par Myriam Berber
Article publié le 26/08/2008 Dernière mise à jour le 26/08/2008 à 16:51 TU
Travaux d'aménagement situés en face de l'île Seguin à Boulogne-Billancourt, le 10 juillet 2008.
( Photo : AFP )
Après dix ans de hausse continue des prix, le marché immobilier français semble se retourner. La chute est surtout spectaculaire sur le nombre de ventes de logements neufs. Selon les chiffres du ministère de l’Equipement et du ministère de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement publiés lundi 25 août 2008, les ventes de logements neufs en France ont reculé de 33,9% au deuxième trimestre 2008 par rapport à la même période de 2007, pour s’établir à 21 500 unités. La baisse dépasse même les 50% dans cinq régions : Aquitaine, Lorraine, Midi-Pyrénées, Bourgogne, Limousin. Seule Champagne-Ardenne échappe à la baisse en France métropolitaine.
Le nombre de logements neufs à vendre a également nettement reculé au deuxième trimestre de 26,4% sur un an pour atteindre 27 600 unités. Dans ce contexte, le niveau des stocks de logements neufs proposés à la vente continue de progresser. Il a atteint le niveau record de 110 500 unités à la fin juin. Autre illustration du ralentissement de l’immobilier : le délai moyen d’écoulement d’un logement s’est nettement allongé en un an, passant de sept mois et demi à quinze mois pour l’individuel.
Difficultés d’accès au crédit
Le nombre des mises en chantier de logements affiche également un repli de 11,8% sur la période allant de mai à juillet par rapport à 2007. Le nombre de permis de construire a également baissé de 16,6% sur la même période. Sur un an, à fin mai, les prix des appartements anciens restent toutefois orientés à la hausse : plus 6,3%, tirés par une augmentation des prix toujours plus forte à Paris, plus 9,3% sur un an. Mais pour la première fois depuis cinq ans, le prix des logements anciens (appartements et maisons) de plus de cinq ans en Ile-de-France est passé sous la barre des 5%.
Alors que l’on croyait la France à l’abri, l’immobilier dans l’Hexagone est en train de se gripper. La crise des subprimes (crédits immobiliers à risques) venue, les taux d’intérêts des emprunts immobiliers ont dépassé la barre des 5% en juin, les banques ont réduit l’accès au crédit, ce qui a limité le nombre de transactions. Mais les établissements bancaires ne sont pas les seuls responsables de ce ralentissement. Anticipant une baisse des prix, de nombreux Français ont décidé de différer leur achat.
« On ne se dirige pas vers un krack immobilier »
Un secteur immobilier qui tourne au ralenti a un impact direct sur la croissance française qui peut se lire à travers l’investissement logement des ménages. « En effet, rappelle l’économiste Alexandre Mirly-Courtois, il y aura des conséquences directes sur leur consommation en matière d’équipement électroménager, d’ameublement, de bricolage, tous les secteurs liées au logement vont être affectés ». Ces indicateurs viennent-ils accréditer la thèse d'une crise immobilière ? La réponse est non, selon Alexandre Mirly-Courtois. Selon lui, il s’agit d’un coup de semonce, « on ne se dirige pas vers un krack immobilier. On n’est pas au même niveau que les Etats-Unis ou l’Espagne. Les ménages français ont certes emprunté, mais à taux fixe, autrement dit sans augmentation de charges », explique-t-il.
Avec un secteur immobilier qui tourne au ralenti et une forte inflation (3,6% en l’espace d’un an en France), la menace d’une récession se fait de plus en plus précise. Le PIB a reculé 0,3% au deuxième trimestre, ce qui n'était pas arrivé depuis 2002. La consommation des ménages a stagné car avec l'augmentation du pétrole et des denrées alimentaires, les prix ont progressé plus vite que les salaires. Les exportations ont également reculé et, signe d'un ralentissement général de l'économie, les importations ont aussi diminué. De leur côté, les entreprises ont également créé moins de richesses, diminué les investissements et les embauches. Mais c’est surtout la forte baisse de la consommation des ménages qui a conduit la croissance dans le rouge, ce qui rend la prévision gouvernementale d'un taux de croissance compris entre 1,7% et 2% en 2008 peu réaliste, selon les experts.