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MFI HEBDO: Economie Dveloppement Liste des articles

08/12/2006
Bailleurs de fonds : une prise en compte ingale du genre

(MFI) Consquence de la longue lutte des femmes pour leurs droits, la prise en compte dans les programmes de dveloppement de la notion de genre fait dsormais partie intgrante de laide des institutions internationales et multilatrales. Et les bailleurs de fonds bilatraux, les uns aprs les autres, sorganisent en consquence.

Malgr les rticences de dcideurs qui sont toujours dans leur trs grande majorit des hommes, les agences du systme des Nations unies (Onu) se sont mises au diapason du genre. La Commission conomique des Nations unies pour lAfrique a par exemple labor un indice dveloppement et ingalits entre les sexes, destin aider les politiques publiques labores par les Etats. LOrganisation internationale du travail (OIT) a cr une unit de coordination des questions de genre au sein de son centre de formation, qui tudie notamment la relation genre-pauvret-emploi. LOrganisation pour lalimentation et lagriculture (FAO), elle, a tabli un programme daction socio-conomique participatif selon le genre qui fournit de nombreux outils de formation notamment sur la microfinance, lirrigation et lurgence
LOrganisation internationale de la Francophonie (OIF) a de son ct adopt, ds lan 2000, une dclaration Femmes, pouvoir et dveloppement et a intgr lgalit femmes-hommes dans son cadre stratgique dcennal 2005-2014 adopt en novembre 2004. Le rapport annuel 2006-2007 a notamment tudi la parit au sein de chaque entit membre de lorganisation. La Banque mondiale, de mme, poursuit ses efforts dans ce domaine et a adopt en septembre 2006 un plan daction sur le genre.


Les progrs dans la prise en compte du genre sont ingaux entre les pays donateurs

LOCDE, qui regroupe les principaux pays industrialiss qui sont aussi les principaux donateurs a cr au sein de son Comit daide au dveloppement (CAD) un rseau, Gendernet, charg de dfinir des lignes directrices pour lintgration du genre dans la coopration et de faciliter le passage des principes la pratique travers lchange dexpriences. Le CAD avait dfini ds 1998 des lignes directrices pour lgalit entre hommes et femmes. Selon un rapport publi en juin 2006, qui analyse laide visant lgalit hommes-femmes et lautonomie des femmes sur la priode 1999-2003, le CAD constate que les deux tiers de cette aide sont canaliss vers les secteurs sociaux, en particulier lducation et la sant de base, et il regrette que certains pays membres ne consacrent que trop peu de ressources la promotion du genre par rapport dautres secteurs comme le transport, les communications et lnergie. Ainsi, selon ltude, laide lagriculture se limite 10 % du total alors que les femmes y jouent un rle prpondrant, en particulier en Afrique sub-saharienne.
Le CAD note galement que les progrs parmi les pays membres en faveur de la prise en compte du genre dans laide au dveloppement restent ingaux, jugement qui vaut aussi pour lUnion europenne dont les membres font tous partie de lOCDE. Les meilleurs lves restent les pays nordiques et les Pays-Bas qui sont aussi les principaux donateurs daide par rapport leur PNB. Ils sont toutefois rejoints dans le peloton de tte par des pays comme la Grande-Bretagne, qui a jou un rle pionnier dans la promotion du concept genre et dveloppement , le Canada, la Suisse et plus rcemment lEspagne, pays pourtant latin et de tradition catholique, qui a pris cur laction en faveur de lgalit des sexes. La France a galement dvelopp des politiques dintgration du genre dans ses programmes daide, dont la mise en oeuvre na pas produit les rsultats escompts. Cest pourquoi, en 2006, elle renforce ses engagements en la matire (cf encadr ci-dessous).
Pour leur part, les pays du Sud commencent intgrer ce lien indissociable entre genre et lutte contre la pauvret, mme si les facteurs socio-culturels psent sur la mise en oeuvre de tels programmes. Il reste ainsi les convaincre concrtement, tche difficile malgr les prises de position de principe. Dautant que des changements importants sont intervenus dans le domaine de laide : dune part la tendance porte privilgier de plus en plus, en lieu et place de laide-projet, le soutien budgtaire aux politiques labores par les pays bnficiaires eux-mmes. Dautre part ces pays, notamment africains, ont dsormais de nouveaux partenaires, la Chine et lInde, qui accordent leur assistance sans conditions politiques. Cette nouvelle situation rduit sensiblement les moyens de pression dont pouvaient disposer les bailleurs de fonds pour faire avancer les droits de lHomme et par consquent, bien sr, ceux de la femme.

Marie Joannidis


Trois questions Brigitte Girardin, ministre dlgue la Coopration, au dveloppement et la francophonie de la France

MFI : Pourquoi avoir cr une plate-forme Genre et Dveloppement ?


Brigitte Girardin : La cration de cette plate-forme tait un engagement que javais pris, le 8 mars 2006, loccasion de la Journe de la Femme. La promotion de lgalit entre les hommes et les femmes est en effet indissociable de tous les efforts dploys par la France, au sein de la communaut internationale, en vue dun dveloppement solidaire et durable des pays du Sud. Il sagit tout autant dune question de lutte pour lgalit des droits que dune condition majeure de ralisation du progrs conomique et social. Investir dans le renforcement des capacits des femmes, cest amliorer durablement la situation sociale et politique des pays en dveloppement.
Des questions concrtes se posent : comment, sur le terrain, mieux contribuer changer les conditions de vie et les perspectives davenir des femmes et des socits ? Comment mobiliser plus efficacement les moyens de la solidarit franaise, publique et prive, pour atteindre cet objectif ? Cest la recherche des meilleures rponses que je souhaite associer la plate-forme. Afin que les outils futurs puissent bnficier de lexpertise de tous les acteurs franais, quels quils soient, ONG, collectivits locales, centres de recherche


De quels moyens cette plate-forme dispose-t-elle ?

Sa premire ressource, ce sont bien sr ses membres, qui apportent leur capital dexpriences et danalyses, mais aussi et surtout leur volont davancer au service de lgalit hommes-femmes dans le monde. Cette plate-forme est soutenue par mon ministre, mais, en tant quinstance de dialogue, ne dispose pas de moyens propres. En revanche, nous mettons son service le rseau Genre en Action, que nous subventionnons depuis quelques annes dj. Ce 12 dcembre 2006, je prsente une brochure que mon ministre publie et qui expose les actions menes en la matire par les oprateurs franais, quil sagisse du ministre des Affaires trangres, de lAFD, des institutions de recherche ou des ONG. Elle permettra dinformer nos partenaires et sera aussi un outil utile pour nourrir les discussions au sein de la plate-forme.


Quels sont les rsultats escompts ?

Il sagit pour nous, aujourdhui, de trouver de nouvelles voies daction, dimaginer de nouvelles pratiques, afin de donner un contenu concret une notion qui reste encore un peu thorique. Cette plate-forme a vocation devenir le carrefour des ides et des initiatives de la recherche, de laction publique et de la socit civile. Il nous faut avoir lesprit que lagenda international avance vite sur ces questions de genre. Plus nous anticiperons, mieux nous saurons proposer et donner les impulsions ncessaires. Sans doute faut-il dailleurs prciser quil serait contre-productif de vouloir rechercher le plus petit dnominateur commun entre tous les acteurs franais, pour aboutir tout prix une position franaise tendue au monde associatif ou la recherche. Il sagit avant tout de faire vivre le dbat. La rponse franaise nen sera que plus apprcie.

Propos recueillis par M. J.

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