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Visa pour l'Image 2009

Les photographes et les nouvelles technologies

par Marion Urban

Article publié le 29/08/2009 Dernière mise à jour le 05/09/2009 à 18:45 TU

Depuis le début des années 90, le métier de photographe a connu un certain nombre de bouleversements : l'apparition des appareils numériques, le développement d'Internet et la mondialisation des banques d'images qui offrent des photos à des prix de plus en plus bas. Comment les photographes se sont adaptés à ces changements. Quelles sont les perspectives du métier.






Rapide comme l'éclair

«Dès que les appareils numériques ont atteint la qualité "pro", nous avons adopté ces nouveaux appareils photos».

Dans la mémoire de Mallory Longstone, chef du service photo de Reuters*, l'entrée du numérique dans son agence de presse s'associe au Championnat du monde de Football à Paris, en 1998. Dans celle de Vaclav Neumann, les premiers essais du numérique à l'AFP** remontent aux Jeux olympiques de Séoul, en 1988. Mais tous deux sont formels : le numérique est tout bénéfice.

Les agences de presse internationales sont de fait les seules dans les années 90 qui ont les moyens financiers de s'équiper car les premiers appareils coûtent cher. Mais surtout elles voient d'emblée les énormes économies de temps et d'argent que va leur faire réaliser le numérique.

Dans la transmission : un photographe  n'a besoin que de quelques minutes voire quelques secondes pour envoyer une photo couleur au service grâce à son nouvel appareil, à son téléphone et son ordinateur portable. Avant 2000, la transmission prenait 30 minutes pour une seule photo et les dépenses en téléphone satellite atteignaient les 15 à 17$ /la minute. La rapidité est aussi du côté des clients: ils ont à disposition des photos dans les heures qui suivent un évènement. Exit dans les budgets des agences, les coûts de laboratoire et de son personnel.

Fini les boites en carton pour archiver les photos.

Fini les boites en carton pour archiver les photos.

La numérisation des photos, stockées désormais sur des disques durs, fait disparaître les tirages papier et les cartons d'archives. On gagne de la place dans les bureaux.
Marie Sumalla, responsable du contenu éditorial à Magnum Photos-Paris, désigne quelques rayons d'étagères : «ce sont nos archives». Les 150 000 photos de Magnum ne sont peut-être pas toutes dans les dossiers, mais leur minceur est déjà impressionnante.

Tout en ligne

La démocratisation des ordinateurs et surtout le formidable développement de la Toile vont faciliter également la vente des photos des agences: «En un clic, le client télécharge la photo qu'il recherche».

Fedephoto comprend vite que la Toile peut constituer un formidable outil de fédération des photographes indépendants. En février 2004, elle lance son portail Internet. À l'époque, la fédération des photographes ne compte que 6 photographes.

«L'idée de départ était de mutualiser la production photos des photographes indépendants , de la rendre "visibles" et de les rendre facilement disponibles pour les iconographes des magazines et des quotidiens, avec une bonne indexation» explique Vincent Leloup, l'un des fondateurs de la Fédération des photographes. «Un quotidien n'a pas le temps de consulter 20 sites de photographes indépendants pour trouver ce qu'il cherche !»

Au début, les photographes se font tirer l'oreille car mettre ses photos sur le site est payant (un abonnement mensuel d'environ 100 euros par mois) et ce n'est pas la "culture" du métier.  Mais quelques années plus tard, Fedephoto renforce son portail avec l'arrivée de photographes de l'actualité politique. C'est l'époque de l'élection présidentielle française. «On a gagné en visibilité et fedephoto est devenue une signature. Elle diffuse les images comme une agence traditionnelle mais ce n'est pas une agence. La photo est payée intégralement par le client au photographe».

Aujourd'hui, le portail regroupe la production de 60 photographes indépendants qui par ailleurs, continuent d'avoir leur réseau personnel de clients.

Vincent Leloup, fondateur de fedephoto

De la difficulté de passer à l'appareil numérique

26/08/2009 par Marion Urban


En 2004, Jean Favreau, ancien photographe de Sygma, réinvestit ses indemnités de licenciement (Corbis rachète Sygma en 2000) dans une aventure similaire:  Pixpalace. La différence est qu'il choisit d'offrir un portail non pas à des photographes indépendants mais aux agences de photos. Son site, basé également sur le principe des abonnements, celui des agences mais aussi celui des clients, propose plus de 5,5 millions de photos originaires de 100 agences et est devenue la référence française en matière de diffusion sur Internet.

Le photojournalisme est un art

L'augmentation du nombre d'images disponibles sur Internet et le recours de plus en plus fréquent des média aux images prises par des amateurs, payées à des tarifs inférieurs à ceux pratiqués dans la profession, ont modifié le fond du métier.«On doit être là où l'amateur n'est pas et mettre en avant notre originalité, proposer un travail plus précis et soigné».

Thierry Ardouin, co-fondateur du collectif Tendance Floue

"Pour vendre une photo à 1 euro, il faudrait que nous en vendions 200 000 par mois"

27/08/2009


À Tendance Floue, il y a encore des cartons de tirages sur les étagères. Olivier Culman en dépose un sur la table, celui de son reportage The Mid Road(La route du milieu) une trajectoire Nord/Sud en plein milieu des Etats-Unis. Notre consultation, tirage après tirage, ressemble à une cérémonie.

Thierry Ardouin, l'un des co-fondateurs du collectif de photographes est encore un mordu de l'argentique. Ce n'est que «contraint et forcé» -il le répètera plus d'une fois- qu'il prend des images en numérique. «Dès notre création en 1991, nous avions choisi un style et des sujets dans lesquels nous nous nous sommes spécialisés. Nous avons tout de suite développé les interventions extérieures comme les projections en multidiaporama dans les festivals et des manifestations». La niche était créée.

Lorsqu'on commande un reportage à Tendance Floue, les clients savent ce qu'ils cherchent : un style, un regard. Bien sûr, les archives sont numérisées, le matériel de projection permet dorénavant des combinaisons audio, vidéo et photos plus riches et variées. Bien sûr,  les impressions à jet d'encre du numérique ont rendu accessibles les prix des oeuvres pour de nouveaux collectionneurs. Mais «si les magazines, les quotidiens et tous les média achètent chez les diffuseurs d'images comme Corbis et Getty, ils vont nous tuer»

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* L'AFP compte environ 300 photographes (salariés et intermittents)
** Reuters compte 600 photographes (salariés et intermittents).

© Zalmaï.