par Aurélien Colly
Article publié le 26/06/2009 Dernière mise à jour le 29/06/2009 à 09:29 TU
Chronologie des événements en Iran
Vendredi 12 juin – Vendredi 26 juin
Deux semaines de protestations, de violences et de répression.
Quatre candidats à l'élection présidentielle iranienne de 2009 : Mehdi Karoubi (haut g.), Mohsen Rezaï (haut d.), Mahmoud Ahmadinejad (bas g.), Mir Hossein Moussavi (bas d.).
(Photo : Morteza Nikoubazl/Reuters)
- Mahmoud Ahmadinejad, le président sortant ultraconservateur
- Mir Hossein Moussavi, réformateur indépendant et ancien Premier ministre
- Mehdi Karoubi, religieux réformateur et ancien président du parlement
- Mohsen Rezai, conservateur indépendant, ancien commandant des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de la République islamique.
Dés la fermeture des bureaux de vote, Mahmoud Amadinejad et Mir Hossein Moussavi revendiquent la victoire.
Les partisans du président iranien, Mahmoud Ahmadinejad fêtent sa victoire dans les rues de Téhéran, le 13 juin 2009.
(Photo : AFP)
Un partisan du candidat Moussavi lors d'une manifestation à Téhéran, le 13 juin 2009.
(Photo: Reuters)
Les partisans de Mahmoud Ahmadinejad ripostent et organise un contre-rassemblement à Téhéran. L’occasion pour le président réélu de déclarer que les élections sont « les plus propres » jamais organisées.
De son côté, Mir Hossein Moussavi annonce qu’il a demandé l’annulation du scrutin au Conseil des Gardiens de la Constitution, organe chargé du contrôle du bon déroulement de l’élection présidentielle.
L’ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême de la Révolution, appelle Mir Hossein Moussavi à utiliser les voix légales et pacifistes pour contester les résultats. La plus haute autorité de la République islamique demande également au Conseil des Gardiens d’étudier les irrégularités dénoncées par les candidats perdants.
Dans le monde, les réactions sont contrastées. Washington se montre « réservé », l’Union européenne « préoccupée » par les « irrégularités présumées ».
Dans la soirée, des miliciens bassidji attaquent des dortoirs de l’université de Téhéran.
Des partisans de Moussavi lors d'une grande manifestation dans les rues de Téhéran le 15 juin 2009.
(Photo: AFP)
Le Conseil des Gardiens de la Constitution annonce qu’il va étudier les irrégularités et fraudes présumées soulevées par les trois candidats perdants.
Dans la soirée, des miliciens bassidji tirent sur des manifestants qui attaquent une de leurs bases dans la capitale. Sept civils sont tués.
L’Union Européenne demande à l’Iran d’enquêter sur les accusations de fraude électorale. Le président américain Barack Obama se dit « profondément troublé par les violences ».
Mardi 16 juin : Dans la nuit, deux proches de l’ancien président réformateur, Mohammad Khatami sont arrêtés. Le président du parlement, Ali Larijani, conservateur influent, tient le ministre de l’Intérieur, Seyed Sadeq Mahsouli, pour responsable des attaques contre des étudiants à l’Université de Téhéran dimanche soir.
L'ayatollah Ali Khamenei s'est dit favorable à un recomptage partiel des voix si nécessaire, le 16 juin 2009.
(Photo : Caren Firouz/Reuters)
Des milliers de partisans de Mir Hossein Moussavi se regroupent dans le nord de Téhéran en dépit des appels de leur chef à renoncer à toute manifestation pour éviter une confrontation directe avec des manifestants pro-Ahmadinejad rassemblés dans le centre. Les partisans d’Ahmadinejad accusent les « ennemis de l’Iran, en particulier les Etats-Unis, la Grande Bretagne et Israël » de « s’ingérer dans les affaires internes du pays, de comploter contre le régime et d’apporter un soutien médiatique aux groupes ennemis, aux émeutiers et aux voyous ».
Le grand Ayatollah dissident Hossein Ali Montazeri appelle la jeunesse iranienne à poursuivre sa mobilisation pour « réclamer ses droits » pacifiquement.
Le régime interdit aux journalistes étrangers de quitter leur bureaux ou domicile pour couvrir les manifestations de protestations.
Mercredi 17 juin : Cinquième jour de mobilisation des partisans de Mir Hossein Moussavi qui demande toujours l’annulation du scrutin du 12 juin et à l’organisation de nouvelles élections. Des centaines de milliers de manifestants défient le régime et défilent silencieusement dans les rues de Téhéran.
La répression s’accentue. Reporter Sans Frontières annonce que des dizaines de journalistes et de bloguers ont été arrêtés ou se cachent pour éviter d’être interpelés.
