Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Reportage photo en Azerbaïdjan

L'or noir convoité par l'Europe

par Heike Schmidt

Article publié le 03/06/2008 Dernière mise à jour le 04/06/2008 à 15:22 TU

Les Azerbaïdjanais vivent sur un trésor. Les immenses réserves de gaz et de pétrole du pays sont convoitées par l’Occident. Pays de transit, l'Azerbaïdjan, proche du Turkménistan, de l’Iran et du Kazakhstan, est devenu une pièce maîtresse dans la stratégie européenne qui vise à diversifier ses sources d’énergie tout en contournant la Russie. Après l’inauguration de l’oléoduc « Bakou-Tbilissi-Ceyhan » en 2006, l’Europe compte acheminer le gaz de la mer Caspienne à partir de 2013 grâce au gazoduc « Nabucco ». L’argent du pétrole et du gaz nourrit le clientélisme en Azerbaïdjan. Selon « Transparency International », ce pays du Caucase occupe le 150ème rang des 179 pays les plus corrompus.

Une grande affiche avec le portrait du défunt président Heydar Aliev accueille le visiteur au terminal Sangachal. Les torchères d’un des plus grands terminaux pétroliers du monde sont visibles de loin. Les 1774 kilomètres de tuyaux qui traversent l’Azerbaïdjan, la Géorgie et la Turquie représentent un investissement de 3 milliards d’euros. Ici, British Petroleum entre chaque jour 700 000 barils dans l’oléoduc transcaspien pour les transporter jusqu’au bord de la Méditerranée. A la fin de cette année, un million de barils devraient ainsi être transportés vers l’Europe, avide d’énergie pour faire marcher ses voitures et ses machines. Le pipeline BTC donne aux producteurs de la Caspienne une voie d’accès directe vers les marchés occidentaux, en contournant la Russie et l’Iran.

L’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan est toute la fierté de l’Azerbaïdjan. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

L’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan est toute la fierté de l’Azerbaïdjan.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)


Fizuli Babayev a dû quitter sa zone de pêche pour faire place à l'oléoduc, au sud de Bakou. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

Fizuli Babayev a dû quitter sa zone de pêche pour faire place à l'oléoduc, au sud de Bakou.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Fizuli Babayev, pêcheur dans le village de Sangachal au sud de la capitale Bakou, a perdu son travail depuis que British Petroleum lui a demandé de quitter sa zone de pêche pour faire place à l’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan. « Notre pétrole part à l’étranger, mais nos problèmes à nous ne sont pas résolus », dit cet Azerbaïdjanais. Comme lui, ses deux frères cadets sont au chômage. Ils accusent BP d’avoir fait beaucoup de promesses sans jamais les tenir. Parfois, Fizuli Babayev aurait envie de percer un trou dans le pipeline, pour enfin toucher quelques bénéfices de la manne pétrolière, puisée à porté de main et vendue à prix d’or.

Konul Mammadov et sa mère Shakhla devant la maison de famille. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

Konul Mammadov et sa mère Shakhla devant la maison de famille.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Konul Mammadov rêve d’une carrière de chanteuse pour pouvoir quitter son village natal, adossé au terminal pétrolier. Avec sa mère Shakhla, son père Elmar, trois sœurs et un frère, cette fille de 17 ans vit dans une maison en bois, abandonnée par des soldats soviétiques. Avec 80 euros de salaire par mois, la famille fait partie des Azerbaïdjanais qui peinent à subvenir à leurs besoins. Selon la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), presque 30% des Azerbaïdjanais vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le père de famille, Elmar, n’a jamais réussi à trouver un emploi au terminal BP.

La route principale de Sangachal (Photo : Heike Schmidt / RFI)

La route principale de Sangachal
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Grâce à un programme d’aide, British Petroleum a refait la route principale de Sangachal, rénové l’école et la poste du village et construit un jardin d’enfant. Mais depuis l’inauguration du pipeline BTC, les villageois ont constaté un nombre croissant de problèmes de santé qui sont, selon eux, dus aux gaz nocifs émis par le terminal d’exploitation pétrolier et gazier.

La fièvre immobilière est palpable dans la capitale de l’or noir. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

La fièvre immobilière est palpable dans la capitale de l’or noir.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Depuis que le pétrole jaillit sur les plates-formes off-shore, l’argent coule à flot dans la capitale. Avec des taux de croissance compris entre 25 et 30%, l’Azerbaïdjan se trouve en tête du palmarès mondial. Signe visible de la nouvelle richesse du pays : un boom immobilier sauvage. Au début du 20ème siècle, les familles Rothschild et Nobel engageaient les meilleurs architectes d’Europe pour construire de somptueuses villas. Les oligarques d’aujourd’hui investissent leur fortune en bâtissant des gratte-ciels. Grâce à la flambée des prix du baril, les revenus de l’Azerbaïdjan devraient doubler. Cette année, dix milliards de dollars devraient alimenter le Fond national du pétrole.

Les quartiers pauvres de Bakou : Le revers de la médaille – celle qui brille moins.(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Les quartiers pauvres de Bakou : Le revers de la médaille – celle qui brille moins.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Dans les quartiers pauvres, tout reste à faire. Selon le magazine d’affaires américain Forbes, la capitale de l’or noir est le leader mondial des métropoles polluées.

Un des sites industriels de Soumgaït abandonné. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

Un des sites industriels de Soumgaït abandonné.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Au temps de l’Union soviétique, Soumgaït était un centre industriel. Aujourd’hui, il ne reste que les vestiges rouillés des usines chimiques, mais les habitants souffrent toujours des dégâts sur l’environnement. Des études ont montré que les résidents de Soumgaït sont victimes d’un taux très élevé de décès dus au cancer. Un fort pourcentage de bébés naissent prématurés ou avec des malformations.

Un jeune garçon devant l'école du camp de réfugiés de Soumgaït. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

Un jeune garçon devant l'école du camp de réfugiés de Soumgaït.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Les enfants de Soumgaït grandissent sur des terres polluées.(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Les enfants de Soumgaït grandissent sur des terres polluées.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)


Taplan Alivakaklic et sa mère, toutes les deux refugiées du Haut Karabakh.(Photo : Heike Schmidt / RFI)

Taplan Alivakaklic et sa mère, toutes les deux refugiées du Haut Karabakh.
(Photo : Heike Schmidt / RFI)

En 2006, le gouvernement avait promis d’investir 120 millions de dollars pour améliorer les conditions de vie du million de refugiés venus du Haut Karabakh après la guerre avec l’Arménie. Mais comme à Sangachal au sud de Bakou, les habitants du nord de la capitale, dans le camp de refugiés de Soumgaït, attendent encore les bénéfices du boom pétrolier. Ils vivent dans les maisons des ouvriers russes qui ont quitté la région après la fin de l’Union soviétique.

Sur notre antenne

Un des sites industriels de Soumgaït abandonné. (Photo : Heike Schmidt / RFI)

Dimanche économie

La manne énergétique en Azerbaïdjan

01/06/2008

Bakou, une ville très polluée

« Sur ce terrain le pétrole a été extrait depuis le 19e siècle jusqu'à la fin de l'époque soviétique et les gens habitent juste à côté des champs de pétrole. Ici la terre est très polluée. »

21/05/2008 par Heike Schmidt