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23/03/2007
Lutte contre les discriminations
Seuls 11 % des employeurs franais respectent lgalit de traitement


(MFI) La lutte contre les discriminations au travail et lembauche figure en bonne place dans la campagne prsidentielle franaise pour combattre le chmage. Mais comme le montrent des tudes rcentes effectues par le Bureau international du travail, beaucoup reste faire en Europe et particulirement en France sur le plan de lgalit des chances.

Ralises depuis dix ans par le Bureau international du travail (BIT) en liaison avec les autorits concernes dans les pays, les enqutes par tests de discrimination lembauche font apparatre des rsultats similaires pour la plupart des pays dEurope, avec des taux de discrimination allant de 30 % jusqu plus de 40 % : les candidats dorigine trangre doivent ainsi dposer trois ou quatre fois plus de candidatures pour obtenir le mme nombre de rponses positives que le candidat dorigine nationale. De plus, les femmes, qui constituent plus de 50 % des travailleurs migrants en Asie, en Europe, en Amrique latine et du Nord ainsi quen Ocanie sont doublement discrimines tant sur le plan social que de lemploi.
Le BIT ralise ces tudes pour aider les membres des gouvernements et les partenaires sociaux approfondir leur connaissance des attitudes discriminantes sur le march du travail et pour permettre lapplication de solutions efficaces. De telles enqutes ont dj t menes aux Pays-Bas, en Allemagne, en Espagne, en Belgique et aux Etats-Unis et plus rcemment en Sude et en France. Ces tests en situation se basent sur des comportements constats chez les employeurs en recherche de candidats et de postes pourvoir plutt que sur des dclarations subjectives. Les rsultats ne peuvent tre influencs par des rponses socialement correctes puisque les employeurs ne sont pas conscients dtre tests.

Deux candidats en tous points similaires except le patronyme

Les testings ont eu des impacts significatifs dans certains pays. En Belgique par exemple, au milieu des annes quatre-vingt-dix, ltude du BIT a permis la mise en place de campagnes de lutte contre les discriminations par les trois grandes fdrations syndicales et a galement permis llaboration, par la fdration des employeurs, dun code de pratique pour ses membres. Des mesures administratives anti-discriminatoires ont t adoptes aux niveaux rgional et fdral. Des formations spcifiques sur la discrimination ont t menes par linspection du travail. Les rsultats ont permis une modification de la lgislation nationale.
En pratique, le principe du test est simple : deux candidats en tous points similaires (parcours scolaire, formation, exprience professionnelle et lieu de rsidence), except le patronyme. Les comportements adopts par les recruteurs au fil des tapes du recrutement sont ensuite scrupuleusement enregistrs. En France, le BIT a test ainsi 2 440 offres demploi ; 350 candidats testeurs (des comdiens forms lexercice) ont rpondu des offres demploi de basses et moyennes/basses qualifications, dans les secteurs du commerce et de la vente, des htels-restaurants, du transport ou du BTP pour les hommes; du commerce et de la vente, de la sant, des services la personne, des htels-restaurants, de laccueil et du secrtariat pour les femmes. Tous Franais, les candidats se distinguant uniquement par le nom voquant soit une origine hexagonale ancienne soit une origine maghrbine ou noire africaine ont engag la mme procdure de candidature pour le mme emploi.

Seuls 11 % des employeurs franais respectent lgalit de traitement

Dans ses conclusions, le rapport souligne que prs des neuf diximes de la discrimination est enregistre avant mme que les employeurs ne se soient donns la peine de recevoir les deux testeurs. Les employeurs tests ont trs nettement discrimin les candidats minoritaires. Seulement 11 % dentre eux ont respect tout au long du processus une galit de traitement entre les deux candidats, en leur proposant un essai ou une embauche, ou en les refusant tous les deux aprs les avoir rencontrs. En revanche, 70 % des employeurs ont favoris le candidat majoritaire, contre 19 % qui ont favoris le candidat minoritaire. Le rapport sur la France prsent la mi-mars 2007 doit tre publi dans la srie des documents de travail de lOrganisation internationale du travail (OIT) intituls Cahiers des migrations internationales, dont le but est de diffuser les rsultats des recherches rcentes et de stimuler llaboration de politiques de rgulation et dintgration.
Pour Patrick Taran, spcialiste principal des migrations au BIT et coordinateur du projet "testing", la lutte contre les discriminations dpend la fois des flux des migrations et de la panoplie lgislative de chaque pays. Nous ne pouvons agir qu la demande et avec le soutien des pays , explique-t-il, voquant aussi une troite collaboration avec lobservatoire de lUnion europenne sur le racisme et la xnophobie. Les directives en la matire de lUnion europenne ont dclench, dans les annes 2000, un processus de modernisation du cadre juridique et institutionnel de lutte contre les discriminations dans plusieurs pays membres et notamment en France, notamment par ladoption de la loi du 16 novembre 2001 relative la lutte contre les discriminations, qui complte les dispositions anti-discriminatoires dj incluses dans les codes du travail et pnal. Et surtout par la cration, fin 2004, de la Haute autorit de lutte contre les discriminations et pour lgalit (Halde), autorit administrative indpendante comptente sur toutes les discriminations prohibes par la loi ou par un engagement international auquel la France est partie prenante.

Marie Joannidis

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