Rechercher

/ languages

Choisir langue
 
Liste des rubriques
MFI HEBDO: Culture Socit Liste des articles

22/04/2008
La littrature africaine fait salon

(MFI) Aprs leur francophonisation et leur ghettosation, le temps serait-il venu de clbrer les lettres africaines ? Plusieurs manifestations littraires sont consacres cette saison lAfrique et ses auteurs. Parmi elles, les Littratures mtisses dAngoulme. Entretien avec Bernard Magnier, charg de sa programmation littraire.

Plusieurs manifestations littraires sont consacres cette saison lAfrique et ses auteurs. La premire ouvrir ses portes sera le Salon africain du livre, de la presse et de la culture de Genve, du 30 avril au 4 mai. Outre les auteurs subsahariens invits participer aux dbats sur le devenir et les transformations des lettres africaines, la manifestation genevoise fera aussi, pour sa cinquime dition, une vire du ct de la littrature gyptienne. LAfrique est galement lhonneur Deauville dont le Salon du livre annuel, Livres et Musiques , fait dialoguer cette anne, lespace dun long week-end (du 1er au 3 mai), littratures et musiques du monde noir. Parmi les invits de la ville normande, plusieurs noms prestigieux, dAlain Mabanckou Daniel Maximin en passant par Eugne Ebod, Ernest Ppin, Lyonel Trouillot... Last but not least, du 7 au 10 mai, en marge des Musiques mtisses , se tient Angoulme la rencontre des Littratures mtisses , o les auteurs africains sont invits deviser sur le thme du mtissage, en prsence dun public amateur de livres et de musiques du monde.

MFI: Est-ce que la multiplication de festivals consacrs la littrature africaine signifie que celle-ci est enfin prise au srieux ?

Bernard Magnier : On assiste aujourdhui deux phnomnes concomitants qui montrent que la littrature africaine est en train de se normaliser du point de vue de la rception. Dune part, il y a certainement davantage de manifestations consacres aux auteurs africains. Cela montre au moins une curiosit de la part des organisateurs des festivals. Dautre part, on voit de plus en plus dauteurs africains invits des festivals, des salons du livre qui ne sont pas axs sur lAfrique. Ils sont invits en tant quauteurs. Cette banalisation des crivains africains est le signe que la littrature africaine nest plus considre comme une littrature mineure.

MFI : Le festival des Littratures mtisses en est sa neuvime dition. Comment est ne lide de ce festival ?

B.M. : Comme vous le savez, Littratures mtisses est le pendant littraire du festival Musiques mtisses qui, lui, en est sa trente-troisime dition. Lide de lui adosser une rencontre littraire mest venue dans les annes 1980. Frapp par la popularit des Musiques mtisses , je mtais dit quil devait y avoir des lecteurs parmi ces milliers de mlomanes qui faisaient le succs de ce festival musical depuis des annes. A titre dessai, jai fait venir en 1984 Musiques mtisses la Guadeloupenne Maryse Cond. Elle venait de publier son roman best-seller Sgou qui est aussi le nom dune ville au Mali. Il se trouve que cette ville malienne est jumele avec Angoulme. Le prtexte tait donc tout trouv. Maryse Cond est venue accompagne dautres grandes figures des lettres afro-caribennes : Daniel Maximin, Tchicaya UTam Si, Massa Makhan Diabat. Le bagout de ce quatuor a transform lessai en un succs retentissant.



MFI : Quels sont les autres crivains africains que vous avez reus aux Littratures mtisses ?

B.M. : Je voudrais prciser que Littratures mtisses nest pas un festival de littrature africaine. Le mtissage dont il est question ici ne se rduit pas au mtissage Blanc/Noir ou Afrique/Europe. Ds le dbut, jai fait de sorte que cette rencontre soit le lieu de brassage des crivains venus dhorizons divers. Pour moi, le vritable mtissage est dans la rencontre, souvent indite, entre des crivains aux parcours totalement diffrents tant du point de vue de leurs origines que de celui de leurs pratiques littraires. Do la trs grande varit de personnalits quon a reues aux Littratures mtisses , du Sud-africain Andr Brink au Franco-Grec Vassilis Alexakis, en passant par lIndo-Qubcois Neil Bissoondath, le Marocain Abdellatif Labi, lAlgrien Boualem Sansal, lIranienne Marjan Satrapi ou lAfghane Spozma Zariab.

MFI : Fatou Diome, Sayouba Traor, Gaston Kelmann sont quelques-uns des crivains laffiche cette anne.

B.M. : Comme la programmation musicale est trs axe cette anne sur le Sahel, jai choisi, moi aussi, mes invits littraires selon un axe sahlien, au sens large du terme. Il y aura donc Fatou Diome qui est sngalaise. Sayouba Traor, lui, est burkinab. Issouf Ag Maha est un nomade touareg et Albakaye Ousmane Kounta est originaire de Tombouctou. Ils seront en dialogue avec des non-sahliens tels que le Camerounais Gaston Kelmann, la Libanaise Zeina Abirached et Jeanne Benameur qui, elle, est ne dun pre maghrbin et dune mre italienne. Qui plus est, mes invits sont multiples par leurs talents : ils sont potes, musiciens, romanciers, dramaturges, photographes, dessinateurs. Je suis convaincu que cette diversit de pratiques et dapproches rendra plus riches les changes avec le public et entre les crivains eux-mmes.

Tirthankar Chanda

retour