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Traité de Lisbonne : et maintenant ?

par Patrick Adam

Article publié le 05/10/2009 Dernière mise à jour le 05/10/2009 à 19:52 TU

Malgré le « oui » irlandais, la route vers l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne parait encore semée d’embûches. Si le président polonais ne devrait plus faire obstacle bien longtemps, en revanche les responsables européens s’inquiètent de voir le président tchèque vouloir faire durer le suspens, et l’opposition britannique revenir sur le vote des députés au profit d’un référendum.

Le président tchèque Vaclav Klaus lors d'une manifestation contre le Traité de Lisbonne à Prague, le 3 octobre 2009.(Photo: Reuters)

Le président tchèque Vaclav Klaus lors d'une manifestation contre le Traité de Lisbonne à Prague, le 3 octobre 2009.
(Photo: Reuters)

Le référendum irlandais était la principale inconnue sur la route vers une application du Traité de Lisbonne. Mais à peine le virage favorablement négocié à l’occasion de ce second référendum, d’autres obstacles surgissent à l’horizon. Il ne s’agit plus cette fois pour Bruxelles de gérer les aléas d’une consultation électorale, mais de contrer une opposition politique de leaders européens, qui à l’instar du Tchèque Vaclav Klaus ou du Britannique David Cameron brandissent très haut le flambeau de l’euroscepticisme.

Kaczynski va signer

La difficulté la plus facile à aplanir sera sans doute la polonaise. Le Traité a été voté par les parlementaires, il est soutenu par le gouvernement de Donald Tusk, seul le chef de l’Etat eurosceptique Lech Kaczynski retient sa signature. Une obstruction de sa part qui apparaît plus comme un moyen d’exister sur la scène intérieure que comme une réelle volonté de paralyser le fonctionnement des 27 que le nouveau traité est censé faciliter.

Lech Kaczynski a toujours fait valoir qu’il parapherait le document si le vote irlandais était positif. Sa signature dès lors ne devrait être qu’une question de délai. Mais un proche collaborateur annonce que le président Kaczynski prendra son temps avant de signer le Traité de Lisbonne, un moyen sans doute de ne pas apparaître comme réagissant aux évènements et tenter d’imposer son propre tempo.

 Klaus joue la montre

Mais ce qui inquiète sérieusement les responsables européens, c’est l’attitude du voisin tchèque. Là encore le Traité a déjà été avalisé par le Parlement et le Sénat, et c’est le chef de l’Etat qui refuse d’y apposer sa signature. Ultralibéral de conviction, eurosceptique assumé, le président Vaclav Klaus poursuit un objectif différent de celui de son homologue polonais. Cette fois il s’agit très clairement d’empêcher le Traité de Lisbonne de voir le jour. Envers et contre tous, qu’il s’agisse de la majorité parlementaire tchèque, ou de ses partenaires au sein de l’Union.

Pour l’heure, Vaclav Klaus dispose d’un argument de poids. Des sénateurs de sa formation ont introduit de nouveaux recours contre le Traité devant la Cour constitutionnelle. Il a donc beau jeu d’affirmer ne rien pouvoir faire avant que la Cour ne statue. Il faudra deux à trois semaines pour que la Cour décide de la recevabilité des recours, puis sans doute deux à trois mois pour qu’elle tranche. Après c’est l’inconnue.

Une réunion a été convoquée mercredi 7 octobre à Bruxelles par la présidence suédoise. Elle réunira le président de la Commission José Manuel Barroso et le Premier ministre tchèque Jan Fischer. Car Vaclav Klaus n’entend pas en rester là.

Cameron en embuscade

Il sait ne pouvoir tenir éternellement dans cette posture, alors probablement déçu par le référendum irlandais voilà qu’il table désormais sur les élections britanniques. Des législatives se tiendront en juin en Grande-Bretagne, l’opposition conservatrice a toutes les chances de l’emporter, et le Traité de Lisbonne devient là encore un enjeu électoral.

A Londres comme dans toute les capitales d’Europe où le Traité devait être ratifié par voie parlementaire, les députés se sont déjà prononcés, et comme partout ailleurs ils se sont dit favorables au Traité de Lisbonne. Un acquis que les conservateurs britanniques, emmenés par David Cameron, prévoient de remettre en cause. Néanmoins il y a débat.

Pour donner satisfaction aux plus eurosceptiques de son parti, le chef des Tories avait annoncé qu’une fois parvenu au pouvoir, il convoquerait un référendum quoiqu’il advienne. Il semble avoir assoupli ses positions puisque désormais il affirme qu’une consultation populaire ne sera convoquée qu’à la condition que le processus de ratification ne soit pas achevé dans l’ensemble des 27. D’où l’importance de ce que fera Vaclav Klaus. Alors que le parti conservateur est réuni en congrès annuel à Manchester, ses responsables préviennent qu’il n’y aura pas à cette occasion de nouvelles déclarations sur la stratégie européenne du parti.

Inquiétude européenne

Le Premier ministre suédois, dont le pays assume la présidence tournante de l’UE, affirme dans un entretien au journal français Le Monde que le président tchèque « devra signer » le Traité de Lisbonne mais estime que des menaces seraient « contreproductives ». Quant à la Grande-Bretagne, Fredrik Reinfeldt reconnait qu’il a rencontré le chef des conservateurs. « Nous ne sommes pas d’accord au sujet d’un référendum sur le traité » mais comme pour tenter de se rassurer il ajoute : « pour moi, c’est un pays qui a déjà ratifié le traité. »

La France, par la voix de son secrétaire d’Etat aux Affaires européennes s’adresse aux « récalcitrants ». Pierre Lellouche invite le Tchèque à « ne pas se perdre en circonlocutions dilatoires » et conseille aux Britanniques de « ne pas s’isoler » dans une attitude anti-européenne.

La présidence de l’UE : un poste convoité

Tony Blair, qui n'a pas brillé à son poste d'envoyé spécial du Quartet pour le Proche- Orient, investi après avoir quitté le 10 Downing Street, a fait part depuis longtemps de son intérêt pour la présidence de l'Europe. Le problème, c'est qu'il n'est pas soutenu par sa propre famille politique.

 

Les socialistes européens lui reprochent sa participation à la guerre en Irak et ses positions libérales. Et certains dirigeants ne veulent pas à ce poste majeur d'un homme politique qui n'a pas su faire entrer la Grande-Bretagne dans la zone euro alors qu'il en avait proclamé l'ambition.

 

D'autres noms sont avancés pour ce poste, ceux de l'actuel Premier ministre néerlandais Peter Balkenende ou de l'ancienne présidente irlandaise Mary Robinson. Pour le poste de ministre des Affaires étrangères, les candidats affluent : Finlandais, Français, Suédois... Il faudra bien sûr trouver un subtil équilibre entre nationalités, petits et grands pays, originaires de l'est et de l'ouest du continent.

 

Et surtout en effectuant leur choix, les dirigeants des 27 décideront de mettre à la tête de l'Europe soit des personnalités charismatiques soit des profils beaucoup plus effacés qui ne risqueront pas de promouvoir une Europe puissance, ce qui est plutôt le cas du président de la Commission qui vient d'être renouvelé.