Article publié le 11/11/2008 Dernière mise à jour le 12/11/2008 à 11:07 TU
Des manifestants se sont rassemblés, les 10 et 11/11, devant les locaux de la radio allemande Deutsche Welle, près de Kigali. Sur les pancartes : « Nous protestons contre les intentions de la justice internationale ! ».
(Photo : AFP)
Avec notre correspondant à Berlin, Pascal Thibault
Au ministère des Affaires étrangères, ici à Berlin, on voit qu’on a envie d’éviter que la situation s’envenime. Berlin confirme que son ambassadeur sera rappelé à Berlin pour consultation. On évite donc de dire qu’il est expulsé et on espère également, ici à Berlin, que les deux ambassadeurs, allemand au Rwanda et rwandais en Allemagne, retourneront le plus vite possible à leur poste. On précise que l’Allemagne était obligée dimanche d’appliquer ce mandat d’arrêt européen conformément à ses engagements. Mais encore une fois, pas de condamnation de cette décision de Kigali pour éviter d’envenimer les relations.
Paul Kagame est venu apporter son soutien à Rose Kabuye
Paul Kagame se trouvait en déplacement en Allemagne, à Francfort précisément. Et donc ce matin, il a rendu visite à sa chef du protocole en prison. Il a dit qu’elle se portait bien. Il a confirmé ce qu’on savait déjà, c’est-à-dire qu’elle devrait être transférée assez rapidement vers la France. Il a critiqué très vigoureusement l’arrestation de Rose Kabuye, notamment l’attitude de l’Allemagne. Il a parlé d’une atteinte à la souveraineté de son pays, le Rwanda.
Il a également, dans un cadre plus large, remis en cause la possible collaboration de son pays avec la France et l’Union européenne pour résoudre la crise actuelle au Congo. Il a estimé, concernant Rose Kabuye, qu’elle était en mission officielle et qu’elle était protégée par un statut diplomatique, ce que rejette le Parquet de Francfort qui a précisé ce mardi que Rose Kabuye savait pertinemment qu’elle était menacée par un mandat d’arrêt et qu’elle ne bénéficiait pas d’une protection diplomatique. Avocat de Rose Kabuye « La première demande que nous allons faire, c'est que Rose Kabuye bénéficie du statut de témoin assisté. » Rose Kabuye était déjà venue en Allemagne il y a six mois. Elle faisait partie de la délégation du président Paul Kagame, alors en voyage officiel, et n'avait donc pas été arrêtée. Cette fois-ci, la chef du protocole de la présidence rwandaise est arrivée à Francfort avant le chef de l'état. Pour les autorités judiciaires allemandes, la visite était d'ordre privée et elle ne pouvait donc se prévaloir de son immunité diplomatique. Rose Kabuye a-t-elle été imprudente ? L'Allemagne avait averti Kigali qu'elle serait arrêtée. Le Rwanda a-t-il voulu tester le système judiciaire européen ? Le juge antiterroriste français, Jean-Louis Bruguière, a émis, depuis exactement deux ans, neuf mandats d'arrêts à l'encontre de responsables rwandais pour leur implication présumée dans l'attentat qui avait coûté la vie, en avril 1994, à l'ex-président rwandais Juvénal Habyarimana. Pour la ministre rwandaise de l'Information, « ces intimidations doivent cesser ». Rose Kabuye a, de son coté, immédiatement accepté son transfert vers Paris. Certains voient d'ailleurs là une stratégie rwandaise. Le transfert de Rose Kabuye devant la justice française lui permettra d'avoir accès au dossier de l'instruction sur l'attentat de 1994. Ses avocats pourront alors réclamer des auditions et des enquêtes complémentaires, alors que le juge français en charge du dossier s'apprête à boucler son instruction, selon les avocats des parties civiles. Après dix ans d'investigation, on pouvait espérer un procès par contumace pour l'an prochain ou 2010, dit avec regret l'un de ces avocats, Me Laurent Curt. Ce nouveau rebondissement retardera forcément l'échéance.Maître Leon-Lef Forster
Arrestation stratégique ?
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