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| 02/03/2007 | |||
| Chronique Littrature | |||
| Ltudiant noir en qute de soi (MFI) Le hros du nouveau roman de Gaston-Paul Effa nest pas un tudiant noir comme les autres. Il naime pas le bruit ! Son got pour la musique classique europenne le rapproche de sa logeuse, ptrie de strotypes concernant lAfrique | |||
| Les Noirs aiment le bruit. Mais ils naiment pas la musique, la grande musique. Le son des tam-tams qui couvre les voix les encourage se trmousser, sextasier sur ces rythmes insolites, entrer dans un diurne sabbat. Cette musique est sauvage, primitive, impulsive. Est-ce parce que, comme eux, elle na jamais grandi ? Ainsi commence, trs fort, A la vitesse dun baiser sur la peau, le neuvime roman du Camerounais Gaston-Paul Effa. Ces quelques premires lignes, dignes des pages les plus sombres de Gobineau, ne donnent pas tout fait le ton de ce rcit grave, qui certes brasse beaucoup de strotypes, mais pour mieux les dconstruire coups de grands clats de rires qui sonnent comme autant dappels au secours. Plus existentiel la faon de La Nause que rabelaisien, ce roman sinscrit dans le parcours hors norme dEffa, qui se distingue nettement de celui des romanciers africains militants. Depuis ses premiers ouvrages parus au dbut des annes quatre-vingt-dix, cet crivain atypique par son inspiration humaniste et mythologique, comme lattestent les titres de ses romans (Tout ce bleu, Cheval-Roi ou Voici le dernier jour du monde), est en train de creuser son sillon propre, sollicitant la philosophie, la pense thologique, la sociologie et linterculturel. Se dployant aux confluents de ces divers champs, sa fiction tente de brosser le portrait en creux de lAfricain moderne, en qute de soi et dun monde marquer de son empreinte. Une relation amoureuse ingale, miroir de la socit franaise Cest ainsi une qute de soi effrne et condamne davance qui est au cur du nouveau roman dEffa. Jeune tudiant, Valre a quitt son Afrique natale, le monde magique de sa grand-mre, pour aller faire des tudes en France. Il atterrit Strasbourg. Son got pour la musique classique europenne le rapproche de sa logeuse Hilda, qui a longtemps cru que les Noirs naimaient que le son des tam-tams. Mon locataire, lui, ncoutait jamais ce genre de musique atroce quaiment les autres Noirs. Grce lui, je me sentais dans une disposition particulirement lucide et sensible, et lenchantement de cette musique gracieuse, accorde la luminosit et la douceur de la soire, me faisait oublier ma solitude. Hilda est ptrie de strotypes concernant lAfrique et les Africains, mais se laisse sduire par son beau locataire qui a vingt ans de moins quelle. La relation amoureuse ingale qui sinstalle entre les deux amants devient miroir dans lequel viennent se reflter les hypocrisies, les angoisses et les peurs dune socit franaise appele se dfinir par rapport lAutre, accepter et grer sa multiculturalit. Mais cette acceptation passe par laffrontement (de Hilda sa mre et ses propres obsessions) et le drame (incomprhension, racisme, tentative de suicide). Et en fin de compte, la passion que connat le hros laide se reconstruire en interrogeant son pass et son prsent, mais aussi en prenant conscience de son libre arbitre dhomme la fois prisonnier et matre de son histoire. N au Cameroun en 1965, Gaston-Paul Effa vit dans lest de la France depuis lge de 16 ans. Il a fait des tudes suprieures de thologie et de philosophie Strasbourg et Paris. Etabli aujourdhui en Lorraine, il partage son temps entre lenseignement et lcriture. Dans ses premiers romans quasi-autobiographiques, placs sous le signe de lexil et de la nostalgie, il a mis en scne son Cameroun natal, mais aussi lenfant quil fut, les bonheurs et les flures de ladolescent arrach sa famille. Puis, la thmatique a volu, le cadre aussi. Cheval-roi (d. du Rocher, 2001), le roman dEffa le plus accompli, se situe en grande partie en France et raconte la solitude, la condition humaine, la vie comme un voyage initiatique quannonce la pense de Goethe mise en exergue : Le plus heureux est celui qui peut nouer la fin de sa vie avec le commencement . Les romans dEffa se caractrisent aussi par leur langue inventive et musicale. A la vitesse dun baiser sur la peau ne droge gure la rgle. Tirthankar Chanda A la vitesse dun baiser sur la peau, par Gaston-Paul Effa. Ed. Anne Carrire, 231 pages, 17 euros. | |||
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