par Laurent Correau
Article publié le 18/08/2008 Dernière mise à jour le 18/08/2008 à 15:33 TU
Chassé de N’Djamena le 7 juin 82, Goukouni Weddeye se réfugie au Cameroun, puis en Algérie. Il a décidé d’abandonner la scène publique. Le président algérien Chadli Bendjedid le convainc pourtant de reprendre contact avec la Libye. La lutte armée est relancée sous la bannière du GUNT, et sous la direction du général Négué Djogo, qui réorganise une nouvelle force rebelle. De juin à août 83, plusieurs villes importantes tombent puis sont reprises. Les combattants rebelles entrent à Fada, Arada, Abéché…
En 1986 de nouvelles difficultés entre les FAP et le CDR, deux composantes du GUNT, contribuent à un renversement d’alliances historique : Les FAP (de Goukouni) vont désormais combattre aux côtés des FANT (du régime d’Hissène Habré) contre les Libyens. FAP et FANT enchaînent une série de victoires militaires contre les forces libyennes.
Goukouni Weddeye, qui est en résidence surveillée à Tripoli, ne donne qu’après coup son accord pour ces contacts. Il le fait sur l’antenne de RFI dans une interview du 17 octobre 1986. Le 30, la sécurité libyenne le fait –dit-il- tomber dans un traquenard. Il est blessé et hospitalisé.
Certains disent qu’après votre départ de N’Djamena ce 7 juin 82 vous avez été tenté d’abandonner le combat politique… Vous souvenez-vous de l’état d’esprit dans lequel vous étiez ? Pourquoi reprenez-vous finalement la lutte ? Avez-vous été convaincu par Kadhafi ?
Effectivement, j’ai quitté N’Djamena ce 7 juin 1982 avec beaucoup de remords pour tous ceux qui étaient tombés en martyrs à cause de moi. Aussi, j’avais la ferme détermination de ne plus revenir dans un système politique quelconque. Si le GUNT tombait, c’était à cause de nos propres calculs et de nos propres contradictions mais ce n’est pas par la force militaire des FAN et c’est pourquoi j’étais vraiment décidé à ne plus travailler avec les mêmes personnes. Beaucoup de nous avaient non seulement refusé de combattre les FAN mais ils pensaient que la chute du GUNT leur apporterait le bonheur de se retrouver dans un nouveau gouvernement avec la bénédiction de la Libye…Ils pensaient qu’une fois le GUNT « réactionnaire » tombé, la Libye viendrait à leur secours pour reprendre les choses en main.
Si j’ai repris la lutte c’est grâce à Chadli Bendjedid. La Libye a tenté plusieurs fois de me convaincre, mais j’ai répondu par un refus catégorique… jusqu’à même m’envoyer ici en Algérie le camarade Adoum Togoï pour me convaincre d’aller en Libye, mais j’ai refusé…
Le colonel Kadhafi était venu en visite de travail à Alger. Qu’est-ce qu’ils se sont dits avec Chadli Bendjedid, cela je ne le sais pas. Après son départ, le président Chadli m’a rencontré, il m’a dit qu’ils avaient discuté avec Kadhafi et que Kadhafi voulait me rencontrer mais qu’à la dernière minute il avait appris que j’étais un peu loin de la ville (en ce temps je me trouvais à 180 kms, dans la région de Tizi Ozou). Donc il m’a conseillé de voir le guide en me disant qu’au retour, si j’avais besoin d’aide, il n’hésiterait pas à me l’apporter s’il y avait des pistes d’atterrissage sûres. C’est ainsi que pour ne pas dire non au président Chadli, je suis parti en Libye, j’ai rencontré le colonel Kadhafi et petit à petit, je suis à nouveau rentré dans ce pétrin. Je dis « pétrin » car, malgré mon retour, les contradictions du GUNT n’ont pas été résolues. Les mêmes personnes sont là, les mêmes contradictions ont ressurgi avec plus d’acuité, sapant la cohésion des forces et freinant l’activité du GUNT.
Après avoir transité par le Cameroun, vous êtes effectivement parti pour l’Algérie. Vous y publiez un communiqué le 7 juillet, et le 26 septembre s’ouvre une rencontre de trois jours des tendances qui restent opposées à Habré. Pourquoi l’Algérie ?
J’ai choisi l’Algérie à cause de l’estime que j’avais pour la révolution algérienne qui avait su arracher le pouvoir aux mains de colons décidés à garder le pays pour eux. A l’époque la révolution algérienne était un modèle, une référence pour tous les révolutionnaires. C’est pour cette raison que j’ai dit : « il faut que je vienne passer, au moins, le reste de ma vie dans ce pays ».
Quelles vont être les étapes de la relance de la lutte ? Y a-t-il d’autres rencontres que celle d’Alger qui consacrent la relance de la lutte ?
Vers mi-juillet 1982, Issa Abdallah, Secrétaire général du CNR (Conseil National de la Révolution) et Dr Facho Balam de l’UND (Union Nationale Démocratique) sont venus de Libye me trouver à Alger. Ils étaient en quête de légitimité ; chose que je n’aurais pas manquer de leur offrir si cela n’avait relevé que de ma compétence. Leur séjour a été sanctionné par un communiqué annonçant la création d’une alliance des forces démocratiques qui serait désormais le seul représentant légitime de l’opposition tchadienne.
Pour ma part, j’ai rejeté par un communiqué de presse la responsabilité de l’échec du GUNT sur les forces neutres… tout en mentionnant le manque de solidarité au sein des composantes du GUNT. J’ai lancé, également, un appel à toutes les forces patriotiques pour qu’elles s’organisent autour des principes énoncés dans la déclaration de N’Djamena du 8 mai 1982, afin de relancer la lutte contre les usurpateurs FAN.
Après ma rencontre avec le colonel Kadhafi, je suis revenu à Alger. Ensuite, nous avons tenu une réunion avec presque l’ensemble de l’opposition tchadienne, c’est-à-dire avec les représentants des FAP, des CDR, de la première armée, du Volcan, etc… Au cours de cette rencontre des divergences surgissent avec Mahamat Abba de la première armée. Par contre toutes les autres factions se sont entendus pour former un gouvernement et relancer la lutte armée. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés à nouveau à Sebha en Libye pour créer le Gouvernement du Salut National.
Est-il vrai qu’à Alger, il y a eu beaucoup de conflits entre les tendances qui ont participé à la réunion ?
Oui, nous avons longuement discuté, et au cours de nos discussions la 1ère armée et le Volcan ont claqué la porte. En revanche, les autres se sont entendus pour lancer un appel dénommé « Appel d’Alger » et c’est à la suite de cet appel que nous nous sommes donné rendez-vous pour nous retrouver en Libye et former le Gouvernement du Salut National.
A partir du mois de septembre 82, il semble que certains de vos partisans vont dans l’Etat de Bornou, au Nigeria et dans le Nord Cameroun pour recruter des réfugiés tchadiens. Ces futurs combattants transitent par Cotonou d’où ils rejoignent les « bases arrières en Libye »… Cette filière de recrutement de combattants avait-elle déjà été utilisée jusqu’ici ? Qui a eu l’idée de la mettre en place ? Combien de combattants a-t-elle permis de recruter ?
