Article publié le 20/02/2009 Dernière mise à jour le 20/02/2009 à 17:28 TU
L'ancien président tchadien Hissène Habré à sa sortie de la Cour d'appel de Dakar, le 15 novembre 2005.
(Photo : AFP)
De notre correspondante à La Haye, Stéphanie Maupas
Les dernières déclarations du président sénégalais, lors du sommet de l’Union africaine, début février à Addis Abeba, ont donné le signal à l’initiative de la Belgique. Abdoulaye Wade menaçait de remettre le dossier Habré à l’Union africaine et de lever la mise en résidence surveillée contre l’ancien président du Tchad. Depuis plusieurs mois, Bruxelles envisageait de déposer une requête contre le Sénégal devant la Cour internationale de Justice (CIJ). Le 19 février, elle a demandé aux juges de cet organe des Nations unies, chargé de régler les différends entre Etats, d’ordonner au Sénégal de juger ou d’extrader Hissène Habré vers Bruxelles.
Poursuivi pour torture et crimes contre l’humanité depuis le printemps 2000, suite à des plaintes déposées par plusieurs victimes et organisations au Sénégal, où il est exilé, et en Belgique, Hissène Habré alimente un long feuilleton politico-judiciaire.
«Le Sénégal poursuit une stratégie du bluff »
Au titre de sa compétence universelle, la justice belge avait émis, en 2005, un mandat d’arrêt international. Mais Dakar s’était opposé à l’extradition de l’ex-chef d’Etat et avait demandé l’aval de l’Union africaine pour juger Hissène Habré sur son sol. Or, depuis quatre ans, la justice sénégalaise n’a entamé aucune procédure. « Aujourd’hui, la Belgique a toutes les raisons de saisir la CIJ, car le Sénégal poursuit une stratégie du bluff », estime Alioune Tine, membre du Comité international pour le jugement équitable d’Hissène Habré, une organisation qui regroupe plusieurs ONG internationales et tchadiennes.
Fort des promesses de l’Union européenne de régler la facture d’un tel procès, le Sénégal avait adressé un budget prévisionnel de plus de 27 millions d’euros. Mais pour le comité d’experts chargé du dossier à l’UE, conduit par le magistrat français Bruno Cathala en 2007, l’estimation ne reposait sur aucun élément judiciaire concret : impossible, alors, de savoir quel était le nombre des témoins qui seraient appelés à la barre, s’il faudrait envisager des mesures de protection, des aménagements logistiques.
Si l’Union européenne avait refusé d’honorer un tel budget, indique une source à Bruxelles, elle avait, en revanche, proposé au Sénégal de déléguer une commission rogatoire en Belgique, afin que les juges d’instruction puissent prendre connaissance des éléments du dossier Habré, élaborer une stratégie judiciaire et proposer un budget reposant sur des données solides. Peine perdue. Pour sortir de l’impasse, c’est donc vers la Cour internationale de Justice, basée à La Haye, que la Belgique a décidé de se tourner.
Une occasion pour relancer les négociations avec le Sénégal |
S. M. |