En Corée du Sud, des joueurs de l’équipe de football iranienne portent un brassard vert – la couleur du mouvement de Moussavi - pendant un match de qualification de la Coupe du Monde 2010.
La mobilisation des partisans de Mir Hossein Moussavi ne faiblit pas dans les rues de Téhéran en ce 18 juin 2009.
(Photo : Reuters)
Le Conseil des Gardiens de la Constitution annonce que les trois candidats perdants lui ont soumis 646 cas d’irrégularités ou de fraude lors du scrutin du 12 juin.
L’Agence de presse étatique annonce que c’est l’ayatollah Ali Khamenei en personne qui dirigera la grande prière du vendredi à Téhéran, en présence des milices bassidji du régime.
Vendredi 19 juin : Pour la première fois depuis le début de leur mouvement, les partisans de Moussavi annulent une manifestation prévue à l'Université de Téhéran où l’ayatollah Ali Khamenei dirige la grande prière du vendredi. Dans son prêche, le guide suprême exclut toute « fraude » dans le scrutin, déclarant que « le peuple a choisi celui qu'il voulait » comme président. Il exige la fin des manifestations, avertit qu'il «ne cèdera pas à la rue » et met en garde l'opposition contre les violences que son « extrémisme » pourrait entraîner. Il fustige aussi l'attitude des puissances étrangères, en particulier des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et d’Israël, accusées de soutenir les contestataires.
Le président américain Barack Obama avertit que « le monde observe » l'Iran. L'Union européenne appelle les autorités iraniennes à garantir le droit « de tous les Iraniens à se rassembler et à s'exprimer pacifiquement ».
Samedi 20 : Le Conseil des Gardiens de la Constitution propose un recompte de 10% des urnes, choisies au hasard. Les candidats Moussavi et Karoubi, qui doivent exposer devant le Conseil leurs réclamations, décident de ne pas s'y rendre.
Nouvelle mise en garde des autorités: aucune manifestation n’est autorisée, tout rassemblement sera fermement réprimé.
Le candidat perdant Mehdi Karoubi renonce à une marche de protestation prévue dans l’après-midi à Téhéran. Les partisans de Mir Hossein Moussavi ne donnent pas d’ordre d'annulation.
Un attentat suicide a lieu à Téhéran, au mausolée de l’ayatollah Ruollah Khomeini, le père-fondateur de la République islamique.
Déploiement massif de forces de l’ordre dans le centre de la capitale. Des groupes de manifestants qui tentent de se rassembler se heurtent aux forces de l’ordre autour de la place Azadi.
Un jeune Iranienne Neda Agha Soltan est tuée d’une balle dans la poitrine. Sa mort est filmée par un manifestant. Mise en ligne sur Internet, la vidéo fait le tour du monde. Neda devient le symbole de la répression du régime.
Le rédacteur en chef du quotidien réformateur Etemad Melli dirigé par Mehdi Karoubi est arrêté. Arrestation aussi de la fille de l'ancien président Akbar Hachemi Rafsandjani et de quatre membres de sa famille.
Image extraite d'une vidéo postée sur YouTube montrant un blessé après la manifestation du 20 juin à Téhéran.
(Source: AFP / You Tube)
La chancelière allemande Angela Merkel demande un nouveau décompte des votes. Le président français Nicolas Sarkozy qualifie d’inexcusable l’attitude du régime iranien. Paris et Berlin demandent à Téhéran de s’abstenir de toute violence contre les manifestants.
L’Iran convoque les ambassadeurs et représentants des 27 pays européens en poste à Téhéran. Le ministre iranien des Affaires étrangères Manouchehr Mottaki accuse la Grande-Bretagne de complot. Mahmoud Ahmadinejad demande à Washington et Londres de cesser leurs « ingérences ». Le correspondant permanent de la BBC à Téhéran est expulsé. Un journaliste canadien travaillant pour l'hebdomadaire américain Newsweek est arrêté.
Reporters sans frontières annonce que 33 journalistes et cyberdissidents iraniens sont sous les verrous.
Mir Hossein Moussavi appelle ses partisans à la « retenue » mais réaffirme que « protester contre la fraude est un droit du peuple ».
Lundi 22 juin : Le Conseil des Gardiens de la Constitution reconnaît des irrégularités dans le scrutin, notamment le fait qu’il y ait eu plus de votes que d'électeurs dans une cinquantaine de districts. Ces irrégularités n'auraient toutefois pas eu « d'influence importante sur le résultat final ».
La fille de l'ancien président Akbar Hachemi Rafsandjani arrêtée samedi est libérée.
