par Anne Toulouse
Article publié le 15/01/2009 Dernière mise à jour le 15/01/2009 à 11:47 TU
Il y a, dans le fait qu'il soit pris pour cible, une part de son histoire personnelle. Son passé donne du grain à moudre. Il a été l’adjoint du ministre de la Justice sous Bill Clinton et à ce titre il a été mêlé à ce que l’on appelle « l’affaire des grâces ». Il a préparé les dossiers de deux grâces présidentielles controversées. L’une est celle de Marc Rich en fuite après une énorme affaire de fraude fiscale et dont la femme était une généreuse donatrice des caisses politiques des Clinton. L’autre a un caractère encore plus politique, il s’agit de la grâce de 16 indépendantistes portoricains impliqués dans des attentats à la bombe, des meurtres et des vols à main armée. Leur grâce est commodément intervenue au moment où Hillary Clinton faisait campagne pour un poste de sénateur de l’Etat de New York, qui est le lieu de résidence privilégié de la communauté portoricaine aux Etats-Unis.
Les membres républicains du Sénat ont déjà signalé qu’ils allaient mettre en cause l’indépendance du candidat face aux pressions présidentielles. L’opposition qui a le plus de poids est celle d’Arlen Specter, le républicain au rang le plus élevé dans la commission de la Justice. Il a déclaré lors d’une intervention en séance plénière que le problème majeur d’Eric Holder était sa propension à ne pas savoir dire non au président. Il l’a, à cet égard, comparé à Alberto Gonsalez, ministre de la Justice de George Bush qu’Arlen Specter, bien que du même parti, a largement contribué à pousser à la démission.
Le ministre de la Justice doit déterminer la légalité des actions de la présidence. Il pourrait aussi, dans le cas présent, déterminer la validité des démarches de certains membres du Congrès pour poursuivre le président sortant et son entourage sur les écoutes clandestines et les conditions de détention à Guantanamo.
Ce ministre est le membre du gouvernement dont l’action a le plus de conséquences sur la durée : il prépare les nominations de juges fédéraux. Ces nominations sont un privilège présidentiel, sous réserve de la ratification du Sénat. Les juges fédéraux sont nommés à vie. S’ils sont moins connus que ceux de la Cour Suprême, ils ont une influence quotidienne sur l’évolution de la société. Ce sont eux qui tranchent les conflits du travail, les problèmes de concurrence, les problèmes de la famille, les conflits électoraux etc…Ils impriment dans la vie américaine la marque du président qui les a nommés.
Le fonctionnement des Etats-Unis repose sur l’équilibre entre trois pouvoirs : exécutif, parlementaire et judiciaire. Le ministre de la Justice se trouve juste au confluent des trois, ce qui lui donne un poids exeptionnel dans l'action du gouvernement.