Cette filière du recrutement n’avait pas été utilisée autrefois. Nous avons simplement choisi le Bénin à cause de sa position politique et de ses relations avec la Libye et le GUNT. Nos partisans ou combattants qui ont transité par Cotonou peuvent atteindre plus de quatre mille hommes, femmes et enfants.
Comment qualifieriez-vous la place prise par les Libyens pendant cette période ? Avez-vous le sentiment que dans les combats qui reprennent en 82 vous restez maître des opérations ? Comment d’ailleurs a évolué le contrôle des Libyens sur la direction de vos opérations militaires depuis le début de leur soutien : s’est-il accru ?
J’avais le plein sentiment de rester maître de nos opérations. Les Libyens n’ont jamais pris la direction de nos opérations militaires. Le chef d’état-major général de l’ANL 1 était seul habilité à planifier et conduire les opérations sur le front.
Les Libyens nous apportaient la logistique, c’est-à-dire nos besoins pour la réussite des opérations. Aussi en ce qui concerne l’armement, le chef d’état-major discutait avec eux. Des fois on les informait des opérations, des fois la Libye elle-même suggèrait « au lieu de rester comme ça, faîtes quelque chose » mais ils n’ont jamais dirigé des opérations sur le terrain ni recommandé ou forcé de faire cela ou de ne pas faire cela. Nous étions toujours maîtres de nos activités militaires et politiques.
Les auteurs américains Millard Burr et Collins rapportent que la Libye, dès les premières réunions à Bardaï en 82, vous impose Ahmad Ibrahim, un véritable propagandiste du livre vert qui tente de vous convaincre de « ce qui est bon pour le Tchad »… Est-ce correct ? Quelle a été l’attitude de cet homme ? Quelle a été sa place ?
Durant tout le temps que j’ai vécu en Libye, elle ne m’a jamais imposé quelque chose contre ma volonté. Lors d’une rencontre, le Guide de la révolution m’a proposé Ahmat Brahim pour nous aider dans le domaine politique. Ahmat était chargé de superviser la formation des cadres pour le livre vert. Il était proche parent du Guide.
A cause de cela, il croyait tout connaître et être capable de tout faire. Il était arrogant, hautain et même impoli. J’ai compris au fil des jours qu’il avait une idée préconçue pour rattacher l’administration des zones libérées à Benghazi et à Sebha par l’intermédiaire des agents initiés au livre vert. On avait envoyé des cadres pour se former au livre vert, et il leur donnait des idées pour qu’arrivés sur le terrain, ils gardent leurs attaches avec lui, avec la Libye plutôt que de se mettre au service du GUNT. Lorsqu’il a compris que nous avions vu clair dans son jeu et contrecarré ses activités, il s’est abstenu de lui-même de s’impliquer dans nos affaires internes, mais il n’a pas du tout cessé de saborder -en quelque sorte- la cohésion des composantes du GUNT… puisqu’il était né au Tchad, au Kanem. Il y avait un autre proche du colonel Kadhafi, né aussi au Kanem. Ces deux personnalités étaient proches de Khadafi et en même temps chargées des comités révolutionnaires. Elles penchaient du côté des originaires du Kanem qui étaient dans le GUNT pour les inciter à faire éclater les FAP. Ils jouaient à ce jeu mais ils n’ont pas pu réussir. D’ailleurs à un moment donné, au début de notre rencontre à Tripoli, ils ont même pu convaincre Moussa Medela en lui proposant monts et merveilles, avec des armes. Ils se sont entendus avec Moussa : « Quitte le GUNT, va créer une force au Nord Kanem, jusqu’à 5000 hommes nous allons vous équiper ». Moussa a pris les moyens, il est parti. Il a juré de retourner en Libye. Donc leur jeu les Tchadiens le connaissent.
Qu’est-ce qui vous a poussé à accepter Ahmat Ibrahim dans vos rangs ?
Tous les jours nous ne pouvions pas rencontrer Kadhafi parce que pour rencontrer Kadhafi, il fallait passer par des canaux précis. A chaque fois que l’on avait besoin de quelque chose, il fallait que l’on se réfère à quelqu’un qui puisse nous trouver une solution le plus vite possible… c’est pourquoi dans le domaine militaire, Kadhafi nous proposait un responsable militaire, la plupart du temps c’était le colonel Messaoud, ensuite Khafi, soit un autre officier… Dans le domaine politique, c’était le ministre des affaires étrangères le docteur Triki. Je crois qu’il (Muhammar Kadhafi) nous a proposé Ahmat Brahim dans le domaine idéologique. Nous avons accepté parce que nous avons pensé au début que cette personne allait sincèrement nous aider, c’est dans cet esprit que nous avons accepté, mais au fil du temps nous avons vu qu’il était beaucoup plus nuisible que nécessaire, donc nous l’avons mis en disgrâce et il s’est reculé lui-même.
Est-ce que d’une certaine manière vous pensiez que dans le livre vert il y avait de bonnes choses à prendre pour construire le nouveau Tchad ?
Non, pas seulement ça. Nous dépendions entièrement de la Libye tant sur le plan militaire que politique. Nous combattions un régime en place, nous n’avions pas d’autre soutien à l’extérieur, on était entièrement dépendants de la Libye, donc la Libye en contrepartie visait indubitablement quelque chose. La Libye n’aidait pas les mouvements révolutionnaires à travers le monde pour leurs beaux yeux.
Je profite de parler avec vous de cet engagement libyen pour faire le point sur l’évolution du soutien militaire libyen du milieu des années 70 au milieu des années 80 ? Quelles ont été les étapes de cet engagement ?
En 1970, Le Président François Tombalbaye autorise les opposants libyens de Guet Mizid, ancien gouverneur de Sebha, à ouvrir des camps et à recruter des combattants. En réplique, la Libye expulse tous les Tchadiens et facilite le recrutement des combattants au FROLINAT. Elle ratisse tous les Tchadiens en Libye. Elle les amène à un camp de regroupement et demande au comité du FROLINAT de venir sélectionner ses partisans. Les responsables du FROLINAT les prennent pour nous les envoyer à Wouri ; c’est pourquoi nous avons eu l’idée de créer le quartier général d’Adgoura dans l’Enneri Oyouroum. Ceux qui refusent de s’intégrer dans la révolution seront expulsés directement au Tchad. La Libye apporte une aide militaire en petite quantité à la 2e armée. Elle prend en charge la formation des combattants.
De 1971 à 1976, la Libye a formé les combattants et a apporté une aide conséquente à la 1ère armée mais la plus grande partie fut récupérée par l’armée tchadienne lors des combats d’Amdjaress. La 2e armée est en rupture pendant cette période avec la direction du FROLINAT, donc avec la Libye. En 1976, la Libye laisse en disgrâce le Secrétaire Général du FROLINAT qui refuse d’accepter la paix qu’elle propose.
La Libye tend la main vers les autres mouvements du FROLINAT à savoir Volcan et la 2e armée. Elle offre à la 2e armée un don en vivres et une cinquantaine de Kalachnikov… et propose la formation des infirmiers, des opérateurs. Après l’incident d’Omchi, la formation des infirmiers et des opérateurs fut interrompue. La Libye apporte une aide militaire au Volcan. Le Leader du Volcan décède dans un accident de route. En 1977, donc, la Libye commence à former nos combattants aux maniements d’armes à Waou, au sud, à trois cent cinquante kilomètres de Sebha. Les instructeurs sont des soldats toubous de l’armée libyenne. Ils apprennent à nos combattants les armes légères, les mortiers 82 mm, les RPG 7 (bazooka), les mitrailleuses légères, les grenades etc.
