par Kèoprasith Souvannavong
Article publié le 07/10/2009 Dernière mise à jour le 07/10/2009 à 14:40 TU
« Financé en grande partie par les gouvernements provincial et fédéral, le cinéma québécois a connu des hauts et des bas. Mais depuis une quinzaine d’années, il va relativement bien. Beaucoup de films circulent à l’étranger, comme La Grande séduction, Crazy, Les Invasions barbares », affirme Sébastien Rose, qui assure le suivi de l’Atelier Grand-Nord, un forum où des cinéastes de la francophonie se réunissent pour faire avancer leurs scénarios. Le réalisateur de Comment ma mère accoucha de moi durant sa ménopause, projeté au FIFF six ans auparavant, souligne que « depuis l’été dernier, le cinéma québécois est sur une bonne lancée. Non seulement il s’exporte, mais il domine aussi sur son territoire grâce à une volonté d’offrir un cinéma diversifié, où il n’y a pas seulement un genre qui est privilégié au détriment d’un autre. ». Une volonté qui a porté ses fruits, comme l’illustre le succès phénoménal de De père en flic et de J’ai tué ma mère.
Comédie légère au titre accrocheur signée Emile Gaudreault, De père en flic met en scène deux policiers père et fils travaillant dans une même équipe. Incapables de s’entendre, ils doivent retrouver un collègue enlevé par des motards criminels. Leur seule chance est de faire craquer l’avocat des motards. Celui-ci pourrait trahir la bande mais reste intraitable, jusqu’au jour où, pour contrer les tendances suicidaires de son fiston, il passe une semaine avec lui en forêt pour une thérapie de groupe « père-fils » organisée par un psychologue. Les deux policiers père et fils sont aussi du voyage, avec une mission bien précise : essayer de convaincre l’avocat de collaborer.
Une scène du film De père en flic, du réalisateur québécois Emile Gaudreault.
(Crédit : Cinémaginaire Inc., Canada)
« Se dire ce que l’on ne s’est jamais dit »
Tourné en partie au Parc national des Grands-Jardins, près de Baie-Saint-Paul, et à Saint-Lazare, près de Montréal, le film emmène les spectateurs dans un décor naturel où les arbres symbolisent des pères et des fils et où l’homme essaie de retrouver ses racines. Haine du géniteur absent ou trop présent, haine de soi, et sentiment de culpabilité sont des thèmes qui jalonnent cette comédie rocambolesque, finement enrichie d’une touche émotionnelle.
Emile Gaudreault, réalisateur, est aussi co-scénariste du film De père en flic.
(Photo : Kèoprasith Souvannavong / RFI)
Sorti le 8 juillet au Québec, De père en flic est toujours à l’affiche. Sur les 7,5 millions d’habitants que compte la province, près d’un sur cinq l’a déjà vu. Le film a fait deux fois plus d’entrées qu’Harry Potter ou L’Age de glace. L’engouement pour cette comédie grand public a même incité un gros producteur américain à vouloir en faire une nouvelle version. Les négociations sont en cours. La date de sortie en France n’est en revanche pas déterminée, le film n’ayant pas encore de distributeur pour l’Hexagone.
« J’ai tué ma mère »
Toujours sur la même thématique, celle de la difficulté des relations parents-enfants, un autre long métrage au titre sans ambiguïté : J’ai tué ma mère, premier film du jeune prodige Xavier Dolan, âgé à peine de 20 ans. Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs au dernier Festival de Cannes, le film a créé l’événement et a remporté trois prix.
Hubert, 16 ans, interprété par Xavier Dolan lui-même, méprise totalement sa mère, Chantale, quadragénaire et divorcée. Il ne voit en elle que ses pulls ringards et sa décoration kitch. Chantale, elle, est championne pour manipuler et culpabiliser, mais reste sourde aux tourments adolescents de son rejeton. Entre les deux, c’est l’amour-haine. Lors de ses fréquentes crises de colère homériques, Hubert pratique une violence verbale déconcertante. Une violence adoucie parfois par la musique et certains plans au ralenti qui font penser à In The Mood For Love, du Hongkongais Wong Kar-Wai.
J’ai tué ma mère n’est peut-être pas le meilleur film jamais produit, mais il est remarquable au regard du jeune âge de Xavier Dolan, qui fait preuve d'une maturité cinématographique exceptionnelle. Certains parlent même déjà du début d’un grand cinéaste.
A l’affiche depuis dix-huit semaines partout au Québec, J’ai tué ma mère sortira au Canada anglophone et aux Etats-Unis le 5 février prochain. Il représentera le Canada pour la course aux Oscars dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère.