Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

22/12/2008

J-30 : Les bons pasteurs...

par Anne Toulouse

Article publié le 23/12/2008 Dernière mise à jour le 23/12/2008 à 00:49 TU

Barack Obama n’a pas de chance avec le clergé. Au milieu des primaires, il a perdu un bon mois à se dépêtrer de l’affaire de son pasteur : Jeremiah Wright, dont il fréquentait l‘église depuis 20 ans, a fait les beaux jours d’internet, avec des sermons incendiaires et particulièrement déplaisant pour la communauté blanche. Une fois répudié, le pasteur a eu à cœur d’embarrasser un peu plus son ex-paroissien, en l’accusant d’être un politicien classique, au double langage. Ce faisant, il s’est privé de toute chance d’arriver à la plus grande consécration temporelle américaine : être invité à bénir le président, pendant sa cérémonie de prestation de serment.

Cet honneur ira à Rick Warren qui, à beaucoup d’égards, est le contraire du pasteur noir de Chicago. Rick Warren est une vedette, auteur d’un livre qui s’est vendu à des millions d’exemplaires dans le monde, A purpose driven life (Une vie qui a un sens). Les profits sont réinvestis dans la lutte contre le Sida. Rick Warren représente la branche médiatique des chrétiens blancs évangéliques. Barack Obama a, ainsi, voulu tendre la main à cette partie du pays qui ne fait pas partie de sa base naturelle. Il a aussi, sans doute, voulu renvoyer l’ascenseur au Pasteur Warren, qui l’avait invité à parler dans son Eglise, lorsqu’il était un sénateur débutant.

Mais l’ouverture d’esprit du pasteur a ses limites et il se trouve qu’il a milité activement en faveur du référendum qui a aboli le mariage homosexuel en Californie. Sur cette forme de mariage, il a eu des jugements sans appel, le comparant, dans l’échelle des abominations, à l’inceste ou la pédophilie. Le lobby gay, qui a activement fait campagne en faveur de Barack Obama, ne décolère pas, entraînant dans son sillage d’indignation la frange la plus à gauche du parti démocrate. Si, aux Etats-Unis, l’émoi tourne autour de la personnalité du pasteur, le reste du monde peut se demander, pour commencer, ce qu’il fait là. Le premier amendement de la constitution implique bien la séparation de l’Eglise et de l’Etat, mais la pratique n’est pas aussi nette.

On peut d’ailleurs lire le premier amendement en sens inverse et considérer que les manifestations religieuses font partie de la liberté d’expression qu’il garanti ! La note religieuse dans la prestation de serment a été introduite par le premier président, George Washington, qui a ajouté à la formule prévue par la constitution « …And so help me God » (Avec l’aide de Dieu). Presque tous les présidents ont repris cette phrase, de même qu’ils ont choisi, comme Washington, de prêter serment sur la Bible, mais cela n’est nullement obligatoire : l’un des plus grands présidents américains, Theodore Roosevelt, s’en est dispensé.

La prière, que l’on appelle l’invocation, fait aussi partie des traditions. Elle doit, en principe, être assez large pour que toutes les confessions puissent s’y reconnaître. Cela laisse évidement de coté les athées. Bien que représentant environ 5% du pays, ils ne sont pas en reste dans le prosélytisme. Ils ont, régulièrement, saisi la justice pour faire supprimer les prières inaugurales et ont, régulièrement, été déboutés.