Après la libération de la sous-préfecture du Tibesti dans son ensemble et du poste de Kirdimi au Borkou, les Libyens augmentent les livraisons d’armes, y compris des mitrailleuses lourdes 14,5 mm, des canons 106 mm, des SPJ9 (sorte de canon mais plus petit que 106), des 12,7 mm, des SAM-7 avec des lanceurs libyens pour apprendre le tir à nos combattants. Ils ouvrent des camps pour le regroupement et la formation de nos combattants en Libye.
Le dernier jour du siège de Faya, le lieutenant colonel Messaoud est venu nous donner un coup de pouce que nous baptisons ‘’l’opération gratis’’. Pendant quelques heures, les Libyens nous ont aidé à bombarder les positions tenues par les forces gouvernementales dans la ville de Faya. Ils ont lancé des rafales de roquettes de BM 21 (orgues de Staline dernière version) et de mortiers 120. Les éléments en question sont immédiatement retournés le surlendemain de la victoire de Faya.
A la suite de l’échec des accords de Sebha Benghazi, des éléments libyens chargés de la logistique se sont installés à l’aéroport de Faya : une compagnie à la piste d’aviation de Zouar ainsi que six tireurs de SAM7 à Salal. Ces mêmes éléments ont contribué à l’éclatement du FROLINAT unifié. A partir de l’aéroport, ils ont armé, entraîné et soutenu par leur artillerie une partie de nos combattants à attaquer la ville contre les FAP.
En conséquence, le Conseil de la Révolution décide le rapatriement de tous les contingents libyens du BET, y compris les tireurs de SAM 7. Les Libyens suspendent leur aide au FROLINAT. Quelque temps après, ils apportent leur soutien à Acyl Ahmat et Mahamat Abba pour leur permettre de regrouper leurs combattants, les équiper et avec le soutien de leurs forces les envoyer à l’intérieur du pays.
En 1980, lors des batailles de N’Djamena avec les FAN, les Libyens ont répondu positivement à ma demande. Ils ont commencé à nous envoyer par camions et même parfois nous larguer des munitions par avion aux environs de Massakory. Il y avait un élément de soutien à Douguia, à quatre-vingts kilomètres au nord ouest de N’Djamena, où nous avions construit une piste d’atterrissage, puis à Am-Sinéné à coté de Farcha. Enfin, la Libye s’est engagée avec toutes ses forces pour nous aider à mettre un terme à la résistance armée que nous livraient les FAN à N’Djamena et à l’intérieur du pays.
Les avions libyens ne pouvaient pas venir jusqu’à l’aéroport de N’Djamena, puisque nous étions en guerre. C’est pour cette raison que nous avons créé dans un premier temps une piste d’atterrissage à Douguia. Les avions libyens nous apportaient de la logistique. Ensuite, ils se sont aperçus que les gros porteurs, les gros avions libyens ne pouvaient pas facilement atterir là-bas, à Douguia… et puis aussi le problème de la sécurité se posait : les combattants étaient en guerre à N’Djamena, Douguia était isolée à 80 kms au nord de N’Djamena… C’est pour cette raison que nous avons construit une autre piste plus large à Am-Sinéné, pour la logistique : les vivres, les munitions et même leurs troupes arrivaient par là en dehors de ceux qui venaient par transport terrestre.
En 1981, le GUNT décide le retrait de toutes les troupes libyennes du Tchad.
De 1983 à 1986, la Libye a apporté une aide militaire non négligeable au GUNT, avec l’armement, la logistique. la Libye a beaucoup dépensé dans ce domaine pour qu’on puisse s’organiser et aller prendre Faya-Largeau en 83. Après, les FAN sont venues nous chasser de Faya et la Libye a encore déployé tous ses moyens en chars et en engins blindés et autres pour venir à notre secours… même l’aviation a été pleinement engagée un certain temps pour piloner les FAN à Faya, donc on a pu reprendre Faya. Elle a beaucoup investi dans ce domaine.
Avez-vous disposé dans ces années 80 d’armement et de moyens logistiques plus importants qu’à la fin des années 70 ?
C’est sans comparaison en hommes et en matériels. L’aide que la Libye apporte au FROLINAT pluriel ou au GUNT dans les années 80 est beaucoup plus importante que celles des années 70.
Pouvez-vous me parler de la légion islamique, de ce qu’elle est, du type de recrues qu’elle a eues et du rôle qu’elle a joué dans la guerre du Tchad pendant ces années 80 ?
Personnellement, je ne connais rien sur la légion islamique, j’en entends souvent parler par les médias seulement. Je n’ai jamais vu une force constituée composée de la légion islamique pendant que je voyais les forces libyennes. Donc sur ce point, il n’y a jamais eu de « légion islamique ». Peut-être à un moment donné, au début, les libyens ont été tentés de regrouper des forces disparates de différentes nations, c’est possible, mais nous sur le terrain nous ne l’avons jamais vue.
Cette force-là n’est jamais venue à vos côtés ?
Non, non, jamais chez nous.
Vous avez tout de même entendu ce nom de légion islamique dans les rangs libyens ?
On écoutait quotidiennement à l’époque RFI, donc c’est à travers RFI que nous entendions tout cela, mais sur le terrain nous ne l’avons jamais vue.
Le 23 juin 83, les forces du GUNT, sous le commandement du général Djogo, attaquent Faya-Largeau… Le 8 juillet, le GUNT conquiert Arada. Le 9, il est dans Abéché 2. Et puis c’est la contre-offensive : Djogo et ses hommes doivent abandonner leurs positions. A la suite de cette retraite, d’après les auteurs Millard Burr et Collins, les Libyens font tomber le général Negue Djogo en disgrâce, et le remplacent par le colonel libyen Al-Khafi aidé par le colonel Abd al-Hafiz Messaoud… Pouvez-vous le confirmer, et vous souvenez-vous de la façon dont ce dessaisissement a eu lieu ?
Le 23 juin, les forces du GUNT attaquent Faya-Largeau sur deux fronts à l’est et à l’ouest. Les forces venant de l’est sont dirigées par Mahamat yaya Dagache et celles de l’ouest par le général Djibril Negué Djogo. L’ensemble des opérations est planifié et ordonné par le Général Négué Djogo chef d’état major général de l’ANL et se déroule sous son commandement.
Après avoir stabilisé Faya, l’état major ouvre deux fronts : l’un sous le commandement de Mahamat Yaya Dagache avec pour objectif d’occuper Fada et Oum-Chalouba et l’autre sous le commandement de Moussa Sougui pour se diriger sur Koro-Toro avec comme objectif Kouban Olanga et Salal. Après quoi, la deuxième étape sera précisée. Puisque une fois Oum-Chalouba pris, Salal pris, à ce moment, nous allons étudier comment nos forces vont évoluer sur N’Djamena.
