par Patrick Adam
Article publié le 31/10/2008 Dernière mise à jour le 02/11/2008 à 15:03 TU
Une rencontre entre les président russe, arménien et azerbaïdjanais a lieu ce dimanche à Moscou. Dmitri Medvedev tente une médiation sur la région du Nagorny-Karabakh (ou Haut-Karabakh), un conflit gelé qui empoisonne les relations entre l’Arménie, alliée de la Russie, et l’Azerbaïdjan dont la richesse en hydrocarbures intéresse Moscou.
Les pourparlers portant sur le Nagorny-Karabakh (ou Haut-Karabakh) sont entrés dans « une phase importante », estime Edouard Nalbandian, le chef de la diplomatie arménienne. Une déclaration encourageante, qui intervient à quelques jours d’une rencontre au sommet prévue dimanche 2 novembre à Moscou, entre les chefs d’Etat russe, arménien et azerbaïdjanais. C’est Dmitri Medvedev qui a pris l’initiative de rassembler ses homologues Serge Sarkissian et Ilham Aliev. Malgré l’optimisme courtois affiché par le ministre arménien des Affaires étrangères, aucune des parties ne semble attendre un quelconque déblocage de la situation.
Pour mémoire, le Nagorny-Karabakh est une région située en Azerbaïdjan mais largement peuplée d’Arméniens et annexée par Erevan à la suite d’un conflit armé né sur les cendres encore fumantes de l’empire soviétique. Ce conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, soutenue par Moscou, laisse derrière lui trente mille victimes et depuis 1994, date à laquelle un cessez-le-feu est signé, des accrochages sporadiques continuent de se produire.
Un conflit « gelé » qui empoisonne les relations
Erevan insiste sur « le droit du peuple du Karabakh à l’autodétermination » tandis que Ilham Aliev, réélu début octobre, dénonce « l’occupation » de la région séparatiste par l’Arménie et promet de renforcer l’isolement de son voisin tant qu’une solution ne sera pas trouvée. Il s’est par ailleurs engagé à reprendre le territoire par la force.
En visite à Erevan le 21 octobre, Dmitri Medvedev a insisté sur la nécessité de régler la question. Or rien ne semble rapprocher les points de vue, tant les positions défendues par les deux parties restent diamétralement opposées et le groupe de Minsk (coprésidé par les Etats-Unis, la France et la Russie) créé en 1992 s’avère impuissant à faire évoluer la situation.
L’Azerbaïdjan a la légitimité de son côté, aucun Etat n’a reconnu le Nagorny-Karabakh, et la Russie ne cache pas son désir de convaincre Bakou de vendre son pétrole et son gaz à l’Europe en transitant par le territoire russe (et non plus la Géorgie et la Turquie). C’est donc plutôt l’Arménie qui aurait à gagner en cas de percée diplomatique. Le pays est très isolé, la frontière avec l’Azerbaïdjan est fermée, de même que celle avec la Turquie sur fond de différend historique. Erevan souhaite en effet que soit reconnu le génocide arménien perpétré sous l’empire ottoman en 1915-1916, tandis qu’Ankara se borne à reconnaître des affrontements partagés.
Moscou soigne son image
Dans ce contexte, l’initiative russe d’une réunion au sommet peut surprendre. Pour Alexeï Malachenko, de la fondation Carnegie à Moscou, « la Russie doit réparer son image dans le Caucase » et « l’important pour la Russie est que son initiative ait été vue ». Objectif en partie atteint, les Etats-Unis ont salué cette initiative diplomatique.
La Russie, dont la gestion violente de la crise géorgienne a tristement rappelé l’interventionnisme soviétique, a besoin de rafraîchir son image de marque. Après avoir enfreint le droit international en reconnaissant unilatéralement l’indépendance des régions géorgiennes séparatistes, elle s’offre un rôle de pacificateur dans un conflit dont la pérennité a de quoi désespérer les diplomates les plus acharnés. Mais une avancée ne pourrait se faire qu’aux dépens de l’Arménie, or l’on imagine mal le grand frère russe pousser son alliée à de trop douloureux compromis.