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Justice internationale

Ouverture du Tribunal spécial pour le Liban

Article publié le 28/02/2009 Dernière mise à jour le 01/03/2009 à 09:56 TU

Le Tribunal spécial pour le Liban, créé par les Nations unies s’installe officiellement ce dimanche à La Haye. Il disposera, comme base de travail, des résultats de la Commission internationale d’enquête mise sur pied deux mois après l’assassinat, le 14 février 2005, de l’ancien chef du gouvernement libanais Rafic Hariri. Mais quatre ans après les faits, beaucoup reste à faire pour traduire en justice les auteurs de cet attentat qui avait fait 23 morts.

De notre envoyé spécial à La Haye, Franck Weil-Rabaud

A Beyrouth, des Libanais supporters de l'ancien Premier ministre assassiné Rafic Hariri, scandent des slogans contre la Syrie.(Photo: AFP)

A Beyrouth, des Libanais supporters de l'ancien Premier ministre assassiné Rafic Hariri, scandent des slogans contre la Syrie.
(Photo: AFP)

C’est dans d’anciens locaux appartenant aux services secrets néerlandais, dans la banlieue de La Haye, que le Tribunal spécial pour le Liban entame officiellement ce dimanche ses travaux. Une inauguration purement symbolique. Le greffier du tribunal, le Britannique Robin Vincent, reconnaît qu’«il est improbable que le tribunal achève ses travaux avant trois ans. Il faudra plutôt compter entre trois et cinq ans ».

C’est le 10 juin 2007, soit deux ans et demi après l’assassinat de l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri et de vingt-deux autres personnes dans un attentat à la voiture piégée, que le tribunal voit le jour, conformément à la résolution 1757 des Nations  unies. Sa création n’a pas été sans mal. L’opposition libanaise, proche de la Syrie, soupçonnée d’être impliquée dans l’attentat, s’oppose à la mise en place de cette juridiction mixte, composée de magistrats internationaux et libanais. Le tribunal est officiellement créé alors que le Parlement libanais a refusé d’entériner l’accord signé entre le gouvernement libanais et l’ONU qui prévoit la création de ce tribunal.

Une structure juridique complexe

Rafic Hariri.(photo: AFP)

Rafic Hariri.
(photo: AFP)

Installé aux Pays-Bas, le Tribunal spécial pour le Liban appliquera néanmoins les procédures prévues par le code criminel libanais relatif au terrorisme et aux crimes de sang. Toutefois, même si la loi libanaise le prévoit, les éventuels condamnés échapperont à la peine de mort et aux travaux forcés.

Dans un premier temps, un juge international est chargé de valider d’éventuelles inculpations, d’émettre les mandats d’arrêt nécessaires et de veiller à l’équité du procès. Deux juges libanais et trois confrères étrangers seront ensuite chargés de conduire les débats proprement dits. C’est le président du tribunal qui choisira le pays dans lequel les éventuels coupables purgeront leur peine à partir d’une liste d’Etats ayant donné leur accord pour accueillir les coupables éventuels. Mais il faudra plusieurs années avant que la justice ne rende son verdict dans une affaire où les vérités établies font encore largement défaut.

Une enquête judiciaire aux implications politiques

Deux mois après l’attentat du 14 février 2005, une Commission internationale d’enquête sous l’égide de l’ONU est mise sur pied. C’est un magistrat allemand, Detlvev Mehlis, qui en prend la tête. Très rapidement, les rapports de cette commission se montrent très précis sur les commanditaires et les auteurs présumés de l’assassinat de Rafic Hariri. Ils évoquent des « preuves convergentes » de la responsabilité des services libanais et syriens dans cet attentat. Les rapports citent même des proches du président syrien Bachar al-Assad.

La médiatisation de ces accusations est vivement critiquée et en janvier 2006, Detlev Mehlis démissionne et cède sa place au magistrat belge Serge Bramertz.  La commission d’enquête se montrera dès lors beaucoup plus discrète dans sa communication et moins catégorique dans ses accusations. Conséquence probable de cette nouvelle attitude, le président syrien accepte de recevoir en avril 2006 les membres de la commission d’enquête. Visite qui se doublera d’une coopération totale de son pays qui se poursuit jusqu’à ce jour. C’est en tout cas ce qu’affirme le 11ème et ultime rapport d’étape de la commission d’enquête qui depuis novembre 2007 est dirigé par le canadien Daniel Bellemare.

C’est ce dernier qui va troquer ce dimanche cette casquette d’enquête en chef pour celle de procureur du Tribunal spécial pour le Liban. Il est sans nul doute le mieux placé pour savoir que le travail de la justice internationale sera encore long avant qu’elle ne puisse dire avec certitude qui, le 14 février 2005, a planifié un attentat qui a fragilisé un peu plus encore  le Liban déjà déchiré par les antagonismes politiques. Pour l’heure, seuls quatre anciens responsables des organes de sécurité et de renseignements libanais sont en prison dans leur pays pour une implication présumée dans l’attentat. Ils pourraient être les premiers suspects à être transférés à La Haye pour y être jugés.

A écouter

Nicolas Sénahoui, futur candidat de l’opposition chrétienne à Beyrouth

« Défendre le Liban, c'est renouer avec un processus international qui n'est pas engagé d'une manière partisane avec des blocs ou des pôles ».

01/03/2009

Joseph Maïla, professeur de sociologie politique

« L’accumulation des preuves matérielles ne donnait pas lieu à des pistes (...), on a gardé tout cela dans une espèce de flou artistique ».

01/03/2009