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France

Caisse d’Epargne/Banque Populaire : la polémique Pérol

par Sophie Lemaire

Article publié le 23/02/2009 Dernière mise à jour le 23/02/2009 à 17:52 TU

C’est jeudi que la fusion entre les Caisses d’Epargne et les Banques Populaires doit être annoncée, donnant ainsi naissance au 2e groupe bancaire français. Ce mariage était évoqué depuis 2006, date de la création de la banque d’affaires Natixis, filiale commune des deux groupes. Mais la crise financière qui a éclaté en septembre dernier, et qui a durement touché Natixis, a précipité l’union. Ces dernières semaines, Nicolas Sarkozy a pesé de tout son poids pour accélérer le mouvement et c’est aujourd’hui le secrétaire général adjoint de l’Elysée, François Pérol, qui est pressenti pour prendre la direction de la nouvelle banque issue de la fusion. Une rumeur qui suscite une vive polémique dans le monde politique.

Sa nomination n’a encore rien d’officiel, ni même de certain, mais elle suscite déjà un tollé. Au cœur de la polémique : François Pérol, l’actuel secrétaire général adjoint de l’Elysée. Depuis quelques jours, son nom circule dans la presse comme étant le candidat le plus probable pour prendre la tête du nouvel ensemble issu de la fusion Caisses d’Epargne – Banques Populaires. Pour l’instant, ni l’Elysée, ni Bercy n’ont confirmé l’information.

Nul ne conteste les compétences de ce proche de Nicolas Sarkozy : énarque, inspecteur des finances, ancien de la banque d’affaires Rothschild, il est le numéro 2 de l’Elysée depuis 2007 et à ce titre, s’est penché aussi bien sur la crise financière, le soutien au secteur automobile que sur le sommet du G20.

Ce qui coince aujourd’hui, c’est justement le rôle joué par François Pérol dans la fusion des Caisses d’Epargne et des Banques Populaires. Depuis des semaines, il est celui qui, au nom de l’Etat, a travaillé sur le montage, a reçu les dirigeants des deux groupes pour parvenir à ce mariage. D’où la réaction de l’opposition, qui dénonce un conflit d’intérêt.

François Pérol, secrétaire général adjoint de l'Elysée.( Photo : Elysée )

François Pérol, secrétaire général adjoint de l'Elysée.
( Photo : Elysée )

Une nomination « impossible, interdite et illégale »

Pour le socialiste François Hollande, l’éventuelle nomination de François Pérol pose « un problème déontologique, moral » puisque « celui-là même qui est en train de régler cette affaire de fusion, y compris avec l’intervention des deniers publics » en serait également « le bénéficiaire en termes de direction de l’entreprise ».

Le second problème soulevé par le PS est d’ordre politique. « Le choix du numéro deux de l’Elysée, qui est un ami personnel de Nicolas Sarkozy, à la tête du deuxième groupe bancaire français participe d’une stratégie d’influence du président de la République dans les milieux économiques », dénonce Benoît Hamon, porte-parole du parti socialiste, qui ajoute : « Ce n’est pas que l’Etat Sarkozy, c’est le patronat Sarkozy ».

Enfin, cette nomination pourrait soulever un problème d’ordre juridique. François Bayrou, le président du Modem, a ainsi tout simplement qualifié cette possible nomination « d’illégale » : « Tous les textes, à la fois de déontologie et du code pénal, explique-t-il en faisant référence à la loi de février 2007 sur la modernisation de la fonction publique, indiquent qu'il est interdit à une personne ayant exercé l'autorité publique sur une entreprise privée, qu'elle soit fonctionnaire ou agent temporaire, d'exercer quelque fonction que ce soit dans cette entreprise avant un délai de trois ans révolus ».

Interrogée sur ce point lundi matin, la ministre de l’Economie et des Finances, Christine Lagarde, s’est contentée de répondre : « Il y a une commission de déontologie dans la fonction publique, qui est toujours saisie dans l’hypothèse où un haut fonctionnaire quitte la fonction publique pour rejoindre telle ou telle société ».

Entre 2,5 et 5 milliards d’euros injectés par l’Etat

Si la ministre a de nouveau refusé de commenter les rumeurs sur la nomination de François Pérol, elle a en revanche confirmé l’engagement de l’Etat à hauteur de 2,5 à 5 milliards d’euros dans l’ensemble issu de la fusion Caisses d’Epargne – Banques Populaires ; cet engagement se fera sous forme de prêts subordonnés (en cas de mise en liquidation, ce type de prêt ne doit être remboursé qu’après indemnisation de tous les créanciers).

L’Etat détiendra donc une participation de 15 à 20% dans la nouvelle banque, mais sans nécessairement siéger au conseil d'administration ni dans aucune instance dirigeante du groupe. En la matière, l'Elysée se borne à dire qu'aucune décision n'a été prise pour l’instant et ne sera pas annoncée d’ici jeudi. C’est ce jour-là que les deux banques doivent publier leurs résultats et annoncer du même coup la fusion et ses modalités.