Les forces conduites par Moussa Sougui sont stoppées avant d’atteindre Koro-Toro par manque d’essence. Elles avaient des citernes d’essence mais le matin, en utilisant le carburant, elles se sont aperçues que c’était du gasoil. Donc les véhicules sont tous à plat. Pour ce qui est des forces qui sont à Oum-Chalouba, Mahamat Yaya Dagache laisse les combattants sous la responsabilité d’un des responsables de ces groupements. Lui, il part à Gouro pour fêter l’aïd-el-kébir. Le responsable intérimaire apprend qu’Arada est vide, complètement vide. Il nous informe. Sur notre ordre, il part non seulement occuper Arada mais dans la foulée, il occupe aussi Biltine et Abéché sans combat.
Pendant ce temps, Djogo et moi nous nous trouvons à Sebha. Nous partons pour Faya. Le général Djogo, avec quelques journalistes français continue par avion sur Abéché. Il est contraint de revenir atterrir à Faya car l’aéroport d’Abéché est bloqué, ils ont mis des fûts pour empêcher l’atterissage de l’avion.
Le lendemain, nous avons appris par la radio la reprise d’Abéché par les FANT, appuyées des mercenaires français. Nos combattants se sont repliés avec beaucoup de pertes humaines et matérielles sur Fada. Ce n’est qu’après que le général Djogo se rend sur leurs positions pour remonter le moral.
A-t-il été mis en disgrâce, ce général Djogo ?
Non, pas du tout, le général Djogo n’a pas été mis en disgrâce à la suite de ces évènements. Il n’a pas participé aux combats d’Abéché. C’est d’ailleurs lui qui a repris Oum-Chalouba avec les combattants repliés d’Abéché, le 10 août, le jour où nous avons réoccupé Faya après notre débâcle du 30 juillet.
Donc vous démentez que le général Djogo ait été à un moment donné remplacé par Al Khafi et le colonel Abd al Afiz Messaoud après ces reculs militaires ?
Non, non, pas du tout, il n’a pas été mis en disgrâce et remplacé par un officier libyen.
Ces mêmes auteurs américains Millard Burr et Collins affirment que face à l’échec de ses hommes à reprendre l’initiative, Kadhafi aurait lui-même pris le commandement des opérations pendant quelques jours… Est-ce vrai ? Vous souvenez-vous de cet épisode ?
Après Abéché, un élément équivalent d’une compagnie renforcée commandé par le Lieutenant colonel Ali Daouki est venu s’installer à l’aéroport dans le cadre d’un soutien logistique, purement d’un soutien logistique. Il a amené une quinzaine d’autos mitrailleuses de fabrication brésilienne, avec un seul tireur pour former nos combattants. Il disposait aussi de cinq pièces de canon 122 mm et d’un petit avion de reconnaissance.
Le Lieutenant colonel Ali Daouki venait à peine d’être arrivé à Faya que les FAN attaquent… avant même qu’il ait pu entreprendre l’utilisation des autos mitrailleuses brésiliennes. Elles occupent Faya en nous infligeant des pertes humaines considérables. Après notre défaite, la Libye a déployé des forces blindées et aériennes pour nous aider à reprendre Faya. J’ai communiqué à deux reprises avec le colonel Khadafi, une première fois entre Gouro et Faya, une deuxième fois le jour de la reprise de Faya. J’étais rentré sur l’aéroport avec l’officier qui dirigeait les opérations à l’aéroport. En arrivant, sur place, ce même officier a téléphoné au colonel Kadhafi pour dire que nous avions occupé l’aéroport de Faya et m’a passé le téléphone, donc Khadhafi m’a félicité, il m’a dit : « Vous avez reconquis votre ville donc c’est une bonne chose. » Il m’a félicité et m’a promis de ne pas manquer à son soutien politique et militaire. A cette période, il se peut que le Guide ait joué un rôle déterminant pour mobiliser ses forces car dans l’espace d’une semaine, des divisions blindées entières ont été larguées à cinquante kilomètres à l’est de Faya. C’était vraiment fantastique quand on voit ce qui s’est passé. Donc à ce moment, je sais très bien que je lui ai envoyé un émissaire, mon émissaire l’a trouvé à Sebha… Il n’était pas à Tripoli. Il se peut qu’avec ses hommes il était en contact direct, c’est possible.
Quelle a été pendant ces années de lutte et notamment là, au début des années 80, la part de « combattants étrangers », ni tchadiens, ni libyens… Quelle était la nationalité de ceux qui sont venus vous appuyer ?
Dans nos unités, il n’y avait pas de combattants étrangers. Le cas des éléments soudanais est un autre sujet. Le Soudan aidait le pouvoir de N’Djamena. Au GUNT, nous avions conclu une alliance non écrite avec Abdallah Zakaria, un opposant soudanais vivant en Libye. C’est ainsi que ce dernier avait mis à notre disposition un élément d’une centaine de combattants. Les mêmes combattants ont été capturés par les FANT aux combats d’Oum-Chalouba.
A quel moment, y-a-t-il eu des soldats libyens sur vos positions pendant ces années 80 ?
Après que nous avons rapatrié tous les éléments libyens se trouvant au BET lors des évènements de Faya en 1978 et ensuite après les combats de 9 mois à N’Djamena, il n’y a pas eu de présence libyenne de notre côté au Tchad. Après la défaîte d’Abéché, un premier élément de soutien logistique conduit, comme je le disais tout à l’heure, par le commandant ou le lieutenant colonel Ali Daouki, était venu à Faya s’installer à l’aéroport et disposait d’une compagnie de 150 soldats 5 pièces de canon 122mm, un petit avion de reconnaissance et je crois 17 ou 10 Cascavel, que j’ai cités tout à l’heure. Il ne disposait que de cela seulement. Après la prise de Faya par les FAN, les libyens ont déployé une force importante pour la reprise de Faya 3.
Est-ce que après la reprise de Faya les libyens restent au Nord du Tchad ?
Les Libyens après la reprise de Faya, sont restés à Faya, à Ounianga-Kebir, à Zouar aussi. Ils n’ont jamais participé aux combats. Je me souviens très bien de nos combats de 86 à Oum-Chalouba, j’ai même imploré pour demander des BM 21, des orgues de Staline, comme soutien à notre force pour piloner les FAN, mais ils ont refusé de partir avec nos combattants. Ils ont refusé. Donc ils ne sortaient pas au delà de Fada et de Faya-Largeau qu’ils occupaient.
Pendant ces années 80 (et même avant…) avez-vous eu des débats entre responsables des FAP sur le soutien Libyen et les contreparties qu’il vous imposait ? Quel a été le contenu de ces débats ? Quelle a été la position que vous avez soutenue ?
Nous considérions l’aide qu’apportait la Libye au FROLINAT comme une aide désintéressée. Ca, c ‘était notre sentiment à nous… ce que les autres pensaient, ce que la Libye pensait, nous ne le connaissons pas. Donc cette aide ne nécessitait pas de débats en notre sein. En 1978, avant l’attaque d’Ati par les forces d’Acyl Ahmat, nous avons eu à discuter en réunion du Conseil de la Révolution sur une proposition faite par ce dernier. Elle consistait à prendre en compte le livre vert pour bénéficier une aide accrue de la Libye. Le conseil a rejeté en bloc la proposition.Tout le long de notre collaboration avec les amis libyens, l’affaire d’Aozou a constitué un hic qui entravait souvent la bonne entente entre les Libyens et les Tchadiens de l’opposition.
Où êtes vous personnellement pendant ces années 82 à 90 ? A quel moment êtes vous dans le Tibesti, à quel moment en Libye, et dans quels endroits en Libye et dans le Tibesti ?
