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Irlande

Référendum sur le traité de Lisbonne : le «non» en tête

par Béatrice Leveillé

Article publié le 06/06/2008 Dernière mise à jour le 06/06/2008 à 17:23 TU

Pour la première fois, un sondage place le «non» en tête dans les intentions de vote pour le référendum du 12 juin sur le traité européen de Lisbonne. Bruxelles s’inquiète de ce possible séisme politique. Le nouveau Premier ministre irlandais lance un appel à ses concitoyens.

Mary Lou Mc Donald (à droite), chef de campagne européen du Sinn Fein, le seul parti parlementaire à soutenir le «non».
(Image d'archives)(source: Wikipedia)

Mary Lou Mc Donald (à droite), chef de campagne européen du Sinn Fein, le seul parti parlementaire à soutenir le «non». (Image d'archives)
(source: Wikipedia)

Le sondage  commandé par l'Irish Times, le grand quotidien social démocrate irlandais, est publié ce vendredi 6 juin avec ce commentaire : « A moins d'un changement significatif de l'opinion publique, l'Union européenne va être plongée en pleine crise ».  Réalisée par l'institut TNS MRBI sur un panel d’un millier de personnes, l’enquête d’opinion crédite le « non » de 35% des intentions de vote, contre 30% pour le « oui ».  Les indécis sont presque aussi nombreux et 7% des personnes interrogées disent qu'elles n'iront pas voter. Un  renversement de tendance car à la mi-mai, le « oui » remportait 35% des intentions de vote, contre seulement 18% pour le « non ».

La campagne des « nonistes »

Le « non » a un visage en Irlande : celui, très séduisant, de Mary Lou Mac Donald qui dirige la campagne européenne pour le Sinn Fein, le seul parti représenté au Parlement, qui appelle à rejeter le traité de Lisbonne. Le Sinn Fein, qui n’a que 4 députés sur 166 à la Chambre, exige des garanties pour que l’Irlande ne perde ni sa neutralité militaire ni ce taux d’imposition extrêmement bas qui a rendu l’Irlande très attractive pour de nombreuses entreprises européennes.

Pour Mary Lou Mac Donald, le traité est renégociable. A Bruxelles, José Manuel Barroso a pourtant été très clair : « Il n’y a pas de plan B et le « non » irlandais n’entraînera pas une nouvelle renégociation du Traité constitutionnel ». Une autre raison qui incite les Irlandais à voter « non » ou à ne pas voter du tout, c’est la méconnaissance du texte. Ils ne sont pas plus de  5 % à prétendre comprendre le traité. Un boulevard pour les « nonistes » qui clament sur leurs affiches : « Le traité de Lisbonne va vous coûter cher ».  

Les Irlandais ont déjà dit « non » une fois en 2001 au Traité de Nice parce qu’ils craignaient que leur « neutralité » soit affectée par le traité. Un an plus tard,  ils retournaient aux urnes pour voter « oui ». 

Brian Cowen en première ligne

« Il n'y a rien à craindre dans ce traité », affirme de son côté Brian Cowen qui dénonce une campagne basée sur la peur. Le Premier ministre irlandais, au pouvoir depuis un mois, hausse le ton. Il a déjà vécu la déroute du Traité de Nice lorsqu’il était ministre des Affaires étrangères. Depuis un mois, il fait campagne activement  pour arracher un « oui » à ses concitoyens. Il entraîne derrière lui presque tous les partis et tout le Parlement, même le principal syndicat des agriculteurs vient de  rallier le camp du « oui ».

Le « tigre » s’essouffle

La crise américaine a frappé l’Irlande plus que les autres pays européens. 20% des exportations irlandaises sont destinées aux Etats-Unis et l'Amérique est le premier investisseur en Irlande.

La croissance irlandaise s’est brisée en deux. Elle atteindra  probablement en 2008 entre 2 et 2,5% alors qu’elle était de 5,3% en 2007. Le « tigre celtique » est secoué par une crise politique : le départ précipité pour cause de scandale financier du Premier ministre Bertie Ahern, une crise immobilière et une  crise de confiance des consommateurs : au plus bas depuis 12 ans. Les bienfaits de l’Union européenne paraissent bien loin. 

« L'Europe nous a aidés à croître, elle pourra également nous aider à affronter la crise », déclare pragmatique Brian Cowen. « Voter +oui+ nous permet de nous servir de l'Union européenne pour traverser ces temps difficiles ».

La spécificité irlandaise

L’Irlande est le seul pays européen à être tenu, par sa Constitution, à organiser un vote populaire pour approuver le traité de Lisbonne.

Les autres empruntent la voie parlementaire. 14 pays sur 27 ont déjà ratifié le texte.


Peu importe les arguments,  le « oui » est attendu par les dirigeants européens comme une bouffée d’oxygène parce qu’il permettrait la  ratification du Traité de Lisbonne et son entrée en vigueur dès 2009. Le « non » repousserait l’échéance alors que l’Union européenne peine à fonctionner à 27 sur la base du Traité de Nice. Les Irlandais pourraient être contraints à voter une seconde fois  ou à renégocier leur appartenance à l’Union européenne.

A écouter

Traité Europe / Irlande

« Les pays européens ont tous choisi de faire adopter le traité par voix référendaire, suite au double NON franco-néerlandais au traité constitutionnel. Ils sont donc suspendus avec appréhension au référendum irlandais ».

06/06/2008 par Pierre Benazet

Alan Dukes, président de l’Alliance française de Dublin

Directeur de l'Institut des affaires européennes en Irlande

« Ce sondage a mis en avant les raisons pour lesquelles les Irlandais ont décidé de voter non et 30 % de ces gens disent c’est parce qu’ils ne comprennent pas ce qu’il y a dans le traité… ».

06/06/2008