongyang

« Une photo montre l'un des principaux ingénieurs spécialiste du nucléaire nord-coréen, posant à côté d'un collègue syrien. »

25/04/2008 par Jean-Louis Pourtet