Des années 82 à 90, je me trouve, la plupart de temps, à Faya ou à Bardaï sinon en Libye à Sebha ou Tripoli rarement à Benghazi ou Koufra, je ne suis pas parti ailleurs.
Effectuez-vous des séjours dans d’autres pays pendant ces années 82 à 90, quels pays, pour quelles raisons ?
Parfois, je voyage également vers Alger, Brazzaville, Cotonou, Bamako, Lagos, Lomé, Yaoundé. J’ai même été en transit à Paris ou Bagdad. Cela se limite certainement à ces pays.
Le 17 octobre 86, vous êtes interpellé par les Libyens à Tripoli et assigné à résidence. Quelle est à l’époque votre marge de manœuvre à Tripoli ? Comment expliquez-vous ces mesures libyennes ?
Les Libyens avaient une idée déjà arrêtée sur moi. Ils étaient convaincus qu’avec moi, ils n’obtiendraient pas de concession à mon objectif de libérer le pays. Ils voulaient, selon ma conviction, me faire supplanter par un homme dévoué à leur cause qui aurait garanti ce dont ils avaient besoin. La crise qui couvait depuis longtemps en sourdine a éclaté au grand jour.
C’est pendant cette période de résidence surveillée que les chefs militaires des FAP vont engager des discussions avec des représentants d’Habré. Que savez-vous de ces discussions qui ont conduit au ralliement des FAP aux FANT ?
Toutes les forces du GUNT étaient basées à Fada… Après plusieurs tentatives pour prendre Kalaït, toutes les forces s’étaient repliées à Fada. Un jour, le chef part en mission, il laisse la responsabilité des troupes à un responsable du CDR. A Fada, les éléments du CDR qui sont dans le GUNT se sont entendus avec les Libyens. Certains de nos combattants qui dormaient dans leur emplacement ont été éliminés par leurs camarades du CDR. Ils ont pris possession des armes lourdes, ils ont pris le contrôle de toute la situation 4.
Nos éléments ont donc été chassés de Fada et se sont regroupés en dehors de Fada. J’ai été informé par les libyens à Tripoli.
J’ai envoyé Adoum Togoï à la tête d’une délégation à Fada pour régler la crise au sein de nos combattants. Arrivé sur place, il s’est aperçu que les amis Libyens avaient une façon de voir le règlement de la crise… qui n’avantageait pas du tout le GUNT ! Alors, le contact a été interrompu entre les Libyens et Adoum. Ce dernier est entré en contact avec les FANT… d’où l’acharnement des Libyens contre moi à Tripoli à cette époque.
Donc les contacts avec les FANT précèdent les problèmes que vous allez rencontrer à Tripoli ?
Effectivement, c’est à cause de ça que j’ai eu des problèmes. Adoum était sur le terrain, moi j’étais en Libye. Les Libyens écoutaient certainement les communications entre N’Djamena et nos gens avec Adoum Togoï.
Nous, nous ne savions pas que Adoum avait déjà pris contact avec les FANT, en quelque sorte on dirait même… que Adoum nous a trahi… il n’aurait pas dû se précipiter comme ça pour entrer en contact avec les FANT. Dans tous les cas, ça s’est passé et nous, nous en avons payé le prix.
Est-ce que vous avez le sentiment qu’après le ralliement des FAP aux FANT, la Libye mise sur Acheikh Ibn Oumar et décide de vous laisser sur le côté ?
Personnellement, ce que je sais, c’est que presque deux semaines avant les événements de Fada, le colonel Kadhafi avait demandé à rencontrer toute l’opposition de la coalition GUNT. Nous sommes allés le voir à Sebha. Lors de nos discussions avec le colonel Kadhafi, Acheikh Ibn Oumar et Mahamat Abba ont adopté une position contraire aux autres. Le deuxième jour de notre rencontre, Acheikh Ibn Oumar a carrément refusé de venir. Mahamat Abba, lui aussi avait une position tranchée. Par contre, les autres tendances de la coalition se sont entendues pour travailler main dans la main. On a quitté Sebha pour aller à Tripoli, mais Acheikh est resté sur place. Personnellement, je pense qu’après notre départ Acheikh Ibn Oumar a certainement rencontré Kadhafi, ils ont décidé de notre sort.
C’est à partir de là qu’Acheikh a envoyé deux de ses responsables à Koufra : l’un s’appelle Azrag, sous-préfet de Fada ; le deuxième Soumaïne Alamine, un chef militaire. Ces deux collaborateurs d’Acheikh Ibn Oumar, porteurs d’une lettre, sont arrivés à Koufra. De Koufra, un responsable Libyen les a embarqués sur Fada. La lettre était destinée au chef militaire issu du CDR se trouvant à Fada qui coordonnait les activités. Mahamat Yaya Dagache avait laissé l’intérim à Massaoud Dressa. Dagache se trouvait en Libye. C’est Massaoud Dressa qui était le chef de toutes nos forces. Il s’est entendu avec l’officier Libyen en place, puisqu’à l’époque nos combattants n’avaient pratiquement rien comme essence avec leur véhicule. L’officier en question a servi discrètement de l’essence à Massaoud Dressa, des munitions, ils ont préparé le coup sur Fada contre les autres combattants.
Le troisième jour, je crois, de l’arrivée de ces deux émissaires les combattants du CDR ont attaqué toutes les positions tenues par nos hommes… ils cohabitaient ensemble. Ils ont tué ceux qui étaient endormis sur leur emplacement. Lorsque les combats ont été déclenchés, les autres ont fui dans toutes les directions, puisque les véhicules ne fonctionnaient pas. C’est ainsi qu’ils ont récupéré toutes les armes lourdes. Le reste des combattants est sorti de Fada pour se regrouper à l’Est… Après cette attaque, les Libyens m’ont informé, j’ai envoyé Adoum Togoï et ce processus a duré jusqu’à la rupture, puisque lors des discussions d’Adoum Togoï avec les militaires libyens, les militaires libyens voulaient maintenir les combattants CDR à Fada… alors que Adoum exigeait leur sortie de Fada, en dehors de la ville… Fada s’est vidée de toute sa population qui s’est retrouvée à l’extérieur de la localité avec les combattants. Les Libyens ont refusé, Adoum Togoï a craqué et c’est à partir de là qu’il a tenté de contacter les FAN.
Parallèlement, ils ont organisé une attaque sur Fada pour reprendre la position par la force 5. Ils ont divisé leur force en deux : une partie dirigée par le chef d’état-major de l’ANL, Adoum Yacoub, et une partie dirigée par Mahamat Yaya Dagache. Mahamat Yaya Dagache est resté à l’Est de Fada. Adoum a quitté la zone pour contourner le massif de l’Ennedi et au bout de 400-500 km venir attaquer par l’Ouest. Ils ont fixé une date, ils ont attaqué. Ils allaient presque prendre la ville quand les Libyens sont intervenus avec presque tout leur armement, leurs chars et les ont repoussés. Voilà ce qui s’est passé.
Après cela, le chef d’état-major Adoum Yacoub s’est replié avec ses forces à un endroit qu’on appelle Enugu. Là, les Libyens ont bombardé sa position avec des avions. Le combat est devenu un face à face avec les Libyens. Adoum a dû se replier et revenir sur son point de départ.
