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France

La crainte de l'explosion sociale

par Patrice Biancone

Article publié le 28/01/2009 Dernière mise à jour le 28/01/2009 à 16:36 TU

Le président français, Nicolas Sarkozy (d) et la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, deux jours avant la grève nationale du 29 janvier.(Photo : Philippe Wojazer/Reuters)

Le président français, Nicolas Sarkozy (d) et la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, deux jours avant la grève nationale du 29 janvier.
(Photo : Philippe Wojazer/Reuters)

L’ensemble des organisations syndicales appelle à une journée de grève et de manifestations, le 29 janvier. Alors que la mobilisation s’annonce très forte certains députés de la majorité appellent au durcissement des mesures sur le service minimum alors que d’autres évoquent clairement des « propos qui heurtent les Français » et qui pourraient pousser de nombreuses personnes à aller grossir les rangs des manifestants.   

L’histoire politique de Nicolas Sarkozy le prouve : la France a un président qui adore provoquer. C’est même devenu une méthode de gestion des difficultés qu’il rencontre... Deux exemples illustrent cette affirmation. Tout d’abord, il n'y pas si longtemps, Nicolas Sarkozy a déclaré que depuis qu'il est élu, depuis qu'il préside la France, « quand il y a des grèves on ne s'en aperçoit plus ». Une pique qui visait à affaiblir les syndicats. Quelques mois plus tard à Provins, et c’est le second exemple, s'exprimant sur la crise économique, le chef de l’Etat a posément expliqué que s’il écoutait bien les inquiétudes qui s’exprimaient, il n'en tenait pas compte pour autant. Une prise de position qui a passablement énervé les syndicats et l'opposition dont les responsables ont aussitôt promis une grève nationale et une large mobilisation pour répondre à la fanfaronnade présidentielle. Un bras de fer dangereux en période de crise puisqu'il pourrait ajouter aux difficultés économiques une crise politique dont les élus de la majorité ne veulent pas. Hier, à l'Assemblée nationale, certains représentants de l’UMP le disaient en s'inquiétant des effets négatifs de propos qui « heurtent les Français » et jusqu'à leurs électeurs qui souffrent également de la crise et qui seront, pour certains d’entre eux, dans la rue pour manifester.

Messages contradictoires de l’Elysée

Le chef de l'Etat a dû ressentir l’inquiétude de sa majorité. Pas plus tard qu'hier, à Châteauroux, il a d’ailleurs un peu corrigé le tir et s'est montré plus modeste en confirmant, cette fois-ci, que s’il écoutait effectivement les inquiétudes qui s’exprimaient, c’était pour en tenir compte. Un changement radical. Une façon de rassurer et les siens et l'opposition sur sa capacité recouvrée d’être attentif aux plaintes et revendications. Mais modérer son propos ce n'est pas forcément changer la méthode. François Fillon est intervenu à son tour à la télévision pour le souligner. « Le rôle d'un gouvernement ce n'est pas de faire des gestes » a t-il dit en forme d'avertissement. Et d'ajouter : « le rôle d'un gouvernement c'est de tenir le cap des réformes ». En d’autres termes, les organisations syndicales sont prévenues : il n’y aura pas de « petits gestes » quelle que soit la mobilisation jeudi prochain.

Les socialistes en action...

Les socialistes désirent redevenir forts et réinvestir un champ politique laissé en jachère depuis trop longtemps. C'est la stratégie de Martine Aubry. Etre présent partout, sur tous les terrains, pour s'opposer fermement à Nicolas Sarkozy. La motion de censure déposée mardi illustre cette stratégie. Elle a été rejetée, ce n'est pas une surprise. Mais dans l'esprit des socialistes, elle a montré que l'opposition est de retour et qu'il faudra désormais compter avec elle. D'où cette action à l'Assemblée nationale. D'où également l'appel à manifester demain même si la présence des responsables socialistes sur le trajet du cortège a été âprement discutée. La première secrétaire avait prévenu: avec elle l'opposition porterait le débat partout pour relayer la colère de ceux qui ont des difficultés. Martine Aubry a d'ailleurs choisi des mots forts pour répondre aux mots forts de Nicolas Sarkozy et de François Fillon. La première secrétaire les a accusés de faire preuve de « mépris » à l'égard des Français. « On ne lâchera pas le gouvernement, a-t-elle martelé. On ne va pas rester couchés jusqu'en 2012 ». Le mérite de ce positionnement, c'est avant tout de souder les socialistes. Première étape d'une reconquête qu'ils appellent de leurs voeux.