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Mexique

Pétrole : feu vert à la modernisation de Pemex

par Patrice Gouy

Article publié le 29/10/2008 Dernière mise à jour le 29/10/2008 à 05:56 TU

La Compagnie nationale des pétroles mexicains, Pemex ne sera pas dénationalisée, mais la réforme énergétique votée permettra d'ouvrir certaines de ses activités aux capitaux privés.( Photo : RFI / Patrice.Gouy )

La Compagnie nationale des pétroles mexicains, Pemex ne sera pas dénationalisée, mais la réforme énergétique votée permettra d'ouvrir certaines de ses activités aux capitaux privés.
( Photo : RFI / Patrice.Gouy )

Après 7 mois de consultations, délibérations, analyses, forums spécialisés et manifestations, la polémique réforme pétrolière présentée par l'exécutif a finalement été approuvée cette nuit à une large majorité de 391 voix, contre 69 et 2 abstentions. Tous les partis, y compris le PRD (Parti de la Révolution Démocratique) ont pris part aux débats. Une trentaine de députés de gauche ont pris la tribune du Parlement aux cris de « La Patrie se défend, la Patrie ne se vend pas ! ». La réforme du statut de l'emblématique Pemex, symbole de souveraineté natioanle, est un succès pour le président Calderon. 

L'approbation de la réforme énergétique est le résultat de multiples compromis politiques. Elle démontre que le Mexique a retrouvé le chemin du travail parlementaire. Cette réforme n'est pas celle dont rêvait Felipe Calderon et la droite libérale, qui auraient voulu ouvrir largement la Compagnie des pétroles mexicains (Pemex) aux investisseurs privés. Elle ne satisfait pas non plus le FAP, la gauche nationaliste et son leader Andres Manuel Lopez Obrador, qui se sont battus pour la défense du patrimoine et de la souveraineté nationale. C'est une réforme qualifiée de « light » pour les uns, une victoire à la Pyrrhus pour d'autres, compte tenu des gigantesques efforts déployés par les protagonistes, mais dans son ensemble la société applaudit, car cette réforme réconcilie une société fortement polarisée, et devrait permettre à Pemex de sortir de son archaïsme.

Une réforme modernisatrice

Cette réforme donne en effet à Pemex une plus grande autonomie et plus d'efficacité dans sa gestion. Pour se moderniser, la compagnie nationale pourra passer des contrats avec des entreprises privées dans les domaines de l'exploration et de la production de pétrole, par exemple pour la construction de plates-formes pétrolières et les creusements de puits en eaux profondes ; par contre, elle conserve la construction et la gestion des raffineries, coupant l'herbe sous les pieds des multinationales européennes (Repsol, Total) ou nord-américaines (Exxon, Chevron) qui auraient aimé investir dans ce domaine financièrement très rentable. Pemex aura également la possibilité de passer des contrats de construction ou de services, mais sans jamais céder des droits sur la propriété du pétrole. A la différence de ce qui se passait auparavant, Pemex pourra recourir aux financements extérieurs sans avoir à demander l'autorisation du ministère des Finances, ce qui devrait lui donner une plus grande autonomie.

Les tentatives de privatisation les plus fortes ont donc été écartées et la Nation reste propriétaire du pétrole. Une nouvelle qui ne réjouira sans doute pas Washington, qui n'a jamais caché son envie de voir s'ouvrir le secteur énergétique mexicain à ses compagnies pétrolières, considérant le pétrole mexicain comme faisant partie de la sécurité nationale nord-américaine.

Eviter la privatisation

Lorsque le Président Felipe Calderon avait envoyé son projet de loi au Sénat en avril dernier, il pensait le faire passer en force grâce au soutien du PRI, le parti de l'ancien régime ; mais il s'est immédiatement heurté à la résistance des parlementaires de gauche qui ont pris la tribune du Congrès pendant 3 semaines pour empêcher le vote et réclamer un large débat. Pour défendre ce bien national, Andrés Manuel Lopez Obrador a alors convoqué la population à de grandes assemblées populaires. Par cette action, il a contraint le gouvernement et tous les partis politiques à ne pas voter la loi à la va-vite et à s'ouvrir au dialogue.

Par sa ténacité, il est parvenu à imposer un agenda législatif et à faire adopter pratiquement l'essentiel du projet par la gauche. Néanmoins, au lieu de crier victoire et d'en tirer bénéfice, il a préféré continuer sa lutte en soulignant les incohérences de cette loi. Il estime en effet qu'elle est pleine de « trous » qui permettent des interprétations diverses et laissent le champ libre aux entreprises privées, en particulier les transnationales, pour prendre progressivement le contrôle de Pemex.

Il n'y a pas de vainqueur ni de vaincu a déclaré Ruben Camarillo, sénateur du PAN. Le président de la Commission énergie a expliqué que tous les partis ont construit ensemble l'avenir de Pemex. Les députés et sénateurs de gauche ont toujours défendu la non privatisation de cette compagnie et ils y sont arrivés a souligné Graco Ramirez, faisant remarquer qu'il ne reste pas grand-chose de l'initiative présentée par Felipe Calderon.

Néanmoins, c'est pour le président une victoire politique importante. C'est la première réforme structurelle qui soit véritablement discutée au parlement. En acceptant le dialogue imposé par la gauche, il a considérablement  renforcé son image de président de tous les Mexicains.