par Anne Toulouse
Article publié le 13/12/2008 Dernière mise à jour le 13/12/2008 à 05:04 TU
Le feuilleton du sauvetage de l’industrie automobile américaine est, à beaucoup d‘égards, un pur produit de la transition et un exemple de l'inertie qu’elle peut produire, même lorsque le président élu et le président sortant sont d’accord. George Bush et Barack Obama ont tous les deux dit qu’il était nécessaire d’accorder une ligne de crédit aux constructeurs de Detroit. Ils ne le font sans doute pas de gaieté de cœur. Après tout, l’industrie automobile américaine est constituée d’entreprises privées, qui ont réussi à se mettre à dos les démocrates et les républicains : les premiers en ignorant les consignes écologiques, les seconds par leur mépris des lois du marché.
Mais laisser s’effondrer General Motors et les centaines de milliers d’emplois qui lui sont liés n’est pas envisageable. Lundi dernier, le président Bush a envoyé son vice-président expliquer la situation, lors d’un déjeuner avec les républicains du congrès. Dick Cheney y aurait exprimé sa pensée avec son habituelle force de langage : si vous ne votez pas, aurait-il dit, « it’s Hoover time », autrement dit, autrement dit nous allons revenir à la période de la fin de la présidence d'Herbert Hoover, quand la paralysie qui a accompagné le passage du pouvoir à Franklin Roosevelt, fin 1932 début 1933, a plongé le pays dans les tréfonds de la dépression... Deux jours plus tard, le chef de cabinet de George Bush est allé répéter le message, avec la même absence de succès.
On appelle la présidence le « bully pulpit », le poste d’où l‘on intimide les autres composantes du pouvoir, en particulier le Congrès. Sur la fin du mandat présidentiel, le Congrès prend sa revanche : le président n’aura plus à se faire élire, ce qui n’est pas le cas des parlementaires. Comme l’a dit l’un d’entre eux, « ce que nous écoutons maintenant, ce sont les coups de téléphone qui viennent de nos circonscriptions ».
On pourrait penser qu’à un mois et demi de sa prise de fonction, Barack Obama pèse davantage sur la situation. Peut-être, mais pas dans le sens qui la ferait avancer. Les syndicats de l’automobile n’ont aucun intérêt à accepter un accord maintenant, alors que dans quelques semaines, la majorité leur sera plus favorable. D’autre part, il y a le sentiment que la Maison Blanche finira bien par trouver une solution. Si le moment de vérité de l’industrie automobile doit venir, et il viendra, George Bush préfère que ce soit sous son successeur. C’est en cela qu’il a été meilleur politique que les sénateurs de son parti… Ce qui vérifie l’un des bons mots favoris de son père, le premier président Bush : « Si vous étiez plus malins que moi, vous n’aviez qu’a vous faire élire président à ma place ! ».