Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Photojournalisme

Gamma, bientôt couleur sépia ?

par Elisabeth Bouvet

Article publié le 29/07/2009 Dernière mise à jour le 29/07/2009 à 14:42 TU

La célèbre agence française de photojournalisme vit-elle ses dernières heures ? Toujours est-il qu’elle a été déclarée, ce mardi 28 juillet, en cessation de paiements auprès du tribunal de commerce de Paris. La société Eyedea Presse qui chapeaute à la fois Gamma et le fonds Stills, devrait proposer ce jeudi un « projet de continuation de l’entreprise ». C’est en tout cas ce qu’a laissé entendre Stéphane Ledoux, son PDG. Une annonce qui n’a pas soulagé les salariés, loin s’en faut. Eyadea Presse (détenue depuis 2007 par le fonds d’investissements Green Recovery, spécialisé dans le rachat d’entreprises en difficultés), ce sont 55 employés dont un peu plus d’une dizaine de photographes et une identité riche de plus de quarante ans de reportages sur tous les fronts.

(Source : Fondation Gilles Caron (1))

(Source : Fondation Gilles Caron (1))

Mai 68 et cette incroyable photographie de Daniel (dit Le Rouge) Cohn-Bendit défiant avec un aplomb et une drôlerie irrésistibles un CRS qui parait immense sous son casque et son long imper noir… Cette image, fameuse entre toutes, on la doit à Gilles Caron, co-fondateur avec le photographe et réalisateur Raymond Depardon de l’agence Gamma en 1966. Outre le Printemps parisien, Gamma a couvert les grands événements de ces quarante dernières années : la guerre du Vietnam, la guerre au Liban, le conflit en Irlande, le Biafra, le Cambodge (où Gilles Caron devait disparaitre en 1970), la chute du mur de Berlin, les guerres en Tchétchénie soit un ensemble de reportages à la fois mémorables et inestimables. Aujourd’hui encore, les noms de Noël Quidu (3 prix World Press), Laurent Van Der Stockt ou encore de Jean-Louis Luyssen sont associés à ce fleuron du photojournalisme. Un fleuron peut-être mais qui ne rapporte plus suffisamment. L’économie de la photo de presse est en effet au bord du gouffre, une réalité dont Gamma fait les frais. En cause, le décalage qui va croissant entre le coût des photographies et leur prix de vente, la crise de la presse ainsi que la concurrence des agences comme l’AFP et Reuters.

Conséquence, les signes d’une mort annoncée se multiplient : pas un reporter de chez Gamma lors du défilé du 14 juillet et en septembre prochain, Gamma ne sera pas présente à Perpignan, à Visa pour l’image, le grand rendez-vous du photojournalisme. Une première qui augure mal de l’avenir de l’agence, et plus généralement, si Gamma devait disparaitre, de cette entité générique qu’est l’information.

(1) Tandis que l'Agence Gamma est menacée, le travail du co-fondateur de l'agence, Gilles Caron (disparu en 1970) est à l'honneur à Paris : une exposition à la Galerie Thierry Marlat et un colloque le 3 juillet dernier à l'Institut national de l’histoire de l’Art.