Après la signature de l’accord entre les FANT et nos éléments, les Libyens ont tenté de matter nos forces, mais ils n’ont pas pu. C’est ainsi que nos éléments ont carrément abandonné la zone de Fada pour se replier loin dans le Mourdi à une source qu’on appelle Juna. Ils se sont repliés là-bas. Ils ont même construit une route pour essayer de joindre les forces d’Hissène Habré. Ensemble, ils ont pu libérer Fada quelques mois après.
Vous avez le sentiment qu’après la signature de l’accord de ralliement des FAP aux FAN les Libyens ont décidé d’en finir avec les FAP ?
Effectivement, ils ont senti le danger, donc ils ont combattu au sol et dans les airs… puisqu’ils ont engagé leurs petits avions. Ils avaient des avions bombardier italiens Marchetti. Par terre, ils ont engagé tous leurs chars se trouvant à Fada. Mais nos combattants occupaient des positions montagneuses. Ils ne parvenaient pas facilement à les déloger. Compte-tenu de leur puissance de feu, et comme nos combattants manquaient de munitions, nos combattants ont été obligés de se replier loin de Fada, à peu près 120 km ou plus même. Ils se sont déplacés à Juna. C’est à partir de là que les Libyens ont commencé à attaquer Bardaï, ils ont été repoussés. Une deuxième fois ils ont attaqué Bardaï, Yebbi-Bou, partout… même Zouar… Ils ont attaqué à plusieurs endroits. C’est ainsi qu’ils ont pu occuper Zouar, Bardaï, Zoumouri, Yebbi-Bou. Les Libyens ont pu occuper toutes les positions de nos combattants, mais ils n’ont pas pu tenir longtemps. Entre-temps, les combattants se sont brassés avec les forces d’Hissène Habré, ils sont parvenus à libérer Fada et après Fada ils ont même libéré Zouar et ainsi de suite… et finalement, le combat de Ouadi Doum, c’était le combat ultime, puisque après la défaite des Libyens à Ouadi Doum, ils se sont repliés de Faya pour aller se regrouper aux environs d’Aozou.
A partir de quand est-ce que vous pensez que les Libyens ont décidé de laisser tomber les FAP et de soutenir plus massivement le CDR ?
Vous savez, à un moment, le président en exercice de l’OUA, le président Abdou Diouf et le président Sassou Nguesso nous ont proposé de tenir une conférence à Brazzaville, à Lumumbu. Nous n’avons pas pu participer à cette conférence parce que nous avions auparavant engagé des combats. Lors de ces combats nous avons subi pas mal de défaites. A la suite de ces défaites, nous avons refusé d’aller là-bas en vaincus. C’est pourquoi la Libye, constatant que nous avions subi des défaites, a cherché à me faire remplacer par Adoum Togoï. En ce temps là, Adoum Togoï se trouvait en France. Kadhafi lui a envoyé un avion spécial pour le faire venir à Tripoli… selon ce que Adoum lui-même m’a raconté ! Kadhafi lui a dit « Goukouni a échoué, il faut que toi tu prennes la situation en main. » Adoum a refusé. Lui-même, il m’a dit : « Ce Kadhafi, ce qu’il a l’intention de faire ne nous arrangera pas. Autant qu’on décide de trouver une solution avec N’Djamena plutôt que de croire à une aide libyenne. » Mais moi, j’ai refusé cette idée. Je croyais qu’Adoum nous poussait à aller avec N’Djamena pour le plan dont j’ai parlé auparavant. Lors de son séjour en France il avait été contacté par Idriss Déby, Hassan Djamouss qui était même allé là-bas. Je croyais donc qu’il avait un autre plan et j’ai refusé. Entre-temps, les Libyens nous ont demandé de tous venir à Tripoli. On est venus. A la fin on a constaté qu’ils nous avaient fait venir pour nous éloigner de la zone. Je crois qu’ils se préparaient déjà à prendre Fada et à remettre la localité à des hommes plus dociles qui comprenaient leur langage.
Le 30 octobre 86, des militaires libyens viennent vous chercher dans votre villa. Une fusillade éclate avec votre garde, vous êtes blessé et transféré dans un hôpital de Tripoli. Pouvez-vous nous raconter le souvenir que vous avez de cette soirée ?
Le 17 octobre j’ai déclaré sur l’antenne de RFI que ma maison était cernée par des agents libyens de la sécurité et que mon téléphone serait probablement coupé. Je disais : « Mes hommes se trouvant à l’intérieur savent comment ils peuvent négocier avec les FAN sans condition ». Le lendemain, non seulement le téléphone a été coupé mais aussi la liaison radio avec l’intérieur.
Le 30 octobre 1986, le protocole libyen est venu nous conduire chez le Guide. Il nous a conduits directement à l’hippodrome sur la route de l’aéroport de Tripoli.
A 13 h 30, RFI annonce à notre grande surprise la signature d’un accord entre les FAN avec nos représentants de l’intérieur.
Vers 16 heures, le protocole nous informe que le Guide est dans son jardin, et qu’il va nous ramener au jardin… mais il faut qu’une ou deux personnes seulement restent avec moi. Tout cela cache quelque chose, mais nous ne le savons pas encore. J’avais une dizaine d’éléments de sécurité avec moi plus d’autres cadres (en tout ils étaient plus d’une quinzaine). J’ai pris trois personnes en laissant les autres rentrer à la maison (ils furent directement conduits à la prison à notre insu). Arrivé près du jardin, j’ai compris que c’était un traquenard, c’était un guet-apens. Ce que nous voulions éviter était arrivé. En arrivant près du jardin, j’ai compris que le guide ne devait pas s’y trouver puisque c’est un endroit où il y avait des arbres, il y avait deux villas, mais aucune autre présence des éléments donc j’ai compris que c’était autre chose.
Dans quelles circonstances êtes vous blessé ?
Le supposé chef de protocole voulait nous amener dans cette villa. Nous, nous avons refusé. A la tombée du soleil, j’ai ordonné au chauffeur de nous ramener, de retourner, le chauffeur a pris la clé et s’est évadé, il a rejoint les siens. Nous sommes donc restés sans véhicule car le véhicule était là, mais le chauffeur lui n’était pas là. J’avais trois personnes avec moi, l’un avait dissimulé son pistolet et l’avait gardé avec lui. Il a tiré son pistolet à titre de sommation pour empêcher ceux qui se rapprochaient de nous arrêter. Les Libyens aussi ont commencé à tirer et c’est ainsi que j’ai été blessé. Celui qui avait le pistolet a été tué sur place et les autres ont pu sortir de la zone mais ils ont été rattrapés, l’un a été repris 3 jours après, l’autre 1 mois après.
Selon votre directeur de cabinet de l’époque, Kailan Ahmet, le colonel Kadhafi avait fait installer un poste émetteur à l’hôpital pour que vous puissiez envoyer un appel à vos hommes… Qu’espérait le guide libyen ?
Le 30 novembre, un mois après mon hospitalisation, le Guide est venu me rendre visite à l’hôpital. Nous avons beaucoup parlé. Le lendemain, le colonel commandant de la police militaire et beau frère du Guide m’a demandé si j’étais d’accord pour qu’il me conduise à l’antenne des radios et que je communique avec mes hommes de l’intérieur. Je sais que par ce contact les Libyens visaient leurs propres objectifs. Moi, je voulais faire passer à mes partisans, à travers les ondes, que j’étais encore en vie.
La nuit, il m’a conduit sur le lieu, d’où j’ai lancé plusieurs appels à mon directeur de cabinet militaire Ahmat Hissène à Faya. Il n’y a eu aucune réponse. Je ne savais pas qu’il avait déjà été assassiné par les Libyens…probablement vers le 22 ou 23 octobre avec deux autres responsables du FROLINAT et deux de ses gardes corps
Comme nos combattants à l’intérieur avaient arrêté leurs soldats, les Libyens envisageaient d’occuper en quelque sorte le Tibesti. Mais comme leurs éléments étaient entre les mains de nos combattants, pour éviter de leur faire courir des risques, ils voulaient utiliser mon canal pour faire libérer leurs gens. C’est dans cet esprit, je crois, qu’ils m’ont demandé de communiquer avec l’intérieur mais ça n’a pas réussi.
Est-il vrai qu’un poste radio avait été amené à l’hôpital pour que vous puissiez lancer ce message depuis votre lit ?
Non, ce n’est pas depuis le lit d’hôpital puisque j’étais un peu guéri. Un mois après ma blessure, j’étais un peu guéri, en convalescence… mais j’étais toujours à l’hôpital, j’occupais un local du bloc opératoire. J’ai fait là-bas presque 2 mois.
Donc je suis sorti avec l’officier en question, on est parti dans leur centre de transmission, il m’a laissé devant un gros émetteur-récepteur « RF ». Comme je connaissais les fréquences de nos combattants sur le terrain, surtout de la sécurité présidentielle à Faya, j’ai lancé des appels à mes directeurs, mais ça n’est pas passé.
Est-ce que vous diriez que les chefs militaires qui ont signé l’accord de ralliement avec les FAN l’ont fait à votre demande ou bien malgré vous ?
Ils ont certainement pris en considération ma déclaration à RFI le 17 octobre 1986, mais personnellement je crois surtout qu’ils se sont précipités. Avant de partir à Fada, Adoum Togoï, un matin lorsque je lui ai donné les dernières consignes pour aller à Fada m’a dit en rigolant : « si la réconciliation n’aboutit pas, vous me trouverez du côté FAN ». Il a ri et il a dit qu’il plaisantait, mais cela voulait dire qu’il avait un projet, puisque en ce temps il voulait nous pousser à nous rallier avec les FAN. A travers cela il visait un objectif précis puisqu’il était en contact avec Idriss Déby pour faire un coup d’état contre Hissène Habré. Lui, il croyait que notre ralliement aux FAN serait un renfort pour faire un coup d’état à Hissène Habré. Il pensait cela de manière voilée. C’est pourquoi lorsqu’il y a eu une rupture dans sa discussion avec les Libyens, il a automatiquement décidé d’envoyer des émissaires sans même en informer les combattants qui étaient avec lui, ni les responsables, sauf le chef d’état major, qu’il a informé. Donc ce sont ces deux là qui se sont entendus pour envoyer des émissaires avant même d’entreprendre des combats pour reprendre Fada.
Et avant même que vous n’ayez donné votre feu vert sur les ondes de RFI ?
Oui, avant même ça, avant même la déclaration du 17 octobre.
Le 27 février 87, le journal Le Monde explique que le colonel libyen Messaoud Abdelaziz, qui avait été chargé par le colonel Kadhafi de vous « chaperonner » a quitté votre villa du club des pins, et qu’il est revenu à Tripoli porteur d’un message selon lequel vous ne rentreriez pas en Libye… Est-ce correct ? De quand date votre décision de ne pas rentrer à Tripoli ?
Le colonel Messaoud était chargé du dossier de l’opposition tchadienne. A ce titre, il était l’autorité libyenne la plus proche de nous. Il était souvent en contact avec moi mais pas pour me « chaperonner ». Les Libyens voulaient au début que je demande à Adoum Togoï de venir me trouver en Libye. Mais moi je ne voulais pas qu’Adoum Togoï vienne en Libye, alors j’ai envoyé quelqu’un chez lui qui l’a recontré au Gabon. J’ai dit à Adoum de fixer notre lieu de rencontre quelque part et que là j’aurais certainement l’occasion de sortir pour le rencontrer. Adoum a proposé la Syrie et l’Algérie. Lors d’une rencontre moi j’ai fait cas au guide libyen de la demande d’Adoum Togoï. Pour la Syrie, ça n’allait pas parce que quand Djalloud avait été mécontent de Kadhafi, il s’était retiré en Syrie et s’était retrouvé là-bas. Par contre pour notre rencontre ici, il a accepté. Mais lorsqu’on lui a dit qu’on allait se préparer pour aller à Alger, là aussi il était un peu hésitant. Même Messaoud a insisté auprès de Kadhafi pour que je parte rencontrer Adoum Togoï. Donc j’étais venu ici avec Messaoud, on a rencontré Adoum, par la suite Messaoud est reparti, nous avons tenu des réunions, etc, discrètement, j’ai même fait partir Adoum Togoï en Libye, je crois que là personne n’a été mis au courant. Messaoud a amené Adoum Togoï là-bas, il a rencontré Kadhafi, il est reparti en France… pour nous rejoindre ici.
Messaoud a joué un rôle déterminant pour me permettre de sortir. Mais je n’ai pas refusé de retourner en Libye : pour certaines raisons ma présence en Algérie me facilitait le contact avec quelques-uns de mes compatriotes qui refusaient d’aller en Libye.
Vous ne faîtes donc qu’un séjour temporaire en Algérie et vous ne remettez pas au colonel Massoud cette lettre pour le guide ?
En 87, la version que vous avez apprise n’est pas du tout conforme à la réalité et je n’ai jamais remis une lettre au colonel Kadhafi. La seule chose que je sais, c’est que contre la volonté des Libyens, nous avons décidé de nous réconcilier une fois pour toutes avec les FAN, avec le gouvernement d’Hissène Habré. Nous avions dit aux Libyens que nous n’avions pas l’intention de les trahir mais qu’à partir de ce moment, nous n’avions plus l’intention de ranimer la lutte armée. Nous allions trouver une solution avec Hissène Habré,
Les Libyens n’étaient pas d’accord et pour nous devancer, ils ont pris contact avec les soudanais pour aller rencontrer Idriss Déby à N’Djamena discrètement. C’était le colonel Messaoud. Ils ne nous l’ont pas dit. Ils ont voulu trouver une entente avec Hissène Habré mais Hissène n’a pas accepté. Ils sont donc retournés.
Le 25 novembre 87, le journaliste Frederic Fritscher écrit page 3 du Monde : « Il semble selon nos informations que le colonel Kadhafi lui ait proposé de ranimer un foyer d’opposition armée au Tibesti en lui promettant de nouvelles forces issues d’un recrutement autoritaire de travailleurs tchadiens en Libye. » et Fritscher explique que vous rejetez à l’époque cette suggestion pour privilégier un règlement politique. Est-il vrai que le Guide vous a proposé de reprendre la lutte armée à l’époque ? Quelle a été votre réponse ?
C’est vrai, nous avons rejeté cette offre pour la reprise de la lutte armée contre les FAN tant que les discussions qui se poursuivaient nous laissaient un grain d’espoir. Donc nous avons repoussé cette idée.
Quelles sont vos activités jusqu'à 89, et le bouillonnement lié à l’action du 1er avril ?