Les manifestations restent interdites. Les Gardiens de la révolution, l'armée idéologique du régime, menacent ceux qui se rassembleraient d'une riposte « décisive et révolutionnaire ». Un millier de partisans de l'opposition manifestent quand même pendant trois heures dans le centre de Téhéran, avant d’être dispersé par la police. 50 à 60 personnes sont arrêtées.
Une nouvelle fois, le régime accuse les pays occidentaux, notamment la Grande-Bretagne et la France, « d'ingérence ». L'Union européenne juge « infondées et inacceptables » ces accusations. A New York, le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon demande un arrêt immédiat « des arrestations, des menaces et du recours à la force » contre des civils.
Mardi 23 juin : Dans un rapport détaillé, le camp de Moussavi étaie ses accusations de fraude et d’irrégularités lors du scrutin du 12 juin. « Des bulletins de vote ont été imprimés le soir de l'élection sans avoir de numéro de série, ce qui est sans précédent dans l'histoire du pays », souligne notamment le document.
Le ministère de l'Intérieur appelle Mir Hossein Moussavi à « respecter la loi et le vote du peuple ».
Le président Obama a durci le ton contre le régime iranien, lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche, mardi 23 juin.
(Photo : Reuters)
Mercredi 24 juin : L’un des trois candidats perdants, le conservateur Mohsen
Rezaï, retire sa plainte pour irrégularités. L’ayatolah Ali Khamenei déclare que les autorités ne « céderont pas » face aux manifestants. Le ministre iranien de l'Intérieur Seyed Sadeq Mahsouli accuse les « émeutiers » d'avoir reçu des fonds de la CIA et de l'opposition en exil. La police annonce que 25 employés du quotidien Kalemeh Sabz, le journal de Moussavi, ont été arrêtés. Des « documents prouvant l'existence d'un complot contre la sécurité nationale » auraient été trouvés dans les locaux du journal.
Dans les rues de Téhéran, une imposante présence policière dissuade quelques centaines de personnes de manifester.
Le ministre iranien des Affaires étrangères Manouchehr Mottaki confirme qu'il ne se rendra pas en Italie pour une réunion sur l'Afghanistan en marge d'une rencontre du G8 à Trieste.
Jeudi 25 juin : Au moins 140 hommes politiques, universitaires, étudiants et journalistes iraniens sont sous les verrous depuis le début de la contestation des résultats de l’élection présidentielle.
Le candidat réformateur Mehdi Karoubi annule une cérémonie à la mémoire des manifestants morts au cours des journées de protestation faute d'autorisation.
Mir Hossein Moussavi dit être la « cible de pressions du pouvoir pour retirer sa demande d'annulation de la présidentielle ». Les menaces ne l'« empêcheront pas d'obtenir des droits pour les Iraniens », précise-t-il.
Le grand ayatollah Hossein Ali Montazeri a mis, ce 25 juin 2009, en garde le pouvoir iranien contre la répression des protestations.
(Photo : Raheb Homavandi/Reuters)
L'Assemblée du Conseil de l'Europe demande à Téhéran de « permettre une enquête indépendante et crédible sur les allégations d'irrégularités » lors du scrutin du 12 juin. La chaîne publique anglophone Press TV annonce que huit membres de la milice islamique bassidji ont été tués dans les manifestations.
En marge de la réunion du G8 à Trieste, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, met en garde contre le risque d'« isoler » le régime de Téhéran.
Vendredi 26 juin : Le porte-parole du Conseil des Gardiens de la Constitution, Abbasali Kadkhodai, affirme qu'aucune fraude électorale n'a entaché la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad, dès le premier tour, le 12 juin.
Les autorités annoncent l'arrestation d'un journaliste gréco-britannique, Jason Fowden, travaillant pour le Washington Times.
A la prière du vendredi de Téhéran, le religieux ultraconservateur Ahmad Khatami, demande au gouvernement de « mieux contrôler » la presse étrangère qui a « provoqué les manifestations » et a jeté « de l'huile sur le feu ». Ahmad Khatami estime aussi que « les émeutiers qui incendient les mosquées, les autobus et détruisent les biens publics » doivent être condamnés à mort. Quant à la mort d’une jeune Iranienne samedi 20 juin devant les caméras, Ahmad Khatami estime que les émeutiers ont « créé cette histoire de toute pièce ». Des témoins ont affirmé que la jeune femme devenu l’emblème de la répression du régime avait été abattue par un milicien bassidji.
A Trieste, en Italie, les ministres des Affaires étrangères du G8 ont déploré les violences en Iran. Dans leur déclaration finale, ils demandent à Téhéran de respecter les droits fondamentaux des Iraniens, notamment la liberté d'expression. Les violences doivent "cesser immédiatement" a ajouté le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini, hôte de cette réunion.