Article publié le 13/03/2009 Dernière mise à jour le 15/03/2009 à 16:26 TU
L’arrêt GEMS confirmé par les jurisprudences ultérieures
Pendant longtemps, les dispositions de la loi de 1994 n’ont pas eu de réelle portée. Jusqu’en 2006 précisément. Le 2 mars, la Cour d’appel de Versailles s’est prononcée pour la première fois sur leur application, dans un arrêt rendu contre General Electric Medical Systems (GEMS).
Un logiciel, un manuel mal traduits sont à l'origine d'accidents de radiothérapie au centre hospitalier d'Epinal, en 2006.
© AFP
Dans les entreprises, les réactions se multiplient effectivement. Ainsi, les délégués CFDT de Rhodia Opérations Belle Etoile ont, le 18 novembre 2008, «rappelé à la direction son obligation à fournir pour n’importe quels documents ou logiciels de travail une version française, et non pas "franglaise" voire anglaise, nécessaire aux salariés pour l’exécution de leurs taches quotidiennes ». Un mois plus tard, chez Tecnip, ce sont les délégués du personnel UGICT CGT qui «demandent une nouvelle fois à la direction de faire respecter les dispositions légales qui prévoient la diffusion des documents et notes au minimum en français ».
Les scientifiques ne sont pas en reste. Le 27 mai 2008, le directeur de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur s’est vu remettre les 9000 signatures de la pétition «Les Scientifiques doivent-ils continuer à écrire en français ?». Les signataires réclament la prise en compte, pour l’évaluation d’un scientifique, des travaux qu’il a publiés en français, et pas seulement de ceux publiés en anglais, comme le pli en a été pris. Les signatures viennent de tous les coins du monde : France, Belgique, Maghreb mais aussi Italie, Espagne et Canada…
Au Québec, un certificat de francisation délivré aux sociétés où le français est généralisé
Au Québec, la Charte de la langue française, adoptée en 1977, vise à faire du français la langue d’usage normale et habituelle du travail, du commerce et des affaires. Son article 4 institue le droit fondamental de tout Québécois à travailler en français. Pour les entreprises qui emploient 50 personnes ou plus au Québec, elle propose (art.135 à 154) une démarche et des délais pour que l’implantation du français soit au cœur des activités québécoises de ces entreprises.
Deux sociologues québécois, Pierre Bouchard et Claire Chénard, ont présenté, lors du colloque «Le français, une langue pour l’entreprise», le processus permettant d’obtenir le certificat de francisation.
La société doit s’inscrire auprès de l’Office québécois de la langue française, qui analyse sa situation linguistique. Si elle ne satisfait pas aux éléments de la Charte, elle doit élaborer puis appliquer un programme de francisation. Une fois le certificat de francisation délivré, avec ou sans programme, l’entreprise a l’obligation de continuer à suivre la situation pour évaluer le maintien du français généralisé. Le taux de certification des entreprises québécoises, de 71,4 % fin mars 2002, est passé à 80,7 % fin mars 2007.
Les travailleurs québécois moins gênés que les salariés français
Selon les dernières enquêtes de terrain effectuées au Québec, 62% des salariés déclarent que leur travail implique de parler ou écrire une autre langue que le français – 27% fréquemment et 35% occasionnellement. La langue utilisée le plus souvent au travail est d’abord le français (75%), suivi par l’anglais (10%), les deux langues étant employées ensemble dans 15 % des cas. Les travailleurs québécois utilisant l’anglais le font dans les relations avec le supérieur immédiat dans 27,5% des cas (16 % pour les Français), et avec leurs collègues dans 49 % des cas (21% pour les Français). Enfin, 20% des travailleurs sont fréquemment confrontés à des notices et modes d’emploi non rédigés en français et 27% occasionnellement, soit 47% au total, contre 32% en France. Cela gène 12 % des travailleurs au Québec et 22% des travailleurs en France.
Ariane Poissonnier & Lisa Ségovia/MFI
Le dossier
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12/03/2009