Après l’échec de nos pourparlers avec les FAN, nous avons fait un pas en arrière pour nous organiser militairement et montrer à Habré qui refusait de signer un accord avec nous que tout était possible, même la reprise des armes. C’est ainsi que nous sommes retournés encore en Libye. Je ne suis pas resté ici. On est parti en Libye, on s’est organisés, on s’est préparés pour créer une nouvelle force. C’est pendant nos préparatifs et nos démarches que l’action du 1er avril est née.
C’est à dire qu’au moment de la naissance du mouvement 1er avril, vous vous prépariez à reprendre la lutte armée ?
Effectivement, à ce moment-là on se préparait. On avait même des soldats dans des camps.
Le régime d’Hissène Habré, de 82 à 90 a été un régime très autoritaire, sous lequel de nombreuses exactions ont été commises… Est-ce le genre de choses qui étaient prévisibles, en fonction de ce que vous saviez d’Hissène à la fin des années 70 et au début des années 80 ?
Le charnier que nous avons découvert à Sabangali, non loin de sa résidence, après la fuite des FAN de N’Djamena m’a laissé croire dès ce moment que Hissène Habré était capable de tout. Il est évident que celui qui avait décimé des familles entières pendant les batailles de N’Djamena pouvait récidiver s’il détenait un pouvoir absolu.
Pourtant, lorsqu’on était avec Hissène Habré dans la révolution, on le considérait comme un révolutionnaire, on le comparait même avec Mao Tse Tung et Ho Chi Minh mais quand même à la fin, l’homme c’est l’homme et nous avons pu découvrir qui était Hissène Habré.
La France et les Etats-Unis d’Amérique, à mon avis, ont une grande part de responsabilité dans la mort de ces milliers de Tchadiens innocents parce que sur le plan militaire ce sont ces deux puissances qui ont soutenu Hissène Habré. Sur le plan économique et politique ce sont ces deux puissances qui ont appuyé Hissène Habré, d’aucuns disent même que le service de renseignements « DDS » d’Hissène Habré était soutenu par les agents des Etats-Unis d’Amérique. La France avait une présence militaire sur le terrain.
Quand et comment avez-vous trouvé ce charnier à Sabangali ?
C’était lors de la défaite de FAN, à l’issue des 9 mois de bataille en 1980.
Quel regard et quel témoignage pouvez-vous apporter sur les exactions commises par le régime d’Hissène Habré. Vos hommes ont-ils été recherchés, arrêtés ou torturés ? Que savez-vous des méthodes qui ont été employées par Habré ?
Les méthodes qu’utilisaient les tortionnaires d’Hissène Habré étaient pires que les méthodes du nazisme. Je n’ai pas besoin de raconter les détails de ces atrocités puisqu’elles sont horribles.
Quel bilan faites-vous des quelque huit ans pendant lesquels Hissène Habré a dirigé le Tchad ?
Le bilan de huit ans de règne de Hissène Habré peut être apprécié de deux manières : Sur le plan national, le bilan Habré est perçu par les uns comme une calamité et par d’autres comme positif. Pourtant, durant les huit ans de son règne, Habré a su mobiliser l’opinion nationale en faveur de l’intégrité territoriale du Tchad sur l’affaire d’Aozou. Sur le plan international, Habré a donné au pays l’image d’un Etat fort et respecté. Donc son bilan, à mon avis, n’est pas aussi mauvais que les gens le disent. Sur les droits de l’homme, n’en parlons pas, il a vraiment dérapé.
Quel commentaire vous inspire la possibilité d’un procès d’Hissène Habré ?
Il faut absolument que la justice soit rendue quel que soit le cas… pour le grand bonheur des persécutés tchadiens et étrangers. Ces derniers crient à travers l’Afrique, à travers l’Europe pour avoir une justice saine, donc il faut absolument qu’un tel dictateur paie le prix. Il faut absolument qu’il soit jugé pour que les autres dictateurs prennent son exemple comme un exemple à ne plus persécuter leurs concitoyens.
1 ANL, Armée Nationale de Libération, la force armée du GUNT.
2 D’après Millard Burr et Collins, le général Négué Djogo qui dirige les forces du GUNT attaque Faya le 23 juin 83 avec l’aide d’un arsenal libyen impressionnant : orgues de Staline, missiles SAM-7 sol-air, RPG. Deux bataillons rebelles lancent l’attaque, l’un depuis Elbeye à l’Ouest, l’autre depuis Goey au Nord-Est. La garnison FANT est submergée. Ce sont ces deux auteurs qui donnent également les dates des attaques sur Arada et Abéché. Cf J.Millard Burr et Robert O. Collins, Darfur the long road to disaster, Markus Wiener Publishers, 2006.
3 Dans son livre de témoignage, Garondé Djarma explique ainsi : « Après notre cuisante défaite [à Faya, le 30 juillet 1983], nous nous repliâmes en désordre en direction de Gouro avec une halte au puits de Goin pour nous approvisionner en eau. Nous retrouvâmes Goukouni un peu réconforté à cinquante kilomètres de Faya. Il nous dit : ‘la population de Faya, je leur ai apporté la liberté mais elle dit que c’est plutôt le feu. Hé bien ! elle verra ce feu là bientôt’. Nous passâmes la nuit à cet endroit. Les Mig et les Tupolev Libyens déclenchèrent leurs bombardements sur Faya quelques heures après notre repli. (…) Ce ne fut que le 10 août 1983 que nous revînmes en compagnie de nos alliés libyens pour reprendre Faya-Largeau, le 11 août, des mains des FAN. L’attaque fut menée sur terre et par air. Nous nous réinstallâmes à Faya » Cf Al Hadj Garondé Djarma, Témoignage d’un militant du FROLINAT, L’Harmattan, 2003 p186
4 Le point de vue du CDR sur ces événements est détaillé dans le livre de témoignage de Garondé Djarma : selon lui, à la suite de la mise en cause du chef d’état-major des troupes du GUNT, de nombreux combattants du CDR furent arrêtés et exécutés en mai 1986 à Zouar, Gouro, Kirdimi. « A Faya Largeau, je fus le seul survivant parmi les cadres du CDR. » explique Djarma. Djarma part à Sebha, puis à Syrte où il rend compte de ce qui s’est passé au secrétaire général du CDR Acheikh Ibn Oumar. « Au cours d’une réunion du Bureau exécutif dont je faisais partie et qui s’est tenue à Syrte, on décida d’envoyer les camarades Soumaïne Allamine et Azrag Aboubakar Abderrahim pour une mission militaire à Fada. Pour venger nos cadres exécutés en mai 1986, le Bureau ordonna à nos forces stationnées à Fada de lancer une offensive contre les FAP qui s’y trouvaient aussi. L’ordre d’ouvrir le feu, écrit par le secrétaire général du CDR, fut remis par les deux émissaires au chef d’état-major Massoud Dressa. » Les combats sont lancés le 22 août 1986 à 4 heures du matin. Cf Al Hadj Garondé Djarma, Témoignage d’un militant du FROLINAT, L’Harmattan, 2003 pp 214-216
5 Selon Gardondé Djarma, cette attaque a lieu le 5 octobre 1986 entre 1h00 du matin et 17h30. Cf Al Hadj Garondé Djarma, Témoignage d’un militant du FROLINAT, L’Harmattan, 2003 p216
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